Twenty One Pilots attaque Temu en justice : l’épineuse question des droits de propriété intellectuelle sur les plateformes de e-commerce

À la veille de la sortie de leur nouvel album, le groupe américain Twenty One Pilots porte plainte contre Temu, l’accusant de vendre « des myriades d’articles qui ne sont que contrefaçons et copies flagrantes » de leur merchandising. Une problématique connue sur les plateformes de e-commerce, malgré les réglementations mises en place.

C’est un évènement commercial majeur pour un groupe :  l’album du duo américain Twenty One pilots sort ce jeudi 12 septembre, une occasion de vendre les multiples produits à son effigie disponible sur le site officiel. Le merchandising musical étant onéreux, il faut débourser aux alentours des 40€ pour obtenir un T-shirt. Or, des articles similaires bien moins coûteux sont disponibles par centaines sur  le site de e-commerce chinois Temu — un problème pour le groupe, qui perd ainsi de potentiels clients — sans accord préalable de la part du duo.

Les représentants de Twenty One Pilots ont ainsi porté plainte contre le site pour contrefaçon de marque, concurrence déloyale et fraude par ressemblance, soulignant que « des myriades d’articles qui ne sont que contrefaçons et copies flagrantes » y sont en vente. Plus de 12 pages de photos d’articles contrefaits du groupe ont été relevées.

 » Temu respecte les droits de propriété intellectuelle des tiers et traite avec le plus grand sérieux toute réclamation relative à la contrefaçon. Dans le même esprit, nous défendrons fermement nos intérêts face à toute allégation infondée », déclare la plateforme, contactée.

« Twenty three Pilots »

En naviguant sur Temu, la recherche « Twenty One Pilots » ne présente plus aucun résultats. En revanche, en tapant « Twenty three Pilots », l’utilisateur voit s’afficher des centaines de produits reprenant le logo du groupe et les visuels de ses albums, dont « Breach », à paraître le 12 septembre : les T-shirts présentés coûtent aux alentours de 15€, contre environ 40€ sur le site officiel. Ce changement de mots clés semble être voué à camoufler ces produits.

De plus, en consultant les différentes annonces, on constate que les comptes les hébergeant vendent également de nombreux produits à l’effigie d’autres groupes de musique (a-ha, System of a Down, The Cure…), cette pratique s’avérant faire système.

Les plateformes de e-commerce devant la justice

« L’atteinte aux droits de propriétés intellectuelle sur les plateformes de e-commerce est récurrent », confirme Vincent Rodriguez, avocat en droit de la propriété intellectuelle. « Cette catégorie regroupe plusieurs  types de contrefaçons : dans le cas de Twenty One Pilots, il s’agit de contrefaçon de marque, le nom du groupe en étant une déposée aux Etats-Unis. L’atteinte globale aux droits de marque peut concerner ses propriétés, brevets, dessins et modèles ».
Quant aux obligations des plateformes sur ces risques de fraude, elles ont « évolué depuis le DSA (Digital Service Act) », entré en vigueur en 2022.

Leur nature dépend essentiellement de la qualification de la plateforme, pouvant être « hébergeur » et donc « mettre à disposition une plateforme aux internautes sans rien publier », ou « éditeur », « qui participe de manière active à ce qui est publié ». Dans ce dernier cas, elle a davantage de responsabilité et doit s’assurer de l’absence de contrefaçon avant même que l’annonce soit mise en ligne. De leur côté, les hébergeurs doivent « mettre à la disposition des internautes un moyen de signaler les produits contrefaisants, et afficher le nom des vendeurs professionnels ».
« Avant le DSA, Temu était considéré comme hébergeur », affirme l’avocat. Mais ce statut « peut changer selon les décisions juridiques », telle que celle qui pourrait être rendue à l’issue de cette plainte.

Des artistes au cœur de batailles juridiques

Pour leur part, les titulaires de droits peuvent « rencontrer de nombreuses difficultés » pour prendre connaissance de contrefaçons ayant été créées sur la base de leur travail, à cause du « flux continu d’annonces » et de leur « mise en place automatisée ». Pour contrer ce problème, ils peuvent « mettre en place des surveillances à partir d’une banque d’image, qui détecte les annonces contenant des visuels identiques ou proches grâce à l’intelligence artificielle ».

Pour contrer les contrefaçons, les artistes et créateurs doivent  bien souvent mettre en place leurs propres mesures ou naviguer par eux-même sur ces plateformes. Durant l’été, plusieurs articles avaient constaté grâce à leurs propres recherches que des contrefaçons de leur travail était en vente en naviguant sur ces plateformes, ou par le biais de publicités.

C’est le cas de l’illustratrice britannique Micaela Alcaino, ayant révélé le 4 août dernier aux 19 000 abonnés de son compte Instagram que ses images avaient été imprimées sur « des couvertures, des serviettes, des tapis, et même des rideaux de douche ». « J’exhorte donc tous mes collègues designers, illustrateurs et éditeurs à regarder si Temu vend votre œuvre sans votre consentement et à essayer de vous battre pour la faire enlever », avait-elle poursuivi.

 

Margot Mac Elhone

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *