Confinement : les maraîchers bio tirent leur épingle du jeu

L’épidémie de coronavirus et le confinement mis en place ont modifié la manière de consommer de nombreux Français. Une opportunité pour l’agriculture biologique qui a su notamment adopter de nouvelles pratiques de distribution. 

Le coronavirus, une aubaine pour les fruits bio (Photo flickr)

Pour pallier la chute de leur chiffre d’affaires, certains producteurs ont mis sur pied de nouveaux modes de distribution. C’est le cas du maraîcher « Les jardins de l’hermitine », à Vittefleur en Seine-Maritime. Vincent Cavelier qui dirige cette ferme biologique, a mis en place un service de livraison dans sept communes situées à proximité de son exploitation. Tous les jours, le maraîcher se rend dans un village différent pour distribuer ses paniers de légumes. « Nous avons mis ce procédé en place pour compenser la perte de chiffre d’affaires due à la fermeture des marchés », raconte le producteur.

Coronavirus oblige, cette distribution mise en place avec l’aide des mairies répond à des normes très précises. « Toute personne ne respectant pas la distance sociale d’un mètre, ou n’ayant pas passé de commande au préalable se verra refuser le droit de commander un panier », précise la brochure distribuée par Vincent Cavelier à sa clientèle.

Les paniers sont disposés sur une table installée par le producteur devant les différentes mairies. Pendant une heure, les clients se succèdent pour récupérer leurs provisions. Cette formule mise en place à l’occasion du confinement a séduit de nombreux habitants.

« Notre nombre de clients a augmenté, on touche une clientèle plus large »

« Les gens sont plus sensibles aux circuits courts »

A l’origine de cet engouement figure une remise en cause du mode de consommation traditionnel ; une aubaine pour des exploitations locales et biologiques comme celle de Vincent Cavelier.« C’est sûr qu’aujourd’hui les gens sont plus sensibles aux circuits courts, ils rechignent à se rendre dans les grandes surfaces », confirme le maraîcher.  « Je ne peux plus aller au marché et je préfère acheter localement. C’est une occasion formidable pour moi d’acheter directement au producteur. C’est vraiment un circuit court »,  abonde Claire de Maupeou, une des clientes hebdomadaires des Jardins de l’Hermitine.

Ce nouveau mode de consommation, qui fait la part belle aux productions locales, va t-il résister au déconfinement ? C’est la question que se pose Vincent Cavalier, qui espère bien profiter de cette nouvelle dynamique. « Maintenant que j’ai fait connaissance avec ce producteur, je reviendrai le voir », avance Claire de Maupeou. Malgré cet engouement, l’heure n’est pas aux réjouissances prématurées. « Peut-être que 50% des gens vont garder une certaine mentalité vertueuse, mais je pense que les vieux réflexes vont revenir très vite », relativise Vincent Cavelier. « C’est avec le temps qu’on va le découvrir », conclut-il.

Paul de Boissieu

Coronavirus : Internet à la rescousse de la messe

Avec le coronavirus et le confinement qui l’accompagne, les lieux de cultes ont du adapter leurs pratiques. Pour maintenir un lien avec les fidèles, certaines paroisses ont fait le choix de diffuser leur célébrations en direct. 

En cette période de confinement, les bancs des Eglises sont vides. (Photo Flickr)

Un orgue retentissant, quatre prêtres, un sacristain, un chantre… Au premier abord la messe dominical de la basilique Sainte-Clotilde à Paris ressemble à s’y méprendre à une cérémonie ordinaire. A un détail près, qui n’est pas sans importance : ce dimanche 26 avril point de fidèles dans l’église, les ouailles suivent l’office depuis chez eux, derrière leurs écrans. Retransmise sur la chaîne YouTube de la paroisse, la messe se déroule dans une église étrangement vide.

Depuis un peu plus d’un mois, cette situation inédite est devenue habituelle pour les 14 000 prêtres catholiques répartis en France. Coronavirus oblige, le confinement décrété le 17 mars a sonné le glas des offices religieux célébrés en communauté. Pour pallier la pénurie de fidèles, les paroisses ont été contraintes de s’adapter. Depuis plusieurs semaines, certaines d’entres elles ont fait le choix de diffuser la messe en direct. Un système qui permet aux paroissiens d’assister aux offices. « Ça a été mis en place dès le deuxième dimanche après le confinement. C’est un moyen de rester en lien avec les fidèles, d’avoir un rendez-vous », raconte Edouard Dacre-Wright, l’un des prêtres de la paroisse Sainte-Clotilde.

