La Bourse de Tokyo a encore chuté lundi, elle poursuit sur sa lancée négative de la semaine dernière. Cette situation est due à l’arrêt des négociations commerciales entre les Etats-Unis et la Chine vendredi 10 mai. Depuis, le Nikkei des 225 valeurs vedettes a cédé 0,72% (-153,64 points) à 21.191,28 points, et l’indice élargi Topix de tous les titres du premier tableau a perdu 0,53% (-8,28 points) à 1.541,14 points. Les devises ont quant à elles moins été impactées : le dollar valait 109,72 yens, inchangé par rapport à son cours au moment de la clôture de la place tokyoïte vendredi et l’euro stagnait autour de 123,22 yens.
La France intègre le « top 5 » des pays les plus attractifs pour la première fois, selon le classement annuel du cabinet A.T. Kearney. Les Etats-Unis occupent la première place du classement des pays les plus attrayants pour la 7e année consécutive. Le reste du podium est complété par l’Allemagne et le Canada. Arrivent ensuite le Royaume-Uni qui conserve sa quatrième place malgré le Brexit, et la France à la cinquième place. D’après le cabinet de conseil, la confiance dans l’économie française aurait « fortement augmenté depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017 » et n’aurait pas été affectée par le mouvement des gilets jaunes.
La croissance économique devrait attendre 0,3% au deuxième semestre en France selon une première estimation de la Banque de France, soit un niveau similaire à celui des trois premiers mois de 2019. Cette hypothèse, publiée aujourd’hui est basée sur l’enquête mensuelle de conjoncture réalisée par la Banque de France auprès des chefs d’entreprises. Elle est en accord avec la dernière prévision de l’Insee, publiée le 19 mars.
Les vignerons bordelais ont commencé à changer leurs pratiques pour faire face au réchauffement climatique. Le vin de demain n’aura pas grand chose à voir avec celui d’aujourd’hui.
« Moi c’est certain, j’arrête le merlot ». La famille de Sylvie Milhard-Bessard produit du vin de Bordeaux depuis cinq générations. Propriétaire du château Vieux Mougnac, à quelques kilomètres de Saint-Émilion, elle a décidé d’arrêter de planter le cépage emblématique de la région. Après une année 2017 sans récolte et une année 2018 réduite à 20% de fruits vendangés, la sexagénaire a décidé de s’adapter. Pour elle, comme pour beaucoup de ses confrères, le dérèglement climatique en est responsable.
Le constat des climatologues est formel, la Terre se réchauffe. Leurs projections frappent les esprits : ils prévoient une météo andalouse, à Bordeaux. Les températures ont déjà augmenté, de 0,8°C en moyenne, depuis le XIXe siècle. Et les prévisions tablent sur une intensification du phénomène. Les experts du Giec attendent des pics de chaleur au-delà de 50°C l’été, dès 2050 dans l’est de la France.
Le principal effet de la hausse des températures s’observe avec l’avancement de tous les stades du développement de la vigne. Cette année, Jean-Marc Touzard, directeur de recherche à l’Institut national de recherche agronomique (Inra), perçoit déjà une quinzaine de jours d’avance dans la pousse des vignobles, par rapport aux années 1990. « Les hivers étant moins froids, la maturation commence plus tôt. Dans toutes les régions, on mesure une précocité accrue des dates de vendanges. Or, récolter le raisin en août présente des risques d’oxydation. »
Si l’augmentation de la température est le problème numéro un, d’autres dérèglements l’accompagnent. Le régime pluviométrique notamment. « On observe une baisse globale des précipitations dans le Sud », constate le chercheur. Docteur en agronomie, il s’est spécialisé dans l’étude de la vigne sous l’effet du réchauffement climatique. « La concentration des pluies sur l’automne et le printemps engendre des sécheresses estivales plus marquées. Il y a aussi une plus grande variabilité de la météo entre les années, et au sein même des années. De surcroît, on dénombre des évènements extrêmes plus fréquents. »
-25 % de rendement dans le sud
Les apports en eau diminuent alors que les besoins des vignes augmentent. La plante transpire davantage sous une météo chaude et sèche. Sans cette ressource, les agriculteurs observent des phénomènes de stress hydriques et de carences en eau, qui ont un impact sur la qualité du fruit. Les grains sont plus petits, les concentrations plus élevées, et les rendements baissent. Une diminution de production supérieure à 25 % a été constatée par l’Inra dans le Sud en 2017.
Plus d’alcool, moins d’acidité
Les viticulteurs subissent déjà les premières conséquences du changement climatique. « L’été dernier, on a ramassé du 14 degré d’alcool ! » Sylvie Milhard-Bessard a du mal à s’y résoudre, le taux d’alcool de ses vins augmente. Se pose un problème d’équilibre gustatif, et de respect des règlementations (l’AOC Bordeaux impose un taux d’alcool inférieur à 13,5%). « Du temps de mes parents, on atteignait toujours environ 12,5%. Mais là ça s’aggrave de plus en plus. Et encore, moi ce n’est rien, je suis en bio et on a toujours pris soin du sol. Mais j’ai des collègues, en conventionnel, qui ont ramassé du 17% ! » La raison est chimique : plus une vigne est exposée au soleil, plus un vin sera alcoolisé – du fait de l’augmentation du taux de sucre dans les raisins. Alors l’été exceptionnel de 2018, deuxième plus chaud depuis 1900, a marqué les esprits. Plus de 14% en moyenne ont été relevés en Languedoc ; il y a trente ans les compteurs affichaient plutôt 11%.
