Le prix Nobel d’économie, ce Nobel qui n’en est pas un

Seul prix Nobel a ne pas avoir été créé par Alfred Nobel, le prix d’économie fait figure de vilain petit canard de la Fondation Nobel. Retour sur les critiques qui lui sont adressées.

 

La danse annuelle d’attribution des prix Nobel s’achève ce lundi avec le prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel. Surnommé « prix Nobel d’économie », il s’agit du seul prix du lot à ne pas avoir été créé par Alfred Nobel lui-même.

C’est en 1968, soit 72 ans après la mort de l’inventeur de la dynamite, que la Banque de Suède a donné naissance à un prix d’économie à l’occasion de son 300e anniversaire. Ce prix, censé récompenser les « contributions exceptionnelles dans le domaine des sciences économiques », est le seul à être géré par la Fondation Nobel alors qu’il a été créé par une banque. Il suit néanmoins les mêmes règles que les autres prix : comme eux, il est remis le 10 décembre par le roi de Suède, reconnu par l’Académie royale des sciences de Suède et accompagné d’un prix d’environ 900 000 euros.

Le processus de désignation des candidats est identique à celui des autres prix Nobel. Des personnalités qualifiées, notamment des professeurs et chercheurs venant d’Islande, du Danemark, de Norvège, de Suède et de Finlande, envoient des recommandations. Celles-ci sont examinées par un comité d’experts de cinq à huit membres. L’Académie royale des sciences de Suède procède finalement à un vote à la majorité sur les candidats ainsi nominés. Les lauréats sont annoncés le jour même.

Un Nobel contesté

Contrairement à ses équivalents en chimie, physique, médecine et littérature, le prix Nobel d’économie est très souvent remis en question. Ses détracteurs affirment qu’il n’a pas de raison d’exister car il n’est pas mentionné dans le testament d’Alfred Nobel, le document fondateur de la tradition des Nobel. Peter Nobel lui-même, l’arrière-petit-neveu du chimiste, grossit les rangs des détracteurs du prix pour défendre l’héritage de son grand-oncle.

Mais les critiques ne se limitent pas à cela. L’économie, discipline profondément politique, ne peut pas être abordée objectivement, selon certains. Près d’un tiers des lauréats à ce jour sont revenus à une seule institution : l’Université de Chicago. L’école de Chicago, issue de l’université éponyme, défend une vision très néolibérale de l’économie. Les historiens de l’économie Avner Offer et Gabriel Söderberg, figures de proue des critiques du Nobel d’économie, ont pointé du doigt que les économistes critiques du libéralisme économique ne sont que très peu représentés parmi les lauréats du prix.

D'où viennent les lauréats du Nobel d'économie ? /Jean-Gabriel Fernandez
D’où viennent les lauréats du Nobel d’économie ? (Jean-Gabriel Fernandez)

 

Le prix attire également des critiques acerbes. 37 lauréats, soit 80% d’entre eux, sont américains et actifs dans les cercles proches de Washington. Les lauréats sont tous des hommes entre 51 et 90 ans, à la seule exception de l’Américaine Elinor Ostrom, primée en 2009.

Avec le prix Nobel 2017, dont l’une des favorites est la française Esther Duflo, spécialisée dans l’étude de la pauvreté, c’est peut-être l’occasion pour ce prix de prouver que les critiques qui lui sont faites ne sont pas tout à fait fondées.

 

Jean-Gabriel Fernandez

Google aide Porto Rico à rétablir Internet

Deux semaines après l’ouragan Maria, Porto Rico peine à rétablir le réseau et les communications téléphoniques. Le géant Google déploie à partir de lundi ses « ballons internet », pour permettre aux Portoricains de communiquer avec leurs proches.

 

Les Porto ricains retrouvent Internet, deux semaines après l'Ouragan Maria ©Getty Images
Les Portoricains retrouvent Internet, deux semaines après l’Ouragan Maria ©Getty Images

 

Les services de télécommunications à Porto Rico ont fortement été touchés par le passage de l’Ouragan Maria : 83% des stations mobiles sont hors service, et les habitants ne peuvent pas communiquer avec leurs familles. Google a obtenu l’autorisation de la FCC, autorité américaine de régulation des télécommunications, de déployer les ballons Loon, indique le site Mashable.

