Le Ramadan a les yeux plus gros que le portefeuille

C’est à partir du 26 mai que commence la période de jeûne en France.

Pour Saïda Djemel, aide-soignante franco-algérienne de 51 ans qui vit à Poitiers (Nouvelle Aquitaine), le Ramadan  est une période de dépenses : « Pendant le Ramadan, nous achetons 70 euros de viande par semaine. Quand on ajoute les boissons, friandises, Assortiment_de_gâteaux_de_fantaisie_de_Constantinelégumes… tout cela coûte cher ». Mais pas question cependant pour Saïda d’établir un budget pour économiser : « Après avoir jeûné toute la journée, cela fait du bien de prendre un bon repas en famille. C’est aussi une période de fête dont on aime profiter ! »

Par ailleurs, le mois de Ramadan est un moment où il faut se montrer généreux : le croyant doit faire l’aumône (Zakat en arabe), qui fait également partie des Cinq pilliers de l’islam.

Cet acte de générosité peut pendre différentes formes, comme l’explique Saïda : « On peut donner de l’argent à une association, ou encore porter des repas à la mosquée qui les distribue aux pauvres ». Les personnes qui ne peuvent faire le Ramadan (femmes enceintes, raisons de santé…) doivent donner l’équivalent du prix d’un repas par jour selon leur habitudes de consommation.

La fin du Ramadan est célébrée par l’Aïd el Fitr qui aura lieu le 6 juillet cette année.

Asmaa Boussaha et Alice Pattyn

Le pèlerinage à La Mecque : un tourisme religieux en vogue

Cette année à la Mecque, entre 2 et 3 millions de musulmans du monde entier sont attendus dès le 2 juin pour le grand pèlerinage. On estime que 20 000 à 30 000 musulmans français s’y rendent chaque année. Depuis quelques décennies, ce voyage est devenu un business.

Il existe en réalité deux pèlerinages : le petit pèlerinage, « Umra », peut s’effectuer tout l’année et le grand pèlerinage, « Hajj », qui doit s’effectuer sur une période bien précise.

Kaaba_2Un voyage qui n’est plus signe de « fin de vie »

Omar Saghi, enseignant à SciencesPo Paris et auteur d’un livre sur le pèlerinage* expliquait en 2012 que ce voyage sacré a adopté les codes du tourisme : « Les agences doivent fidéliser les pèlerins car ils comparent désormais les offres […] Elles gèrent les groupes de pèlerins comme des groupes de touristes ». Un tel changement de pratiques est dû, selon lui, à l’évolution des pèlerins. Autrefois réservé aux personnes âgées ayant économisé pour accomplir le voyage en terre sainte, le pèlerinage à la Mecque a perdu son caractère unique et sa connotation de « fin de vie ». Désormais, parmi les pèlerins, il y a des jeunes couples qui n’hésitent pas à faire le voyage plusieurs fois.

Organisation millimétrée… et lucrative

Le grand nombre de fidèles attendus obligent l’Arabie Saoudite à prendre des mesures de sécurité importantes. Le royaume met en place des quotas par pays pour la distribution des visas. De plus, il est impossible d’organiser seul son séjour, celui-ci étant extrêmement codifié et ritualisé. Il faut passer par une agence de voyage, spécialisée ou non. Les mosquées françaises mettent également en place une aide logistique.

Ce « tourisme religieux » s’avère très lucratif. « Selon les formules et les hôtels, nous proposons des voyages entre 4500€ et 11000€. Cela prend en compte le billet d’avion et la vie sur place », explique Amina Harar, conseillère voyage dans une agence spécialisée dans l’organisation des pèlerinages à Paris. «Nous proposons aussi une assistance médicale».

Le pèlerinage est depuis plusieurs années un enjeu de taille pour l’Arabie Saoudite, qui cherche à diversifier son économie essentiellement basée sur les hydrocarbures. Celui-ci aurait rapporté 40 milliards d’euros en 2015, d’après une étude effectuée par la Chambre de commerce de La Mecque. Le pays a également lancé en 2013 des travaux d’agrandissement du lieu saint et espère accueillir 20 millions de visiteurs annuels d’ici à 2020, ce qui représenterait un bénéfice de 80 milliards d’euros.

* Paris-La Mecque. Sociologie du Pèlerinage (Editions PUF, 2010)

Asmaa Boussaha et Alice Pattyn

Russie : peine confirmée pour l’opposant au Kremlin Alexeï Navalny

Un tribunal russe a confirmé mercredi la condamnation à cinq ans avec sursis pour détournement de fonds de l’opposant numéro un au Kremlin, Alexeï Navalny. Déterminé à se présenter à l’élection présidentielle prévue en 2018, le blogueur anticorruption pourrait voir ses projets mis à mal par la confirmation de sa peine.

