Catalogne: L’arrestation de Puigdemont fragilise les négociations

Après plus de 1400 jours en exil, l’ex président de Catalogne et eurodéputé Carles Puigdemont a été arrêté ce jeudi par les autorités italiennes. Un raz-de-marée qui divise la scène politique espagnole, et met en danger la récente reprise des négociations entre l’autorité centrale et le gouvernement régional catalan.

« Quand on vous tend la main d’un côté, et qu’on vous met une claque de l’autre, comment voulez-vous avoir confiance ? » réagit avec colère Daniel Camós, délégué du gouvernement de Catalogne en France, à l’évocation de l’arrestation de l’ex-président de la région autonome Carles Puigdemont, par les autorités italiennes ce jeudi soir. Il se rendait en Sardaigne dans le cadre d’un festival culturel catalan.

« Double discours », « assez de répression »: Cette arrestation ravive les passions en Catalogne. Alors que quelques quatre cents personnes manifestent depuis 9h ce matin devant le consulat italien à Barcelone, cet événement remet en cause le récent réchauffement des relations entre le pouvoir central et régional. Accusé de détournement de fonds publics, de sécession… Carles Puigdemont fuyait l’Espagne depuis l’organisation du référendum d’indépendance qui avait agité le pays en 2017

Le contexte n’est pas anodin : l’arrestation de l’ex-président de Catalogne intervient une semaine après la table ronde entre le chef du gouvernement central Pedro Sanchez et le gouverneur régional de Catalogne Pere Aragonès, le 15 septembre. Les deux élus en avaient chacun dressé un bilan en demi-teinte. « Nos positions sont très éloignées, mais nous avons convenu que le dialogue est la meilleure façon d’avancer », avait déclaré le chef de l’Etat. Mais pour tous, un seul objectif : essayer de sortir de cette crise politique latente depuis dix ans.

Pour Daniel Camós, l’arrestation de Carles Puigdemont brise ce nouvel élan. « Il faut que tout le monde se mette d’accord pour arrêter de judiciariser la politique ! », exhorte le délégué du Gouvernement catalan. Sans vouloir prédire le futur des négociations entre autorités centrale et régionale, il explique au Celsalab « que l’essentiel dans un dialogue est de construire un lien de confiance, et que ce lien est maintenant fragilisé. » Car selon lui, aucun doute : cette arrestation « est illégale,» le mandat d’arrêt européen à l’encontre de Carles Puigdemont étant suspendu, d’après lui, depuis le 30 juillet.

A cette date, la Cour de Justice de l’Union européenne a confirmé à la demande de l’Espagne la levée de l’immunité parlementaire de l’ex-président de Catalogne, qui en bénéficiait depuis son élection comme eurodéputé en 2019. Cette décision fait depuis l’objet d’un recours.

« Certains juges nationaux disent que le mandat d’arrêt de 2017 était inactif depuis 2019, que l’immunité a été levée car Puigdemont ne risquait rien », détaille au Celsalab Maria-Elisa Alonso, politologue et spécialiste des questions liées à l’organisation des partis politiques espagnoles. Il n’a d’ailleurs pas été inquiété lors de ses allers-retours en France, ou en Suisse cet été. « D’autres disent que le mandat ne s’était pas arrêté, chacun a sa propre interprétation, » poursuit Maria-Elisa Alonso. « Personne ne sait ce qu’il en est, il faut attendre la réponse de l’Union Européenne et des tribunaux italiens, très à cheval sur le délit de sécession ».

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Un seul constat fait l’unanimité : la fin du conflit entre pouvoir central et indépendantistes n’est pas pour bientôt. « La politique peut parfois être irrationnelle », décrypte David Baez, professeur de droit constitutionnel espagnol à l’Université Catholique de Lille. « Les indépendantistes vont devoir suivre leur électorat, pour qui Puigdemont est une figure très importante, et qui verra surement d’un mauvais œil la reprise du dialogue diplomatique. » Mais pour lui, si le gouvernement régional catalan est honnête, il doit comprendre « que c’est une affaire aux mains des juges, que le gouvernement central ne peut rien faire. »

Pere Aragonès, qui exigeait « la libération immédiate du président Puigdemont », a été entendu : sans pouvoir quitter la Sardaigne, ce dernier a été relâché cette après-midi. Le chef de l’Etat Pedro Sanchez a formulé pour sa part un nouvel appel au dialogue. Un dialogue « aujourd’hui plus nécessaire que jamais », pour que « la Catalogne puisse surmonter le traumatisme de 2017 », selon ses mots.

Charlotte de Frémont 

Des élus locaux critiquent l’évacuation des jardins d’Éole et de Stalingrad

Le président de la Seine-Saint-Denis s’oppose également

Stéphane Troussel, président du département de la Seine-Saint-Denis affirme ne pas accepter l’opération « sur la forme » ni « sur le fond« .

Il dénonce une action qui n’est pas pérenne « sans la prise en charge sanitaire et thérapeutique adaptée des personnes toxicomanes », rejoignant la proposition d’Anne Hidalgo de mobiliser les hôpitaux franciliens.

Stéphane Troussel ne considère « pas sérieux » l’argument du préfet de police qui justifie le déplacement des toxicomanes par l’absence de proximité immédiate d’habitations ou d’écoles dans le quartier des Quatre-Chemins.

