Des centaines de milliers d’élèves et d’enseignants font grève ce mardi 1er juin contre la réouverture des écoles en Birmanie, pour protester contre la répression sanglante de la junte, au pouvoir depuis le putsch militaire du 1er février.
« Pas un seul de mes amis ne va en cours », relève à l’AFP un jeune Birman inscrit en anglais à Mawlamyine, ville du sud du pays théâtre d’une répression brutale des forces de sécurité en février. Comme lui, des centaines de milliers d’élèves et d’enseignants birmans ont boycotté ce mardi 1er juin la réouverture des écoles, défiant la junte.
Shwe Nadi a en effet refusé d’aller « enseigner de la propagande aux élèves ». L’institutrice a rejoint la vaste campagne de désobéissance civile contre le nouveau régime militaire, qui a pris le pouvoir par la force, mettant fin à dix ans d’expérience démocratique.
Comme elle, quelque 150 000 professeurs, soit près d’un tiers des effectifs, ont été suspendus par la junte. Certains ont été inculpés en vertu d’une loi qui interdit d’encourager la mutinerie.
Alors qu’une fronde anti-masque s’organise dans plusieurs écoles primaires, le gouvernement considère le phénomène comme « anécdotique ». Pourtant, l’adaptation paraît difficile pour les élèves comme pour leurs parents. En revanche, pour les professeurs, le port du masque est nécessaire.
Depuis la rentrée scolaire du 2 novembre, les élèves de 6 ans et plus doivent porter un masque à l’école. La mise en place de cette règle a provoqué la colère d’une partie des parents d’élèves. Plusieurs pétitions demandant l’abrogation du port du masque ont été largement relayées, l’une d’elle avait atteint 194 000 signatures le 12 novembre. “Une contestation minoritaire” selon le ministère de l’Education nationale contacté par Franceinfo. Pourtant, les pages Facebook appelant à la grève et les pétitions qui circulent laissent à penser que le sujet est loin d’être anecdotique. Les parents d’élèves insistent notamment sur la faible infection des enfants au Covid-19 et leur rôle réduit dans la transmission du virus, attestés par plusieurs études scientifiques.
Le refus du port du masque est « un problème vraiment très minoritaire au niveau national, mais très localisé aux endroits où des collectifs de parents assez virulents et procéduriers se forment« , estime Guislaine David, déléguée générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire. Ces mouvements « mettent en difficulté les enseignants et les directeurs et directrices« , déplore-t-elle auprès de Franceinfo.
“Le masque c’est pesant parce que ça crée des tensions entre les parents, les enseignants, les élèves”
En effet, pour Laurence Hoarau, directrice et professeure à l’école des Cahouettes (Neuilly Plaisance, 93) le port du masque est compliqué à faire appliquer compte-tenu de la réticence de certains parents d’élèves. “Le masque c’est pesant parce que ça crée des tensions entre les parents, les enseignants, les élèves” assure-t-elle à CelsaLab. Une pression supplémentaire qui vient s’ajouter à la longue liste des recommandations sanitaires pour les directeur.rice d’école. “On a mis le protocole en place mais on fait comme on peut. C’est sûr que ça demande beaucoup de travail pour vérifier si les adultes comme les enfants portent bien le masque tout au long de la journée” indique la directrice.
Bien que les élèves s’adaptent petit à petit, le port du masque est parfois difficile à faire appliquer. “Ils ont vraiment intégré les gestes barrières mais le plus dur c’est le masque” remarque Héloïse Fervet professeure en CM2 à l’école de la Gravière (St-Foy-lès-Lyon, 69). Après le lavage des mains, les distances à respecter, le matériel à individualiser, le masque est l’énième règle à laquelle les élèves doivent se plier. Des gestes barrières qu’ils intègrent au fur et à mesure. “Les enfants comprennent ce qu’il se passe. Alors même si pour eux c’est difficile de garder le masque, ils font attention parce que quand ils l’enlèvent, ils savent très bien ce qu’ils font” insiste la professeure auprès de CelsaLab.
Bien que compliqué, l’adaptation est nécessaire selon les professeurs
Avant l’application de cette règle, le port du masque était obligatoire seulement pour les professeurs. Les distances entre les élèves devaient donc être dûment respectées pour éviter tout risque de contamination. Une distance qui peut biaiser l’apprentissage, poursuit la professeure. “Avant qu’ils ne portent le masque, on demandait aux élèves de rester loin du bureau quand ils étaient au tableau, on se mettait à un mètre de leur cahier pour expliquer quelque chose et les travaux de groupes n’étaient pas faisables. Ce n’était vraiment pas idéal.” Le port du masque permet donc de retrouver des rapports « normaux » avec les élèves puisqu’il simplifie nettement le respect des gestes barrières.