Constat inverse pour l’acidité : elle diminue avec les fortes chaleurs. « Les températures élevées dégradent les acides, dont l’acide malique. C’est un problème qui impacte les vins blancs d’Alsace notamment, pour lesquels l’acidité est une caractéristique importante », explique Jean-Marc Touzard. Même difficulté pour les Pomerols du Sud-Ouest. Sylvie Milhard-Bessard s’inquiète pour cette appellation. « Si on ne mélangeait pas les dernières récoles avec celles d’autres années, on manquerait d’acidité. Et sans acidité, il y a un problème de conservation, on ne fait plus des vins de garde ».
Les grandes chaleurs empêchent également le développement de certains arômes. Les notes de fruits rouges sont les premières à disparaître . Plus le thermomètre augmente, plus les vins tendent vers des saveurs concentrées et confiturées.
Enfin, les radiations du soleil dégradent les anthocyanes – pigments qui donnent leurs couleurs aux raisins. Il y aurait donc aussi un éclaircissement des vins rouges.
S’adapter pour subsister
La question de la survie de l’excellence vinicole française se pose. Et si le troisième secteur d’exportation national était menacé ? Loin de se résigner, les vignerons ont commencé à s’adapter.
« Cela fait plus de dix ans que nous avons planté de la Syrah [un cépage originaire des côtes du Rhône, NDLR]. Il s’adapte très bien à notre climat et garde beaucoup de fraîcheur », commente Marie Courselle, co-gérante des vignobles Courselle, en Gironde. Mais ce vin ne peut prétendre à l’appellation d’origine contrôlé (AOC) ; le Syrah ne figurant pas dans le cahier des charges, les bouteilles ne portent pas la mention « Bordeaux ». Avec les changements de cépages, la carte des vins va certainement évoluer. « Dans le Sud, les viticulteurs vont sûrement laisser tomber le cabernet sauvignon ou le merlot, prédit Jean-Marc Touzard. Ils venaient de régions plus nordiques et se montrent assez fragiles. » Une des solutions serait d’importer des cépages plus adaptés au nouveau climat ; des variétés venues de régions plus chaudes (comme l’Italie ou la Grèce), ou bien même de revenir à des espèces plus anciennes, y compris certaines qui étaient déjà cultivées en France, mais qui avaient été abandonnées. « À l’Inra nous possédons un conservatoire génétique d’environ 5 000 cépages différents, signale le chercheur. Nous pratiquons aussi des créations variétales, par croisement et hybridation – pas par OGM. On met au point des plants à maturation plus tardive, qui produisent moins de sucre, sont plus résistants aux maladies et à la sécheresse ».
Outre le changement de vigne, les agronomes recommandent aux viticulteurs d’adapter leurs pratiques. Le domaine de la famille Courselle a par exemple modifié ses techniques de taille des branchages. « Nous ne faisons plus d’effeuillage sur les cépages blancs et nous le faisons beaucoup plus tardivement pour nos merlots », explique la patronne. Ainsi, la vigne se fait de l’ombre à elle-même ; une manière de prévenir les maturités précoces.
D’autres laissent pousser des herbes entre les rangées de pieds. Le but est de former un « couvercle humide » lors des périodes sèches. Si les cultivateurs bio ont adopté la pratique depuis longtemps, les agriculteurs conventionnels sont pointés du doigt pour leur recours au glyphosate. Le désherbage est souvent réalisé afin de maximiser les ressources disponibles pour la vigne. Mais l’humidité devient un enjeu prioritaire par rapport à la concurrence végétale. Notamment parce que les substrats peuvent être enrichis. « Nous apportons beaucoup de matières organiques dans notre terre. Par exemple, nous incorporons des composts végétaux. Nous plantons aussi des crucifères dans les rangs [des plantes qui retiennent certains éléments dans le sol, dont l’azote, aliment des plantes, NDLR] », rapporte Marie Courselle.
Parmi les solutions les plus radicales : la possibilité de relocaliser des parcelles. « La gestion du vignoble dans le terroir est un élément important de l’adaptation, précise Jean-Marc Touzard. Les cultures pourraient gagner en altitude, changer d’exposition, peut-être plus au nord, ou dans des sols plus profonds pour capter davantage de réserves en eau. » Encore faut-il que la règlementation suive l’évolution des professionnels. Les cahiers des charges des AOC empêchent, pour l’instant, tout changement de cépage, de terroir ou de composition.
« On continuera de cultiver de la vigne dans tous les terroirs jusqu’en 2050 »
Les professionnels sont à un moment clé de leur évolution. Il leur faut faire des choix qui détermineront l’avenir de leurs domaines. « Il n’y a pas de remède miracle, prévient le scientifique. Certains viticulteurs misent tout sur une adaptation. Mais on voit bien que ce n’est pas comme cela qu’on réussira. L’avenir va se jouer sur des combinaisons subtiles d’ajustements ».
Malgré tout, Jean-Marc Touzard, directeur de recherche à l’Inra, tire une conclusion rassurante. Du moins pour les trente prochaines années. « On continuera de cultiver de la vigne dans tous les terroirs jusqu’en 2050. » Et après ? « 2050 est un moment où il y a une grande divergence dans l’évolution du climat selon nos émissions. Si on continue à accroître les rejets de gaz à effet de serre, comme c’est le cas depuis trois ans, y compris en France, on se positionne sur une augmentation très forte de la température. »
Avec des émissions de CO2 incontrôlées, l’agronome est moins optimiste. « Sans changement dans les toutes prochaines années, on s’engagerait dans une aventure climatique folle, dans laquelle il deviendrait quasiment impossible de faire de la vigne.» Fragilité oblige, le vin perdrait son caractère artisanal pour devenir un produit purement industriel. Ce que refuse Sylvie Milhard-Bessard. « Si je dois réduire mon vignoble à 2 hectares pour avoir le temps de m’en occuper, je le ferai. Hors de question de rogner sur la qualité ».