La messe, un moment important pour les paroissiens

Organisées au cas par cas selon les paroisses, les messes en direct sur Internet sont devenues un élément important pour les prêtres et leurs paroissiens. « Cela permet de dynamiser la spiritualité dans une période compliquée où les gens ont peur, et de garder un lien avec les autres. Ils viennent chercher l’appartenance visible à une communauté», raconte Thomos Binot, curé pour la paroisse Saint-Vincent de Paul à Clichy, en région parisienne.

« Le fait de savoir que nous prions ensemble ça nous aide tous »

Avec internet, l’Eglise s’est découverte un allié inattendu pour affronter la crise du coronavirus. « Ça c’est montré fort utile. Grâce à Facebook et YouTube on a pu célébrer tous les jours la messe en direct et avoir pas mal de monde », confirme Thomas Binot.

Pour l’occasion les fidèles ont du se frotter à internet; une découverte pour certains d’entres eux. «Très clairement certains se sont mis aux nouvelles technologies. Ils y en avaient qui n’avaient jamais utilisé YouTube. Ils s’y sont connectés pour la première fois, ils étaient fiers d’y être arrivés», confirme le père Dacre Wright. Dans certains cas, les prêtres se sont mêmes transformés pour l’occasion en professeurs d’informatique « On les a aidés à faire les manipulations nécessaires, on les a guidés par téléphone », raconte le père Thomas Binot.Cette solution reste toutefois un expédient bien éphémère; suspendue aux annonces du gouvernement, l’Eglise attend avec impatience la réouverture des lieux de culte. « Nous espérons retrouver rapidement nos ouailles » conclut le père Dacre Wright.

Paul de Boissieu

Confinement : des collages virtuels fleurissent sur le net contre les violences faîtes aux femmes

Depuis le début du confinement, les colleuses de slogans dans la rue contre les féminicides ont été contraintes de cesser temporairement leur activité militante. Elles s’adaptent désormais en tentant d’envahir les réseaux sociaux avec des montages photos de leurs collages.

Les collages virtuels habillent de nombreux monuments parisiens photo via @collages_feminicides_paris

« En France, une femme sur dix a été violée ou le sera au cours de sa vie ». Le slogan qui s’affiche en lettres capitales noires sur la façade vitrée du Louvre surprend. Pourtant cette phrase n’a jamais été collée sur le devant du musée. Cette photo, diffusée sur le compte Instagram de Collages Féminicides Paris, a été créée de toute pièce, par des militantes féministes. Le but : continuer de faire vivre les collages qui dénoncent les violences faites aux femmes malgré le confinement et l’impossibilité de réaliser de véritables collages dans les rues.

 

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Collage virtuel. En France, 1 femme sur 10 a été violée ou le sera au cours de sa vie.

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Le pouvoir des réseaux sociaux

L’initiative, lancée par la graphiste Emilie Dupas, est simple. Grâce à des logiciels de retouche photo, les militantes mettent en scène leurs slogans sur des lieux aussi symboliques que la tour Eiffel ou un commissariat. Des images qui ont tout pour devenir virales. Une façon également de réaliser virtuellement des collages impossibles à faire dans la réalité, depuis la mise en place du confinement le 17 mars en raison de l’épidémie de coronavirus.

Eva Viallon, graphiste, fait partie des petites mains qui donnent vie à ces collages virtuels : « Je réalise ces collages virtuels depuis fin mars. J’avais déjà fait seulement un collage dans la rue auparavant. Depuis le confinement, je me suis impliquée un peu plus dans la lutte. »

 

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Collage virtuel réalisé par @evameihua. Police complice, l’Etat assassine, sur le commissariat du XIe arrondissement.

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Si les réseaux sociaux ont toujours été un outil de poids pour les colleuses, ils le sont encore plus aujourd’hui pour continuer à médiatiser leur combat. « Les réseaux sociaux sont un peu les nouveaux médias, quasiment tout le monde est sur les réseaux, tu as plus de visibilité. Le confinement fait que l’on passe plus de temps sur les réseaux sociaux, il était donc nécessaire de continuer la lutte afin de toucher encore plus de monde« , poursuit Eva Viallon.

Dès septembre 2019, les photos de véritables collages avaient massivement circulé sur Instagram et Twitter. Ils avaient participé à faire connaître la réalité des violences violences conjugales et l’ampleur du problème.