“Le premier confinement a été difficile pour les élèves donc cette fois il fallait qu’ils puissent rester à l’école. Les gestes barrières, dont le port du masque, sont donc nécessaires » martelle Héloïse Fervet à CelsaLab. Dans un communique, le SNUipp-FSU, syndicat majoritaire des enseignants du premier degré, a estimé que bien qu’important, “le port du masque ne peut remplacer la distanciation et le non-brassage, il ne peut que simplement s’y ajouter”.
L’épidémie du Coronavirus a bouleversé le calendrier des concours nationaux. Entre modifications des épreuves, report des examens et annulations en cascade, les candidats aux grandes écoles vivent tant bien que mal une situation inédite.
La date du concours d’entrée à Polytechnique, Augustin la connaît depuis près de deux ans. Voilà 21 mois que cet étudiant en prépa d’un prestigieux lycée dans le 6ème arrondissement parisien travaille d’arrache-pied avec un objectif : être prêt pour le 20 avril 2020. Pourtant, le 15 mars dernier, tout bascule pour lui. Le ministère de l’Enseignement supérieur décrète le « report des examens nationaux et des concours » en raison de l’épidémie du Covid-19. « C’est comme si on disait à un sprinter qui est dans les starting-blocks que la course est annulée », analyse l’étudiant. Reporter le concours signifie reporter des mois d’efforts. Comme lui, ce sont près de 20 000 candidats aux écoles d’ingénieurs, réglés comme des horloges, qui découvrent un nouveau sentiment : l’incertitude. « Le concours était censé être la délivrance.Se dire que l’on doit patienter deux mois supplémentaires cela fait monter la pression ». Un comble pour le microcosme des grandes écoles où la pression est, dès mars, à son paroxysme.
Pour certains candidats, le constat est encore plus amer. Le Covid-19 a eu raison de certaines épreuves, notamment pour les écoles qui n’avaient pas eu le temps de faire passer leurs écrits avant le confinement. Les Instituts d’études politiques de province, dits « Science Po », les écoles de commerce ou encore certaines écoles de journalisme ont dû annuler leurs concours d’entrée. Ils ont été remplacés en urgence par une sélection sur dossier. « Ce n’est pas facile de se défendre avec un dossier lorsque tu t’es préparé pour des écrits », commente Elizabeth Balas, responsable pédagogique à l’Institut Céres de Lyon, une préparation privée pour les concours. A l’École normale supérieure (ENS) de Rennes, c’est l’oral de culture générale qui a été supprimé. « Ce qui est dommage c’est que mes étudiants ont développé des capacités qui leur permettent de faire la différence, ajoute Nicolas Duprey, professeur d’une prépa « ENS Rennes » au lycée Jean-Mermoz de Montpellier. Certains se disaient « on sauve les meubles à l’écrit car à l’oral on se sent mieux ». Il faut changer la stratégie. ». Et Adrien le sait bien. A 22 ans, il avait fait le choix de passer son printemps dans des salles d’examen bondées en s’inscrivant à sept écoles de journalisme. Depuis septembre, il se réveille tous les jours à sept heures pour écouter les matinales radio et lire les premières éditions des journaux. « Cette intensité ne m’a servi quasiment à rien, analyse-t-il aujourd’hui avec amertume. J’ai fait 6 dossiers en 2 mois. J’ai expliqué 6 fois de manière différente pourquoi j’étais motivé. A la fin, je peux t’assurer que tu n’es même plus motivé ».
Dans ce contexte inédit, toute la difficulté pour les étudiants réside dans le fait de garder le rythme. Avec la mise en place du confinement et l’annulation des cours en présentiel, les conditions de travail sont devenues encore plus difficiles. « On a baissé le rythme par rapport à la prépa car 12 heures de travail par jour c’est impossible à tenir à la maison », détaille Augustin. L’étudiant le reconnaît : se confiner avec trois amis à lui, tous candidats aux mêmes écoles, l’a aidé à se motiver. « Tout seul, j’aurais eu énormément de mal ».
