Jérôme Lepeytre : « Pour Philippe Martinez, le syndicalisme se fait au plus près du terrain »

Ignoré par Emmanuel Macron, mis sur la touche par les gilets jaunes, relégué au second rang des syndicats derrière la CFDT, perte de 40 000 adhérents … C’est dans un contexte social tendu que Philippe Martinez doit défendre son bilan au 52e congrès de la CGT, qui se tient jusque vendredi 17 mai à Dijon.
Philippe Martinez, leader de la CGT. /Crédit : Pascal Van

Pas question pour le leader de la CGT de changer de ligne face au gouvernement. Est-ce la meilleure façon de défendre le salariat ? Jérôme Lepeytre, journaliste spécialiste des questions sociales répond à nos questions.

La politique de la chaise vide paie-t-elle ?

Jérôme Lepeytre : Il faut garder en tête que le refus de se rendre à Matignon est surtout symbolique. C’est une stratégie qui arrive peu de temps avant le début du Congrès, qui a débuté le 13 mai. L’intérêt pour Philippe Martinez et les cégétistes est de lancer un message. En ne se rendant pas dans un environnement institutionnel, avec le Premier ministre et les autres partenaires sociaux, ils montrent qu’ils s’opposent fermement aux orientations du gouvernement. Plusieurs fois la CGT a refusé de d’aller à un rendez-vous avec le gouvernement, dont elle dénonce le refus de dialoguer. C’est à mon avis une mauvaise stratégie car ça la fait sortir du champ des acteurs sociaux qui pèsent politiquement mais aussi médiatiquement. Mais pour Philippe Martinez, le syndicalisme se fait au plus près du terrain, dans les entreprises et dans la rue où l’on peut créer un rapport de force.

On a l’impression pourtant que les gilets jaunes ont obtenu plus du gouvernement en sept mois que la CGT en quatre ans. Qu’en pensez-vous ?

JL : Il est évident que la crise des gilets jaunes touche la CGT, tout comme les autres organisations syndicales. Contrairement à la CFDT qui condamne fermement les actes des gilets jaunes, la CGT essaie de garder un lien de proximité avec eux. Mais les revendications des gilets jaunes et celles des cégétistes ne sont pas les mêmes. Les gilets jaunes se sont mobilisés pour crier contre la hausse des impôts. La baisse des impôts n’est pas une revendication syndicale, au contraire, le discours anti-fiscal du mouvement ne passe pas très bien auprès des cégétistes. L’autre difficulté est qu’il n’y a pas de porte-parole chez les gilets jaunes. Comme le gouvernement, la CGT ne parvient pas à mettre en place un dialogue avec le mouvement qui n’est pas représenté.

Philippe Martinez a affirmé le 11 mai dans Le Parisien, qu’il garderait le même cap s’il est reconduit. Est-ce une bonne stratégie ?

JL : Perdre sa place de numéro 1 des syndicats au profit de la CFDT a été un électrochoc pour Philippe Martinez. Cela fait plusieurs années qu’il y a des problèmes en interne mais personne n’a jamais rien fait pour ne pas se mettre à dos les unions syndicales et fédérations locales, qui pèsent politiquement dans les régions. Philippe Martinez a beaucoup critiqué ces problèmes et a affirmé plusieurs fois qu’il fallait retourner sur le terrain, même si les résultats sont minimes.

Comment les syndicats peuvent en 2019 représenter les travailleurs à l’heure de l’ubérisation ?

JL : C’est une question qui est débattue auprès de tous les syndicats. Ont-ils vocation à défendre le salariat ou toutes les formes de travail. Ce sont certes des indépendants mais les syndicats dont la CGT prennent en compte le fait qu’il existe une forme de subordination entre eux et des plateformes comme Uber. Les syndicats ont déjà fait un travail pour tenter d’aller à la rencontre de ces travailleurs mais ils ont du mal à appréhender leurs revendications. Ils sont face à des personnes qui ne sont pas des salariés et qui sont donc moins sensibles aux discours syndicalistes. Ces travailleurs n’ont pas forcément vocation à faire leur carrière chez Uber. Beaucoup de jeunes ont l’idée de travailler quelques années pour ces plateformes mais ils n’ont pas vocation à y rester. C’est un emploi temporaire. Les syndicats sont très en retard sur ces questions-là.

Pourquoi les jeunes ne se syndiquent pas ?

JL : Il y a évidemment des jeunes qui se syndiquent mais ils sont minoritaires. Les jeunes mettent de plus en plus de temps à trouver un emploi stable et donc à entrer dans un syndicat. Il est plus facile de faire partie d’un syndicat quand on est à temps plein et en CDI. La syndicalisation des précaires est compliquée.

Propos recueillis par Eva Mbengue

Nathalie Loiseau juge François-Xavier Bellamy « très très à droite »

Nathalie Loiseau fustige le rapprochement entre LR et Viktor Orban. / Crédits : Georges Schneider – Flickr

Au lendemain d’un échange avec François-Xavier Bellamy (LR), la tête de liste LREM Nathalie Loiseau a critiqué le positionnement « très très très à droite » du candidat Les Républicains. L’ancienne ministre des Affaires européennes dénonce le rapprochement de la droite française avec Viktor Orban, le Premier ministre hongrois. Nathalie Loiseau estime que ce dernier organise un régime autoritaire contraire aux valeurs de l’Union européenne.