Militer depuis chez soi

Eva Viallon peut ainsi consacrer jusqu’à deux heures à la réalisation d’un collage virtuel. Elle choisit des images libres de droit ou disponibles sur Google Street View. Ce sont parfois même des proches de victimes qui la contactent directement en choisissant le lieu et le slogan. « Le confinement m’a seulement permis de me donner plus de temps pour mieux comprendre le féminisme et comment m’engager davantage« , explique la militante.

En parallèle de ces collages virtuels, les militantes de Collages Féminicides ont également lancé une initiative à destination des victimes de violences conjugales. Celles-ci étaient encouragées à se prendre en photo avec une phrase de leur compagnon ou mari violent, mais également de leur père, grand-père et même de policier quand elles ont voulu porter plainte.

 

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Femmes victimes de violences conjugales, nous on vous croit. OMERTA POUR LES VICTIMES, LIGNE D’ÉCOUTE POUR LES BOURREAUX En réaction à l’annonce du gouvernement d’ouvrir une ligne d’écoute pour conjoint violent, dont les plages horaires seraient plus grandes que pour le 3919, nous avons décidé de réagir. Nous publions les témoignages de colleuses qui ont subi des agressions et qu’on a renvoyé immédiatement au silence. Cette mesure est une insulte et un crachat au visage des femmes victimes de violences que cette société qui n’a jamais su écouter et croire. Avant de vouloir écouter nos bourreaux éduquez la police, débloquez des budgets pour accompagner les survivantes, ouvrez des places en centre d’hébergements.

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Les violences faites aux femmes pendant le confinement, une situation préoccupante

Du fait de la promiscuité entre les victimes et leurs agresseurs, le problème des violences domestiques et conjugales a beaucoup augmenté depuis le début du confinement. Début avril, Marlène Schiappa avait annoncé une augmentation de 32% des violences conjugales depuis le 17 mars.

Pour lutter contre cette situation des numéros et des plateformes d’écoute ont également été mis en place. Les femmes victimes peuvent aussi être accompagnées en appelant le 3919.

Pauline Paillassa

Le confinement, heure de gloire du sport à domicile

Face à la fermeture forcée des espaces sportifs à cause du confinement lié au Covid-19, l’offre de coaching en intérieur connaît une croissance fulgurante. Les réseaux sociaux et autres applications deviennent un refuge salutaire pour la population confinée ; un eldorado de circonstance pour les professionnels du secteur.

De l’extérieur à l’intérieur, le sport se pratique désormais depuis son salon. @Hugo Roux

« Encore une fois, c’est la dernière ! Et on relâche, soufflez bien. » Alors que de fines gouttes de sueur terminent leur course sur le tapis du salon, Charlotte retrouve sa respiration. La séance sportive, qu’elle suivait sur son ordinateur portable, est terminée. Depuis l’interruption de son service civique à cause du confinement, la jeune femme de 22 ans a dû troquer son bureau de l’Opéra national de Paris pour son appartement exigu, situé en banlieue parisienne. Elle remarque avec joie les progrès réalisés depuis sa reprise du sport, échappatoire aux trente mètres carré dans lesquels elle demeure enfermée et à l’isolation physique.

Comme elle, un grand nombre de sportifs néophytes ont décelé en cette période de confinement un moment propice pour s’essayer aux pompes et autres exercices de musculation. Contrer l’inactivité et se défouler ont incité une partie croissante de la population cloîtrée chez elle à user des contenus sportifs sur Internet. A l’heure où piscines, salles de sport et terrains sont fermés, ce sont notamment les réseaux sociaux qui ont accueilli à bras ouverts les professionnels du secteur sportif.

Renouer en direct ou en différé avec l’effort

« Ça m’est venue très naturellement, cette idée de proposer des cours en live sur les réseaux sociaux », s’enthousiasme Erika Arzac. Depuis 2016, la coach sportif met à profit son entrain dans une grande enseigne de salles spécialisées. C’est dorénavant derrière un écran que la pétulante femme de 38 ans offre gratuitement ses services. 30 personnes en moyenne participent à ses séances quotidiennes, diffusées en direct sur Facebook. « Je mets toujours beaucoup de conviction, beaucoup de passion dans la réalisation de ces vidéos. Je m’efforce de rester le plus naturel possible, fais en sorte de reproduire ce que je fais réellement en cours », souligne-t-elle. Corollaire de cette recette authentique gagnante, la croissance galopante du nombre de ses abonnés est constituée de fidèles, mais aussi de petits nouveaux du monde du sport qui ont fait le choix d’investir les réseaux sociaux.