Pour Alix Robichon, professeure d’anglais pour les classes préparatoires au lycée Carnot de Dijon, le Covid-19 a creusé les inégalités des élèves face aux concours. « Ils doivent tenir à la maison une discipline déjà compliquée à respecter à l’école, observe-t-elle. Il faut s’astreindre à un certain nombre d’heures, être rigoureux … Cela dépend énormément de l’endroit où ils sont confinés ». Elle confie par exemple entendre des enfants en bas âge pleurer lors de cours virtuel qu’elle organise via les outils numériques. « Ils ne sont pas tous égaux face à la situation. Il y en a qui n’ont même pas accès à internet. C’est dramatique », commente la professeure. « D’un coup,le rythme s’est écroulé en mars. Au début, je me suis senti un peu perdu, ajoute Adrien qui est confiné seul chez ses parents à Toulouse, bien loin de Lille, sa licence et ses amis. Avec le confinement on ne peut même plus souffler en sortant voir des amis. Il n’y a plus cet esprit de camaraderie si utile à la préparation. Là, on se retrouve vraiment tout seul chez soi ».
En temps normal, les classes préparatoires publiques sont censées corriger au maximum les inégalités entre étudiants. « Ce qui t’aide à travailler en prépa c’est l’environnement. La routine, voir les mêmes personnes, la même classe, la même école … Les élèves baignent dedans et ça les motive », affirme Alix Robichon. Mais avec l’épidémie, ce modèle d’accompagnement est mis à mal. « Depuis le 31 mars, on a interdiction de mener des khôlles [N.D.L.R. : exercice oral spécifique aux classes prépas]. On n’a plus aucun accompagnement en trinôme ou en binôme, déplore Nicolas Duprey. On ne peut plus creuser avec eux, les accompagner, vérifier leur travail correctement … C’est pourtant ce qui fait la spécificité de la prépa ».
Pour le professeur d’économie, les grands perdants du Covid-19 sont pourtant les futurs candidats: les premières années. « A cet âge-là, lorsque tu es au mois de mars, c’est très difficile d’être autonome. Tu ne te connais pas assez bien, tu ne connais pas parfaitement ton rythme de travail. Il va y avoir un vrai impact sur la promotion en cours », affirme celui qui encadre les futurs candidats à l’ENS de Rennes. En plus, « les élèves qui voulaient arrêter la prépa veulent tous rester car ils se disent que c’est, au final, gérable comme quotidien. En deuxième année on va être encore 45. Cela va poser de gros problèmes ». Et à Alix Robichon d’ajouter. « Ceux qui n’ont en plus pas accès à internet ne peuvent pas suivre ce qui s’est fait ces dernières semaines. Or, 6 semaines sur 2 ans c’est énorme. Beaucoup de chapitres et de notions passent à la trappe. Je ne vois pas comment les premières années pourront s’en sortir l’année prochaine. ».
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Un système chamboulé
C’est donc un épisode délicat qui se joue actuellement pour les concours d’entrée aux grandes écoles. Entre l’annulation de certaines épreuves, le report d’autres et les inégalités qu’accentuent le confinement, les futures promotions risquent d’être fortement affectées. Avec l’épidémie, c’est le système méritocratique français incarné par la figure de l’examen qui vacille. Une croyance fortement répandue chez les élèves si l’on en croit les pétitions qui se multiplient sur internet. Plus de 6 500 signatures pour le maintien des oraux en école de commerce, 2800 pour demander la tenue des épreuves de Science Po au nom de l’égalité des chances … Les élèves admis dans les grandes écoles en 2020 s’inquiètent déjà pour la valeur de leur futur diplôme. « L’avenir nous le dira mais comme les oraux sont d’ordinaire assez impersonnels en science il n’y aura probablement pas de dévaluation du diplôme », affirme pour autant Alix Robichon. Par contre, des surprises peuvent être attendues cette année. « On se dit naïvement que cela peut être le moyen que les cartes soient rabattues. Les boîtes à concours qui font du bachotage n’ont plus l’avantage concurrentiel car il y a plus de temps pour tout le monde. Potentiellement, il peut y avoir des surprises. Mais il peut aussi y en avoir des mauvaises … », tempère de son côté Nicolas Duprey. Pour Augustin, en tout cas, l’école qu’il vise a décidé de maintenir coûte que coûte ses épreuves, oraux compris. Et cela rassure l’étudiant. Au moins, « On ne pourra pas dire que Polytechnique aura été bradé ».