Alexandre Cool

Fonctionnaires : l’exécutif n’a pas « renoncé » aux 120 000 suppressions de postes

Le gouvernement n’a pas « renoncé » à son objectif de 120 000 suppressions de postes de fonctionnaires selon Bruno Le Maire. / Crédit : Flickr, Claude

Selon Bruno Le Maire, invité politique ce matin sur Radio Classique, le gouvernement n’a pas « renoncé » à son objectif de 120 000 suppressions de postes de fonctionnaires sur l’ensemble du quinquennat, et estime que cet engagement sera tenu, « si c’est possible ». Pourtant, lors de sa conférence de presse du 25 avril, Emmanuel Macron s’était dit prêt à « abandonner » l’objectif de 120 000 suppressions de postes d’ici à 2022 sur l’ensemble de la fonction publique (État, hospitalière et territoriale), dans le cas où il ne serait « pas tenable ».

Le ministre de l’Économie et des Finances s’est dit “déterminé à ce que nous réduisions la dépense publique, la dette, et que nous tenions nos engagements en matière de réduction du nombre de fonctionnaires. Nous verrons si c’est possible ou non. » Cet objectif, engagement de campagne du Président, reste « atteignable », selon Gérald Darmanin, ministre des Comptes publics, tandis que le Premier ministre Edouard Philippe a assuré ne pas avoir de « dogme » sur le sujet de son côté.

LIRE AUSSI > Fonction publique, l’éternelle pomme de discorde.

Jeanne Seignol

 

 

 

 

Européennes : tout ce qu’il faut savoir sur le temps de parole accordé aux candidats

Le CSA (Conseil de l’Audiovisuel) a officiellement ouvert la période de campagne électorale pour les élections européennes dans les médias audiovisuels. Cette période s’étalera de ce lundi 13 mai jusqu’au 24 mai. Pour ce scrutin il applique pour la première fois les dispositions de la loi du 25 juin 2018. Celles-ci modifient les règles de la campagne audiovisuelle.

La période de campagne électorale pour les élections européennes a été lancée lundi. / Capture d’écran

Alors que la campagne électorale pour les élections a officiellement été lancée, les dispositions concernant le temps de parole accordé aux candidats sont floues. Pour comprendre, le Celsalab détaille les questions qui se posent.

  • Comment ça se passait avant ?

En 2014 les partis qui étaient représentés à l’Assemblée nationale ou au Sénat se répartissaient deux heures de temps de parole contre une heure pour les formations non-représentées au Parlement. Ces derniers disposaient chacun d’à peine cinq minutes.

 

  • Et maintenant ?

Cette année ce sont 312 minutes de temps d’antenne qui sont découpées en trois « fractions ».

Les formations disposeront chacune de 3 minutes de temps d’antenne, soit 102 minutes réparties entre les 34 listes. Ces 3 minutes seront découpées en deux spots publicitaires d’une minute trente. C’est le minimum accordé à tous les partis.

La deuxième fraction attribue 120 minutes d’antenne à répartir entre les listes enregistrées « au prorata du nombre de députés, de sénateurs et de représentants des élus en France au Parlement européen ayant déclaré les soutenir », selon le CSA. Sénateurs, députés et eurodéputés ont été sollicités par les bureaux du Sénat et de l’Assemblée pour savoir derrière quelle tête de liste ils se rangeaient. Les deux heures sont ainsi réparties entre les listes en fonction des soutiens obtenus. Ainsi LREM/MoDem disposent de 55 minutes. En revanche la France Insoumise, arrivée quatrième à la dernière élection présidentielle obtient 4 minutes et 28 secondes.

Enfin, pour ne pas léser les partis ayant une faible représentativité, le CSA a mis à disposition 90 minutes de « correction ». Celles-ci se fondent sur les intentions de vote et la participation des listes dans le débat public. Le Rassemblement National aura donc droit à 42 minutes.

  • Qu’en est-il de la parole présidentielle ?

Les chaines de l’audiovisuel vont devoir suivre certaines règles qui s’appliqueront aussi aux futures allocutions du président de la République Emmanuel Macron. Avant la réforme, l’exécutif et les membres du gouvernement disposaient d’un tiers du temps de parole à la télévision et la radio. Les autres listes se répartissaient les deux-tiers restant, en fonction de leur représentativité. Dorénavant les discours du Président seront également pris en compte dans le temps de parole de LREM/ MoDem, s’il est question d’Europe.

  • Pourquoi ce changement ?

En 2017, à deux semaines du scrutin des législatives, le parti du nouveau président Emmanuel Macron conteste les douze minutes qui lui sont accordées par le CSA. Ce temps d’antenne est prévu par l’article 167-1 du code électoral concernant les partis non-représentés par un groupe parlementaire à l’Assemblée. Le Conseil constitutionnel lui donne raison et oblige le législateur à modifier la loi.

Eva Mbengue