Biden réaffirme le soutien des Etats-Unis aux « courageux » citoyens d’Iran, un an après la mort de Mahsa Amini

A la veille du premier anniversaire de la mort de Mahsa Amini, Joe Biden a réaffirmé le soutien des Etats-Unis aux « courageux Iraniens » après que Washington ait annoncé, en coordination avec notamment le Royaume-Uni, une série de sanction contre le pouvoir iranien.

Le 16 septembre 2022, Mahsa Amini, jeune kurde iranienne de 21 ans, décédait après son arrestation par la police des moeurs pour non respect des obligations vestimentaires islamiques. Un an plus tard, et après une répression impitoyable du mouvement « Femme, Vie, Liberté » né du drame, Joe Biden a renouvelé son soutien au peuple iranien.

« Face à une oppression et à une violence continues, les citoyens d’Iran restent engagés (…) dans leur lutte pour un avenir libre et démocratique », a dit M. Biden dans un communiqué. « Seuls les Iraniens détermineront le sort de leur pays, mais les Etats-Unis restent engagés à se tenir à leurs côtés », a-t-il ajouté, en saluant « les courageux Iraniens qui poursuivent (la) mission » de Mahsa Amini.

Le mouvement de révolte a en effet perduré malgré la violente réponse du pouvoir, et à la veille de l’anniversaire de la mort de Mahsa Amini, la tension reste élevée. Cette contestation apparaît comme l’un des plus grands défis lancés aux autorités iraniennes depuis la révolution de 1979.

Vint-cinq responsables iraniens sanctionnés

Preuve de ce soutien, Washington a fait savoir plus tôt dans la journée qu’il imposerait, en coordination notamment avec le Royaume-Uni, le Canada et l’Australie, une série de sanctions à Téhéran. Elles visent 25 Iraniens, pour  la plupart des « membres clés » des forces de sécurité iranniennes et des puissants Gardiens de la Révolution, selon le Trésor américain. Parmi eux figure Gholamali Mohammadi, le chef de l’Organisation des prisons iraniennes, car sous sa supervision « de graves violations des droits humains » se sont produites, de la torture au viol.

Trois médias tombent également sous le coup de ces sanctions : Press TV, Tasnim News Agency et Fars News Agency. Est également ciblée une « entreprise iranienne de recherche sur internet », selon les autorités américaines. Cette dernière aurait aidé à la répression policière et la censure d’internet.

« Signal clair »

Quelques heures plus tôt, Londres affirmait pour sa part sanctionner des « hauts responsables de la préparation et de l’application de la loi iranienne sur le port obligatoire du hijab », selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Ces mesures visent en particulier le ministre de la Culture Mohammad Mehdi Esmaili, son adjoint Mohammad Hashemi, le maire de Téhéran Alireza Zakani et le porte-parole de la police, Saeed Montazer Al-Mahdi.

« Les sanctions prises aujourd’hui à l’encontre des responsables des lois oppressives de l’Iran envoient un signal clair que le Royaume-Uni et ses partenaires continueront à soutenir les femmes iraniennes et à dénoncer la répression que l’Iran inflige à son propre peuple », a déclaré le chef de la diplomatie britannique, James Cleverly.

Avec l’AFP

Visite de M. ben Salmane : Amnesty demande à E. Macron de mettre le Yémen au coeur des discussions

Ce lundi 9 avril, pendant que le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed ben Salmane déjeune avec Edouard Philippe puis rencontre la ministre des Armées Florence Parly, les associations humanitaires haussent le ton. Sur le parvis du Trocadéro, symbole des droits de l’Homme, Amnesty International a souhaité rappeler la politique répressive de la monarchie saoudienne, et condamner le commerce des armes entre la France et le pays invité. Interview d’Aurélie Perrier, coordinatrice Yémen-Arabie saoudite à Amnesty International France.

Quel message adressez-vous aujourd’hui au gouvernement ?