Ces ballons, gonflés à l’hélium, ont été créés pour permettre la couverture Internet dans les zones rurales. Ils sont envoyés à 20 kilomètres de la surface de la terre et ils sont grands comme un terrain de tennis. Grâce aux panneaux solaires, leur autonomie est de 100 jours. Google a déclaré qu’il est possible d’envoyer environ 160 Go de données sur une zone de la taille de la Suède : suffisant pour « envoyer et recevoir environ 30 millions de messages Whatsapp, ou 2 millions d’e-mails ».

Deux semaines après l’ouragan Maria, les 3,5 millions de Portoricains n’ont pas accès aux réseaux dont ils ont besoin pour communiquer avec leurs proches. Seulement 25% des antennes de téléphone mobile ont été remises en fonction. Sur Twitter, le gouverneur de Porto Rico Ricardo Rossello montre que les premiers « ballons internet » sont prêts à arriver sur son territoire.

 

 

Léa Broquerie

 

Sleeping Giants: le nouvel étendard des cybermilitants

 

 

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L’idée est vieille comme internet : grâce au réseau, les citoyens peuvent se rassembler et peser de tout leur poids sur la société. Mais le succès des pétitions en ligne n’étant que tout relatif, les militants du net ont trouvé un nouveau moyen d’action. Via Twitter, Les Sleeping Giants pèsent sur la réputation des annonceurs afin d‘attaquer le modèle économique de certains sites d’actualité complotistes. Et le concept s’exporte. En France, c’est le site Boulevard Voltaire qui est visé.

“Nous essayons d’arrêter les medias racistes et sexistes coupant leurs revenus publicitaires. Beaucoup d’entreprise n’ont pas conscience de ce qui se passe. Il est temps de leur dire ». Voilà ce qu’on peut lire sur la biographie du compte Twitter des Sleeping Giants (@slpng_giants), suivis par 90.000 abonnés. En 6 mois, selon les gérants anonymes de ce mouvement, ce sont près de 2200 annonceurs qui se sont retirés du site américain Breitbart News suite à leurs pressions. L’organe de presse complotiste est un soutien actif de Donald Trump et a joué un rôle dans l’élection de ce dernier. Selon les membres de Sleeping Giants, il « attise la haine. »

La référence à Trump n’est pas anodine. Car le premier tweet des Sleeping Giants date du 17 Novembre 2016, soit neuf jours après l’élection de Donald Trump. Sleeping Giants est le nom de ce choc vécu par certains Américains qui n’imaginaient pas l’élection de Trump serait possible, et n’avaient pas mesurés l’influence d’un organe comme Breitbart News. A la poursuite des annonceurs internationaux de Breibart, des comptes officiels des Sleeping Giants ont été créés au Canada, au Brésil, au Royaume-Uni, en Suède… Chacun œuvre pour la cause commune : stopper Breitbart. Mais chacun milite aussi contre des médias de son propre pays. En France, la cible désignée est Boulevard Voltaire, site d’information d’extrême droite fondé par Robert Menard et Dominique Jamet. Ces toutes jeunes divisions du compte nord-américain peinent encore à faire le plein de militants. La division française, avec plus de 2000 abonnés, fait figure de chef de file en Europe.

Les Sleeping Giants dans le monde: la France chef de file en Europe

Voir en plein écran

Selon The Drum , le départ des annonceurs a provoqué une chute de la valeur des publicités de Breitbart de 41%, ce qui représente une coupe non négligeable dans l’économie d’un média gratuit.  En effet, ce sont le nombre de vues sur les articles accompagnés d’encarts publicitaires qui permettent au média une viabilité économique. Les annonceurs, eux, ne savent où est placée leur publicité. Ils paient des espaces à une régie publicitaire dont le rôle est de distribuer les annonces sur tous les sites leur mettant à disposition des espaces dédiés.

Et il est tout à fait possible pour un annonceur d’exprimer son refus d’apparaître sur un certain nombre de sites pour ne pas y associer leur image. C’est là le moyen d’action des Sleeping Giants dont les membres interpellent directement les annonceurs. Derrière l’apparente spontanéité de ce mouvement, la répétition des tweets a créé un véritable standard du genre :

  • Une image, souvent, comme preuve mais aussi pour jouer sur le contraste : Publicité féministes à côté d’un article sexiste, publicité pour un matelas aux vertus écologiques à côté d’un article climatosceptique…
  • Une question, quelquefois : « savaient-vous que vous financez la haine ? »
  • Une menace, plus rarement. Un chantage à l’image, sur le « soutien » et donc la caution indirecte que les annonceurs apportent aux sites incriminés.