Publiée par Erika Coach sportif sur Mercredi 25 mars 2020

Pour sa part, c’est lors d’une intervention sur un feu que Maxime a décidé de redresser la barre, avant même le confinement. Ce pompier volontaire résidant à Tarbes, dans les Hautes-Pyrénées, a  opté pour un entraînement personnalisé via une application. « Elle me permet d’avoir un suivi régulier, je pense que l’intelligence artificielle, un coach virtuel, analyse nos performances et nous envoies sur d’autres exercices afin de progresser », détaille ce directeur de centre de loisirs de 26 ans. Le temps libre octroyé par l’obligation de rester chez lui l’enjoint à conserver sa motivation. Et de ne pas retomber dans des travers peu diététiques. Comme le précise Elodie Dincuff, community manager de l’application à l’échelle européenne, Maxime semble faire partie du pic habituel d’abonnements, en phase avec les bonnes résolutions du Nouvel an et de la rentrée. Reste que l’application a grimpé de la 750e à la 113e place au classement des applications quotidiennement téléchargés sur iPhone, d’après les données analytiques d’App Annie, spécialiste du suivi des industries des applications mobiles.

Face à l’instauration de la limite d’une heure de jogging quotidienne, les pouvoirs publics s’efforcent tout autant de proposer des alternatives sportives en intérieur. Le ministère des Sports, qui recommande une heure d’activité physique par jour pour les enfants, a développé une nouvelle offre en partenariat avec certaines fédérations : la Fédération française de cyclisme (FFC) a ainsi lancé son #RoulezChezVous, tandis que la Fédération française d’éducation physique et de gymnastique volontaire (FFEPGV) propose sur son site des vidéos d’activités supervisés par des professionnels.

https://twitter.com/FFCyclisme/status/1255079131726983169?s=20

Les intérêts multiples du sport

Le confinement confirme en parallèle un phénomène autrement plus circonstanciel : une communication accrue entre les différents sportifs à domicile, mus en une communauté à part entière. « Cela a été un facteur décisif dans le choix d’utiliser une application, avec l’entraide et les conseils qui vont avec », confirme Elodie, qui profite de la fin de sa reconversion professionnelle dans la mécanique ferroviaire pour s’atteler à reprendre le crossfit. Preuve que le sport sous-tend un lien social recherché à l’occasion du confinement. « J’ai fortement été surpris de voir que, lors de mes lives, il y avait des gens de ma région normande, mais aussi des gens du Grand-Est, de Lyon, de Marseille et de Paris », explique Erika, dont les vidéos ont fait l’objet de l’engrenage numérique de partages et commentaires. Ce rôle social associé à son métier, la coach sportif s’efforce de le faire prospérer par l’intermédiaire des claviers, entre réconfort pour une motivation défaillante et encouragements.

Contre l’isolation suscitée par le confinement, il y a une unanimité des néo-sportifs d’intérieur sur l’intérêt mental de l’exercice physique. « J’ai tiré parti du confinement pour débuter le sport et dynamiser ma condition physique, mais aussi pour garder le moral et éviter le canapé », confie Charlotte, alors qu’elle conclut ses étirements à l’aide d’une chaise. Tout comme Maxime, elle met en exergue une confiance en soi revigorée et une activité ranimée alors que le spectre de la procrastination n’est jamais loin. « Les journées se ressemblent cruellement toutes. Et la séance de sport est un peu devenu le rendez-vous bien-être du quotidien », ajoute l’étudiante.

Toutefois, le secteur du sport essuie un étonnant contraste dans les conséquences économiques de cette période de confinement. Alors que d’innombrables offres de coaching, par application ou vidéos, font florès, il est encore difficile d’établir le développement financier de ces structures. D’autres demeurent dans l’appréhension, tel Erika Arzac qui a acquis un statut d’autoentrepreneur en 2018. L’ancienne militaire espère ainsi que le déblocage exceptionnel de l’Aide à l’entreprise (ARCE), décidé en mars par le gouvernement, sera reconduit au mois d’avril. « Avec un déconfinement le 11 mai et une réouverture bien plus tardive des salles de sport, j’ai peur des retombées économiques par rapport au fait que, si on ne peut plus disposer de cette aide, cela risque d’être très compliqué », pointe-t-elle. Surtout, la pugnace coach de l’Eure espère retrouver le plus rapidement possible le monde concret, où sport rime, de toujours, avec le plaisir de se retrouver.

Hugo Roux