Aurélie Perrier : On veut l’interpeller sur la situation au Yémen, où 22 millions de Yéménites, soit 80% de la population, dépendent du droit humanitaire. Mais ce droit est violé par la coalition menée par l’Arabie Saoudite. On demande à Emmanuel Macron de mettre le Yémen au coeur de ses discussions avec Mohammed ben Salmane pour que l’Arabie saoudite lève son blocus qui empêche l’acheminement des aides humanitaires. Des centres de soin ont aussi été détruits, ce qui fait qu’en 2017, le Yémen a été le siège de la plus grave épidémie de choléra du 21e siècle, avec 1 million de cas déclarés.

Vous pointez également du doigt les contrats de vente d’armes avec la France

Aurélie Perrier : Avant le conflit au Yémen, la France vendait pour 14 millions d’euros d’armes à l’Arabie saoudite. En 2016, c’était passé à 1 milliard d’euros [700 millions d’euros, selon le média challenges]. Aujourd’hui, on ne sait pas ce que la France et l’Arabie vont signer, tout est assez secret, on ne sait pas ce qui est dit.

Amnesty manifeste aussi contre les répressions par le gouvernement saoudien des opposants politiques. Si les opposants sont muselés, si le sujet est secret, comment les organismes humanitaires peuvent-ils communiquer sur le sort des prisonniers ?

Aurélie Perrier : On a beaucoup de chercheurs affiliés à Amnesty qui se rendent sur le terrain. On a aussi beaucoup de contacts avec l’ACPRA, le Saudi Civil and Political Rights Association. Mais presque tous ses membres aujourd’hui sont en prison, certains menacés de mort.

Rien n’a changé du point de vue des droits humains depuis que MBS est devenu vice-premier ministre, en juin. Il y a eu des rafles en septembre, contre des journalistes ou des universitaires. En novembre, 300 hommes politiques ou hommes d’affaires ont été arrêtés, au nom de la lutte contre la corruption. En plus, il y a un manque de transparence, parce qu’on n’a réussi qu’à identifier seulement une soixantaine d’entre eux. Et la loi antiterroriste de 2014 est un prétexte supplémentaire pour arrêter toutes sortes d’opposants politiques.

La libéralisation des droits des femmes, comme l’ouverture en juin du permis de conduire aux femmes, c’est du flafla ?

Aurélie Perrier : On ne peut que la saluer mais il y a encore des discriminations systématiques avec le système du tutorat : pour se marier, s’inscrire dans un établissement d’enseignement supérieur, chercher un emploi ou encore se rendre à l’étranger, la femme a besoin de l’autorisation de son père, de son frère, de son mari par exemple.

Pour le permis de conduire, reste à savoir comment ça va être appliqué : les femmes devront-elles avoir l’autorisation de leur tuteur ? On a du mal à savoir si dans la réalité, la femme subira des pressions. Il y a la loi qui autorise le permis de conduire, mais ça ne suffit pas. Cette libéralisation n’est peut-être que cosmétique, un coup de communication pour plaire à l’Occident.

Mais il faut se rappeler que ces lois libérales envers les femmes, lancées par MBS, profitent à l’économie. Leur faire accéder au permis de conduire ou aux stades sportifs génèrent de l’argent, à un moment ou le prince héritier lance son plan “Vision 2030” : il veut passer d’une économie de la dépendance au pétrole à une économie plus durable basée sur le tourisme, dont les femmes font partie.

Aurélie Perrier, coordinatrice Yémen-Arabie Saoudite à Amnesty International France
Aurélie Perrier, coordinatrice Yémen-Arabie Saoudite à Amnesty International France

 

Fanny Guyomard

Le Ramadan a les yeux plus gros que le portefeuille

C’est à partir du 26 mai que commence la période de jeûne en France.