Le procédé peut s’apparenter à un chantage financier organisé auprès des médias dans le but de modifier leur ligne politique. On sait que Twitter est une caisse de résonance en matière d’image, et une campagne négative contre leur marque effraie la plupart des entreprises. Les internautes l’ont bien compris, et jouent désormais sur ce levier. Auront-ils la peau de Breitbart ? Peut-être, à l’usure, mais le site Américain compte sur sa boutique en ligne et un vivier toujours important d’annonceurs comme Amazon qui n’ont pas encore l’intention de retirer leurs annonces.

Gaël Flaugère

Les législatives au Royaume-Uni: un avenir incertain pour Theresa May

Moins d’un an après son arrivée au pouvoir, la première ministre britannique Theresa May joue son avenir politique à l’occasion de législatives anticipées qui sont organisées jeudi.

Après une campagne dominée par les thèmes du Brexit, de l’immigration, de la santé, de la protection sociale et de la sécurité, les bureaux de vote ont ouvert mercredi à 07h00, heure locale, dans tout le Royaume-Uni. Les britanniques votent, ce 8 juin, pour choisir leurs représentants de la Chambre des communes. Le scrutin est uninominal à un tour : le candidat élu est celui qui gagne dans sa circonscription. 650 députés seront élus parmi 3 303 candidats pour un mandat de cinq ans. Le Premier ministre sera issu de la majorité.
Le nouveau Parlement siégera pour la première fois le 13 juin, six jours avant le début des négociations sur la sortie de l’Union européenne (Brexit) entre Bruxelles et le Royaume-Uni.

Des élections pour faciliter la sortie de l’UE

Theresa May, la Première ministre conservatrice qui a remplacé David Cameron il y a moins d’un an, a convoqué ces élections anticipées afin d’asseoir sa légitimité. Pour mener à bien les négociations sur le Brexit qui devront passer par le Parlement, Theresa May, disposant aujourd’hui d’une majorité fragile de 330 députés sur 650, espérait se renforcer.

Au début de cette courte campagne, les sondages lui accordaient une victoire écrasante. Mais les dernières estimations sont beaucoup moins optimistes pour la cheffe du gouvernement. Le Labour Party (travaillistes) qui, au départ, avait vingt points d’écart avec les Tories (conservateurs), n’est aujourd’hui que quelque points derrière. La dernière enquête de YouGov réalisée entre le 5 et le 7 juin prévoit une victoire des Tories avec un avantage de sept points.

Différents scénarios envisageables pour Theresa May

Lors de ces élections, c’est l’avenir politique même de Theresa May qui se joue. Pour elle, le succès absolu serait de voir gagner plus de 330 députés conservateurs. Sa majorité serait solide et elle lui permettrait de mener les négociations de la sortie de l’Union européenne comme elle le souhaite, c’est-à-dire un Brexit sans concession, voulant mettre fin à la libre circulation des personnes des pays de l’UE.

Si elle obtient entre 326 et 330 députés, sa situation politique ne changera pas significativement. Disposant aujourd’hui de 330 députés elle serait toujours à la tête du premier parti du pays, mais sa majorité resterait fragile.

Dans le cas de figure où moins de 326 conservateurs sont élus, Theresa May pourrait envisager une démission.La tradition britannique veut que les leaders se retirent quand leur parti perd les élections. Par ailleurs, le chef du parti travailliste britannique Jeremy Corbyn a demandé à Theresa May de démissionner. Deux jours après les nouveaux attentats à Londres, l’opposition a reproché à la Première ministre d’avoir fait des coupes d’effectifs parmi les forces de l’ordre quand elle était secrétaire d’Etat à l’Intérieur.

« Vous ne pouvez pas protéger les communautés à moindre prix et en ignorant l’opinion de la police. Ils vous avertissent depuis 2011. »

Mais le pire scénario pour Theresa May serait d’avoir moins de députés conservateurs que travaillistes. Sa démission s’impose, dans ce cas de figure, comme une évidence. Si le parti de Jeremy Corbyn arrive en tête, les négociations de Brexit avec l’UE pourraient avoir toute une autre allure. Opposé à la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, le leader travailliste dit accepter le verdict du peuple. Son parti souhaite éviter un bras de fer avec Bruxelles et garder les liens les plus étroits possibles avec l’Europe.

Les bureaux de vote ferment à 22h. Pour connaître les résultats officiels de ce scrutin crucial pour le Royaume-Uni mais aussi pour sa Première ministre, il faudra attendre jusqu’à jeudi matin.

Malgo Nieziolek