Jusqu’ici, vous trouviez peut-être le dénouement de la série un peu bâclé. Huit saisons de « Winter is coming » pour que le roi de la Nuit se fasse tuer par Arya Stark, sortie de nulle part. Les scénaristes nous avaient fait un peu peur en prenant des raccourcis. Pourtant, l’épisode 5 de la dernière saison est une piqûre de rappel : ne jamais oublier que les hommes sont une plus grande menace que la mort elle-même.
L’épisode 5 de la dernière saison de Game of Thrones aura divisé les spectateurs. Trop bâclé, trop d’incohérences, trop de facilités… Bref, rien de bien convaincant.
Personnellement au Celsalab, nous avons adoré cet épisode, parce qu’il se recentre sur l’intrigue de base de la série : la conquête du trône de fer, qui entraîne trahisons, violences, morts inattendues et folie. Dans cet épisode, la cruauté de l’Homme est à son paroxysme, et pas forcément là où on l’attendait. Cersei, pour la première fois depuis plusieurs saisons, devient très humaine, presque fragile. Et Daenerys récupère quant à elle le rôle du tyran assumé, prête à sacrifier des innocents pour sa cause. Certes, tout est accéléré, mais de manière plutôt cohérente avec le début de la série. Il faut bien que les différents arcs narratifs se terminent, même si nous n’aurions pas été contre quelques épisodes de plus pour temporiser le tout.
La folie de Daenerys
Après plusieurs tragédies, notamment la découverte de la légitimité de Jon Snow à monter sur le trône, Daenerys se retrouve isolée et bascule dans la folie, emportant avec elle des milliers d’innocents. Même si la Khaleesi a toujours souhaité s’affranchir du passé de son père, le Mad King, elle a malgré tout toujours été exposée à la violence, et ce depuis le début de la série. Lors de sa conquête d’Essos (Astapor, Yunkai, Mereen), elle n’a jamais hésité à sacrifier des innocents et à brûler vifs ceux qui se mettaient en travers de son chemin (les Khal dans la saison 6, la maison Tarly dans la saison 7). Son basculement dans la folie la plus totale est donc totalement justifié. Car si ses conseillers avaient jusque-là réussir à contenir sa colère et sa soif de pouvoir, le décès de Jorah dans la bataille de Winterfell et le meurtre de Missandei auront été les déclencheurs ultimes. D’autant plus que cette dernière avait donné l’approbation à sa Khaleesi de passer à l’offensive, juste avant son exécution, avec son dernier mot, « Dracarys » (« feu-dragon » en haut-valyrien). Au final, toute cette saison a été construite pour que Daenerys sombre dans la folie destructrice. Étonnant pour celle qui ne voulait pas devenir la « reine des cendres » (« Queen of the Ashes »).
Dans l’horreur, Tyrion et Jon sont au fond les derniers chantres de l’humanité. La Main tente de raisonner sa Mad Queen et la supplie de ne pas brûler la ville si elle se rend. Sans succès. Dans la pluie de feu et de cendres, Jon tente d’arrêter les soldats, qui s’adonnent au massacre. Même Ver Gris, récemment privé de sa Missandei, est devenu hors de contrôle. L’aberration de Daenerys marque définitivement le divorce avec Jon. Les pronostics sont ouverts : qui aura la tête de la reine ? Jon lui-même, ou bien Arya ?
Une scène finale dantesque et biblique
Cinématographiquement, cet épisode est sans aucun doute le meilleur de la série. Les plans de guerre au cœur de la ville sont dignes de tableaux moyenâgeux, où feu, terreur et sang ne font plus qu’un. Il y a une vraie allure de fin de monde.
Dans cet épisode, la cadette des Stark connaît une descente aux Enfers au cœur du chaos. A la fin de l’épisode, Port-Réal n’est plus qu’un tas de cendres et de corps calcinés. Arya, qui a survécu aux multiples attaques à l’aveugle de Daenerys, découvre les rues de l’ancienne ville, assistant à l’apocalypse. Elle se retrouve face à un cheval blanc, là, sorti de nulle part, qui va devenir sa monture pour échapper à l’horreur. On peut voir dans cette scène une référence à l’Apocalypse, un texte biblique dans lequel Saint-Jean raconte la chute de Babylone. Dans ce récit apparaissent les Cavaliers de l’Apocalypse, leur chevauchée inaugurant la fin du monde. Le quatrième cavalier, sur son cheval pâle, représente la Mort.
Bon, c’est peut-être un peu tiré par les cheveux, mais on apprécie particulièrement ce rapprochement théorique, qui nous fait voyager dans l’Histoire et l’imaginaire.
« Et je vis paraître un cheval de couleur pâle. Celui qui le montait se nommait la Mort, et l’Enfer le suivait »
(l’Apocalypse de Saint Jean)#GameofThrones #GOT8x05 pic.twitter.com/s055bRd9ND
— ᗪr ᗪjey (@MrDjey) May 13, 2019
La fin de Jaime Lannister
Dans cet épisode, c’est finalement un retour à la normalité façon Game Of Thrones : des personnages emblématiques meurent, nous laissant le cœur brisé avec parfois un goût d’inachevé. C’est le cas de Jaime. Après une parenthèse romantique et torride avec Brienne, le Régicide est finalement retourné à son premier et véritable amour : Cersei. En le voyant partir pour Port-Réal, on s’attendait à le voir assassiner son amante, dans une scène épique digne d’une tragédie grecque. Mais non, il meurt finalement dans les bras de Cersei, alors que s’écroule tout ce qu’ils s’efforçaient de construire depuis des années : leur légitimité au trône et leur famille.
Beaucoup ont été déçus du revirement de Jaime. Pourtant, c’est l’un des personnages les plus entiers de la série, car il reste fidèle jusqu’au bout à ses sentiments. Qualité que son frère, Tyrion, lui reconnaît. Et même si ce dernier ne porte pas particulièrement Cersei dans son cœur, il accepte le choix de Jaime de la rejoindre et lui propose même de s’échapper avec elle. Ce dernier moment de fraternité était particulièrement émouvant et témoigne une nouvelle fois de l’amour timide que se portent les frères Lannister.
Antonella Francini et Alice Ancelin