Pour Saïda Djemel, aide-soignante franco-algérienne de 51 ans qui vit à Poitiers (Nouvelle Aquitaine), le Ramadan  est une période de dépenses : « Pendant le Ramadan, nous achetons 70 euros de viande par semaine. Quand on ajoute les boissons, friandises, Assortiment_de_gâteaux_de_fantaisie_de_Constantinelégumes… tout cela coûte cher ». Mais pas question cependant pour Saïda d’établir un budget pour économiser : « Après avoir jeûné toute la journée, cela fait du bien de prendre un bon repas en famille. C’est aussi une période de fête dont on aime profiter ! »

Par ailleurs, le mois de Ramadan est un moment où il faut se montrer généreux : le croyant doit faire l’aumône (Zakat en arabe), qui fait également partie des Cinq pilliers de l’islam.

Cet acte de générosité peut pendre différentes formes, comme l’explique Saïda : « On peut donner de l’argent à une association, ou encore porter des repas à la mosquée qui les distribue aux pauvres ». Les personnes qui ne peuvent faire le Ramadan (femmes enceintes, raisons de santé…) doivent donner l’équivalent du prix d’un repas par jour selon leur habitudes de consommation.

La fin du Ramadan est célébrée par l’Aïd el Fitr qui aura lieu le 6 juillet cette année.

Asmaa Boussaha et Alice Pattyn

Le pèlerinage à La Mecque : un tourisme religieux en vogue

Cette année à la Mecque, entre 2 et 3 millions de musulmans du monde entier sont attendus dès le 2 juin pour le grand pèlerinage. On estime que 20 000 à 30 000 musulmans français s’y rendent chaque année. Depuis quelques décennies, ce voyage est devenu un business.

Il existe en réalité deux pèlerinages : le petit pèlerinage, « Umra », peut s’effectuer tout l’année et le grand pèlerinage, « Hajj », qui doit s’effectuer sur une période bien précise.

Kaaba_2Un voyage qui n’est plus signe de « fin de vie »

Omar Saghi, enseignant à SciencesPo Paris et auteur d’un livre sur le pèlerinage* expliquait en 2012 que ce voyage sacré a adopté les codes du tourisme : « Les agences doivent fidéliser les pèlerins car ils comparent désormais les offres […] Elles gèrent les groupes de pèlerins comme des groupes de touristes ». Un tel changement de pratiques est dû, selon lui, à l’évolution des pèlerins. Autrefois réservé aux personnes âgées ayant économisé pour accomplir le voyage en terre sainte, le pèlerinage à la Mecque a perdu son caractère unique et sa connotation de « fin de vie ». Désormais, parmi les pèlerins, il y a des jeunes couples qui n’hésitent pas à faire le voyage plusieurs fois.

Organisation millimétrée… et lucrative

Le grand nombre de fidèles attendus obligent l’Arabie Saoudite à prendre des mesures de sécurité importantes. Le royaume met en place des quotas par pays pour la distribution des visas. De plus, il est impossible d’organiser seul son séjour, celui-ci étant extrêmement codifié et ritualisé. Il faut passer par une agence de voyage, spécialisée ou non. Les mosquées françaises mettent également en place une aide logistique.

Ce « tourisme religieux » s’avère très lucratif. « Selon les formules et les hôtels, nous proposons des voyages entre 4500€ et 11000€. Cela prend en compte le billet d’avion et la vie sur place », explique Amina Harar, conseillère voyage dans une agence spécialisée dans l’organisation des pèlerinages à Paris. «Nous proposons aussi une assistance médicale».

Le pèlerinage est depuis plusieurs années un enjeu de taille pour l’Arabie Saoudite, qui cherche à diversifier son économie essentiellement basée sur les hydrocarbures. Celui-ci aurait rapporté 40 milliards d’euros en 2015, d’après une étude effectuée par la Chambre de commerce de La Mecque. Le pays a également lancé en 2013 des travaux d’agrandissement du lieu saint et espère accueillir 20 millions de visiteurs annuels d’ici à 2020, ce qui représenterait un bénéfice de 80 milliards d’euros.

* Paris-La Mecque. Sociologie du Pèlerinage (Editions PUF, 2010)

Asmaa Boussaha et Alice Pattyn