Mardi 28 avril à 15h, le Premier ministre Edouard Philippe a présenté devant l’Assemblée nationale son plan de déconfinement. L’éducation fait partie des axes majeurs de ce plan, et plus précisément la réouverture des écoles. Celle-ci sera sur la base du volontariat, progressive, adaptée localement et dans le respect de mesures strictes.
Lors de son allocution devant l’Assemblée nationale mardi 28 avril, Edouard Philippe a annoncé une adaptation locale du plan de déconfinement, mis en place pour lutter contre l’épidémie de coronavirus, avec des spécifications par département. Néanmoins, sur tout le territoire, les maternelles et les écoles primaires seront les premiers établissements scolaires à rouvrir leurs portes à partir du 11 mai. Les collèges rouvriront la semaine suivante (à partir du 18 mai), mais seulement dans les département à faible risque de propagation, et en commençant par les classes de 6ème et de 5ème. Les lycéens, quant à eux, restent dans l’incertitude: « Nous déciderons fin mai si nous pourrons rouvrir les lycées début juin » a annoncé le Premier ministre.
Priorité est faite aux plus jeunes donc, une décision qui soulage certains parents d’élèves, comme l’estime Caroline Leman. Cette mère de trois enfants entre 3 et 9 ans les renverra sur les bancs de l’école « sans hésitation« . En cause, les limites de l’école à la maison :
« Cela ne peut être que provisoire. Les enfants ont besoin de la figure de la maîtresse pour apprendre, de leurs copains pour s’émanciper. Et puis, à Paris, on n’a pas de cour de récréation dans chaque logement.«
Vie scolaire et gestes barrières
Pourtant, selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting pour Le Figaro et France Info, Caroline Leman fait partie des rares Français favorables au retour de leurs enfants à l’école (un tiers seulement). En effet, bien que les enfants présentent peu de risques d’aggravation de la maladie, certains redoutent des contaminations en tant que porteurs asymptomatiques. L’annonce de la réouverture des écoles s’est donc accompagnée d’inquiétudes, comme celle qu’exprime le docteur Hamon à l’AFP: « Les enfants risquent de ramener le virus à la maison« .
Pour pallier ces risques de contamination à l’école, le gouvernement prévoit des mesures restrictives : pas plus de 15 élèves par classe, port de masque obligatoire pour le personnel scolaire ainsi que pour les élèves à partir du collège et distribution de gel hydroalcoolique. Des mesures qui ne convainquent pas Kadiatou Camara, mère de quatre enfants.
« Je comprends tout à fait que les enfants en bas âge ne portent pas de masque, mais cela ne me rassure pas«
Trois de ses quatre enfants sont trop jeunes pour être soumis aux règles barrière. Un risque auquel cette « mère de famille nombreuse » ne souhaite pas exposer ses proches: « Le 11 mai, la première chose que je veux faire c’est emmener mes enfants voir leurs grands-parents. Sauf que mon père est diabétique, donc si mon fils s’approche de lui, qu’il s’est fait contaminer à l’école mais qu’on ne le sait pas parce qu’il est asymptomatique, cela pose problème. Je préfère garder mes enfants avec moi à la maison« .
Pour Caroline Leman, au contraire, ces mesures sont déjà « trop restrictives« . « On ne peut pas imposer à des enfants en bas âge de porter des masques, ce serait leur créer des peurs et des appréhensions » explique la mère de famille. « Et puis la distanciation d’un mètre, en toute logique, si les enfants restent des enfants, ils ne vont pas la respecter« , ajoute-t-elle.
Même dans les collèges et les lycées, où le port de masque serait obligatoire, l’heure est aux inquiétudes. Isabelle Mézaltarim est professeur d’éco-gestion en lycée professionnel à Metz :
« J‘ai peur de retourner enseigner. Après trois mois de confinement, je vois mal mes élèves de 16 ans ne pas s’embrasser, ne pas se toucher. Ni même porter un masque toute la journée. Il vaut mieux que tout le monde reste chez soi«
Le retour en classe s’annonce donc lent, progressif et surtout soumis aux aléas de la propagation du virus une fois le déconfinement entamé. Malgré les mesures strictes prévues par le gouvernement, le facteur de contamination dans les écoles inquiète. En témoigne notamment les 64% de Français qui, s’appuyant sur le critère « volontaire » de cette première mesure de déconfinement, feront le choix de ne pas renvoyer leurs enfants à l’école le 11 mai.