 

 

Le Conseil d’Etat confirme la dissolution du CCIF et de Baraka City

Le Conseil d’Etat a confirmé vendredi la validité de la dissolution des associations Baraka City et CCIF par le gouvernement fin 2020. Le CCIF qualifie cette décision de tournant vers « l’arbitraire politique et répressif en France ».

Une décision qui avait fait grand bruit fin 2020. La dissolution en novembre et décembre dernier des associations Collectif contre l’islamophobie (CCIF) et Baraka City a été validée par le Conseil d’Etat vendredi. Cette décision vient confirmer l’action du gouvernement contre ces deux groupements l’année passée, à la suite de l’assassinat de Samuel Paty par un jeune extrémiste islamiste.

Le CCIF a réagi à cette annonce en fustigeant un « tournant majeur dans l’institutionnalisation de l’arbitraire politique et répressif en France » dans un communiqué. L’association a considéré que cette décision « ouvrait la voie vers le délit d’opinion ».

La fermeté du gouvernement à l’égard de ces deux associations avait créé la controverse. Elles étaient toutes deux accusées d’avoir participé à la campagne de lynchage contre le professeur d’histoire-géographie Samuel Paty, décapité en pleine rue à Conflans-Sainte-Honorine le 16 octobre 2020.

Le CCIF était allé jusqu’à déposer plainte en diffamation contre le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin devant la Cour de justice de la République. Gérald Darmanin avait qualifié l’association d’ « officine islamiste » œuvrant « contre la République ».

 

J. B. avec AFP

Bracelet anti-rapprochement : un dispositif encore imparfait pour les victimes

Un an après sa mise en place officielle, le bracelet anti-rapprochement fait l’objet d’un bilan mitigé. D’un côté, le gouvernement se félicite du renforcement de ce dispositif, de l’autre, certaines associations pointent ses faiblesses.

« Un dispositif renforcé. » Selon Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur et à l’initiative du Grenelle contre les violences conjugales en 2019, le bilan est positif : un an après son instauration, le bracelet anti-rapprochement (BAR) a fait ses preuves.

Eric Dupond-Moretti, le garde des Sceaux, qui devrait présenter un nouveau système de réalité virtuelle testé prochainement sur des auteurs de violences conjugales, devrait rendre compte des résultats obtenus au cours de l’année.

« Un dispositif qui doit encore faire ses preuves »

À l’heure actuelle, 341 BAR ont été prescrits par la justice et 268 sont activés, selon Marlène Schiappa. Et le dispositif va s’élargir aux auteurs de violences conjugales commises avant la mise en place officielle du bracelet, en 2020.

Mais pour Emmanuelle Bomba, juriste bénévole à la Maison des femmes de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), ce dispositif « doit encore faire ses preuves ». Elle pointe un nombre insuffisant de bracelet. À la maison des femmes, cinquante à soixante-dix femmes sont reçues chaque semaine. Parmi elles, vingt ont déposé plainte. À l’échelle du territoire national, les 1000 bracelets accordés aux magistrats ne permettraient donc pas au dispositif de se déployer.

Le problème, selon Emmanuelle Bomba, se pose bien avant : « Beaucoup de femmes viennent nous voir car elles n’ont pas de nouvelles de leur plainte déposée ». Ainsi, si le processus n’est pas lancé, il n’est même pas envisageable de penser au bracelet.

Ce dispositif est décidé par un juge, avec l’accord de l’auteur condamné pour violences et à ses frais. Ce qui explique en grande partie le fait que tous les bracelets n’aient pas été attribués.

Un modèle espagnol

Le bracelet, adopté fin 2019 par le Parlement, est inspiré du modèle espagnol, qui a permis de faire reculer de manière significative le nombre de féminicides. Depuis son instauration en 2009, l’Espagne assure qu’aucune femme protégée par un bracelet n’a perdu la vie.

Selon l’avocate spécialiste des violences conjugales, Janine Bonaggiunta, le constat n’est pas encore le même en France et « le dispositif n’a pas marché pour plusieurs de [s]es clientes car il y a eu des récidives ».

Alain Legrand lui, président du FNACAV, la Fédération nationale des associations et centres de prise en charge d’auteurs de violences conjugales et familiales, salue cette mesure qui permet d’éloigner les auteurs des violences des victimes. Pour autant, il ajoute que « le dispositif ne suffit pas en lui-même. Il doit être accompagné d’une prise en charge, d’un travail thérapeutique renforcé. »

Une nouvelle source de stress

Concrètement, le bracelet fonctionne grâce à la géolocalisation. L’auteur et la victime sont chacun équipés d’un boitier. Un périmètre, établi par le juge doit en permanence séparer les deux personnes. Si le conjoint ne respecte pas ce périmètre la victime est immédiatement contactée, ainsi que les forces de l’ordre qui doivent intervenir.

« C’est comme si elles étaient toujours liées à lui »

Ce qui peut être source de stress pour la victime, qui appréhende le déclenchement de cette alarme.  « Tout ce que souhaitent ces femmes, c’est de sortir de l’emprise de l’agresseur, ne plus entendre parler de lui. C’est comme si elles étaient toujours liées à lui », analyse Emmanuelle Bomba.

Aglaé Gautreau