En février, Navalny a été reconnu coupable du détournement de 400 000 euros au détriment d’une société publique d’exploitation forestière alors qu’il était consultant du gouverneur libéral de la région. La cour régionale de Kirov a rejeté ce mercredi l’appel du blogueur.

Alexeï Navalny, considéré comme le principal opposant au Kremlin, dénonce un procès monté de toutes pièces par le gouvernement russe pour l’éloigner de la scène politique.

Malgo Nieziolek

Venezuela : la proposition d’une nouvelle Constitution attise le feu de la contestation

La dernière annonce du président vénézuélien Maduro lundi de créer une nouvelle Constitution a fait monter d’un cran le mécontentement populaire qui se manifeste depuis des semaines. Les opposants organisent ce mercredi à une « méga-manifestation » contre ce projet, dénonçant une manoeuvre pour repousser les élections et s’accrocher au pouvoir.

Serait-ce la mesure de trop ? L’annonce faite lundi par le président vénézuélien Nicolas Maduro de créer une nouvelle Constitution, destinée à remplacer celle de 1999 instaurée par son prédécesseur et mentor Hugo Chavez, a enflammé l’opposition. Les contestations ne se sont pas fait attendre, dans un climat déjà très tendu, alors que les manifestations appelant à la destitution du président sont quasiment quotidiennes depuis un mois.

Les anti-Maduro ont rapidement dénoncé une « tentative de coup d’état » et une « tactique trompeuse » maquillant, derrière la perspective d’une sollicitation citoyenne et populaire, une « manoeuvre politicienne ». Ces critiques visaient notamment un décret signé par le président, destiné à convoquer une assemblée constituante « populaire » chargée de rédiger la nouvelle Constitution. Les 500 membres qui la composeraient ne représenteraient « pas une Constituante des partis ni des élites », a déclaré le chef de l’Etat, mais « une Constituante ouvrière, communale, paysanne, une Constituante féministe, de la jeunesse, des étudiants, une Constituante indigène, mais surtout, mes frères, une Constituante profondément ouvrière, profondément communale », a-t-il poursuivi.

Dans une déclaration, les parlementaires ont dénoncé la perspective d’une « Assemblée constituante sélectionnée frauduleusement » qui permettrait au gouvernement d’obtenir « le contrôle de tous les pouvoirs ». La nouvelle Constitution serait surtout, selon les opposants du chef de l’Etat, un moyen de gagner du temps, alors que le président Maduro, rejeté par 70% de l’opinion, n’a jamais été aussi impopulaire.

Crise économique et politique

Il faut dire que la confiance envers le gouvernement est au plus bas depuis le 30 mars, jour où la Cour Suprême, favorable à Nicolas Maduro, a levé l’immunité parlementaire. Elle s’est également octroyée les pouvoirs du Parlement, seul organe où l’opposition est majoritaire. La mesure, revenant dans les faits à concentrer les pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires dans les mains du président, avait soulevé la colère des opposants au régime et de nombreuses critiques sur la scène internationale. Finalement abandonnée 48 heures plus tard, cette tentative n’a pas été oubliée par les anti-Maduro, qui y voient la preuve d’une dérive dictatoriale.

Ces derniers événements n’ont fait qu’accélérer la grave crise politique que traverse le Vénézuela depuis l’accession de M. Maduro au pouvoir en 2013. Après avoir connu une période prospère sous Hugo Chavez grâce à ses ressources pétrolières, le pays connaît actuellement une grave crise économique avec la chute des cours du brut. L’inflation vénézuélienne est la plus forte au monde, et les pénuries en denrées de bases et en médicaments empoisonnent la vie des habitants.

Une « méga manifestation »

Pour manifester leur colère, les opposants à Maduro ont appelé à descendre dans la rue. « Cette pantomime que [M. Maduro] veut organiser ne peut pas nous enlever notre plus grande force, celle du peuple dans la rue », a déclaré Freddy Guevara, vice-président du Parlement.

Dès lundi, des barricades fabriquées avec des déchets et des poubelles ont été érigées pour bloquer des rues de Caracas. Ce mercredi, les anti-Maduro doivent se rassembler lors d’une « méga-manifestation » sur une autoroute de l’est de la ville sous le mot d’ordre « Contre la fraude constituante ».

Le recours à la rue tourne à l’insurrection depuis le 1er avril. De violents affrontements éclatent fréquemment entre les forces de l’ordre et les manifestants. Lancés de pierre, grenades de gaz lacrymogène ou cocktails Molotov se répondent d’un camp à l’autre, dans des défilés émaillés de heurts et de pillages. En un mois, 29 personnes ont trouvé la mort dans ces affrontements et plusieurs centaines ont été blessées. Reste à savoir si les manifestants obtiendront gain de cause, soit la destitution de M. Maduro et la mise en place d’élections anticipées.

Emilie Salabelle