Brésil : Michel Temer, président depuis une semaine et déjà impopulaire


La grogne monte contre Michel Temer, nouveau président par intérim du Brésil, qui en une semaine a réussi à se mettre à dos une partie de la population Brésilienne. En cause : les conditions obscures de son arrivée au pouvoir ainsi que le plan d’austérité qu’il compte mettre en place.


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Le 12 mai dernier, Dilma Rousseff, présidente du Brésil était destituée provisoirement par un vote de la chambre des députés. Accusée d’avoir maquillé les comptes publics pour dissimuler le déficit du pays, la dirigeante du PT, le parti des travailleurs créé par l’ancien président Luis Inàcio « Lula » Da Silva, est remplacée le temps de l’enquête par son ancien vice-président Michel Temer. Depuis sa prise de pouvoir considérée par certains comme un « coup d’état », l’homme politique centriste a opéré un virage conservateur par rapport à la gouvernance de Dilma Rousseff.

Le plan d’austérité de Michel Temer révolte les étudiants et les artistes

Deux jours après son arrivée à la présidence, Michel Temer décide de supprimer le ministère de la culture. « Toute la classe artistique était révoltée » déclare João Pedro, étudiant en master de cinéma à Sao-Paulo. « C’est ce qui a lancé les manifestations. Tous les grands lieux culturels de la ville étaient occupés par la population ». Sous la pression de la rue, Michel Temer est revenu sur sa décision il y a deux jours. Le ministère de la Culture sera donc maintenu.

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Manifestation contre Michel Temer à Sao Paulo @AliceYanni
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Les femmes contre le coup d’état – Sao Paulo @AliceYanni

Mais la mobilisation ne cesse pas pour autant. En effet, d’autres réformes d’austérité sont toujours envisagées, à contrepied de la politique sociale de Dilma Rousseff. Le but : économiser 64.9 milliards de réais (17.03 milliards de dollars) selon le ministre de la planification Nelson Barbosa. «Le budget de l’éducation va diminuer drastiquement, ainsi que celui de la santé » explique João Pedro. « Le gouvernement veut fermer toutes les écoles qui se trouvent en périphérie de la ville » s’insurge Alice, étudiante française en sciences-politiques à Sao Paulo. « C’est un drame pour les gens pauvres qui devront faire des heures de trajet pour avoir accès à l’éducation », ajoute-t-elle. Du coup, certains collégiens occupent leurs établissements et de nombreuses facs sont bloquées. Tous les jours, des manifestations rassemblent des milliers de personnes dans les rues.  « Les droits sociaux conquis par le PT sont piétinés, se révolte João Pedro. Michel Temer veut effectuer un retour en arrière de vingt ans sur les avancées sociales du pays »

La destitution de Dilma Rousseff est considérée par certains comme anti-démocratique

A Sao Paulo, l’argument social ne convainc pas tout le monde. « C’est l’une des villes les plus développées du Brésil, remarque João Pedro. La classe moyenne y est très importante, ces gens-là se fichent pas mal des aides sociales. » Pourtant, ce n’est pas parce qu’ils n’approuvent pas la politique de l’ex-présidente que les paulistanos soutiennent Michel Temer. « Beaucoup de ceux qui participent aux manifestations pro-Dilma sont simplement insatisfaits d’une destitution qu’ils considèrent comme anti-démocratique. » explique-t-il.

Leda Cartum, est traductrice et écrivain à Sao Paulo. Elle n’aurait jamais voté pour Dilma Rousseff, pourtant, elle la défend aujourd’hui. « Dilma n’est pas plus corrompue que les autres. Elle l’est même moins, c’est pour ça qu’elle a été renversée », estime-t-elle. Si Leda admet que Dilma Rousseff a sans-doute effectué le pédalage budgétaire dont elle est accusée pour masquer le déficit des comptes publics, elle rappelle que l’ancienne présidente n’a jamais trempé directement dans des scandales de corruption : « au contraire de Michel Temer qui a été identifié comme l’un des récipiendaires de pots de vins dans l’affaire Petrobras» L’entreprise de pétrole avait été le cœur d’un scandale d’attribution de marchés frauduleux qui avait éclaboussé une bonne partie de la classe politique Brésilienne, dont le vice-président de l’époque. Comme beaucoup d’autres brésiliens, Leda n’hésite pas à qualifier la destitution de l’ancienne présidente de « coup d’état ». « Les politiciens menacés par le plan anti-corruption lancé par Dilma Rousseff ont orchestré sa chute » accuse-t-elle. Une hypothèse corroborée par la mise à l’écart récente d’un proche de Michel Temer, Romero Juca, accusé d’avoir tenté d’étouffer l’enquête sur le scandale Petrobras.

Un futur incertain

Alice s’inquiète : « Il y a une véritable effervescence depuis la destitution de Dilma. Personne ne sait ce qu’il va se passer dans un mois. » Pour João Pedro « Il faut des élections au plus vite. On n’a pas le temps d’attendre les cent-quatre-vingt jours de procès qui décideront définitivement du sort de Dilma Rousseff. » Selon un sondage récent, seuls 1 à 2% des brésiliens voteraient pour Michel Temer s’il se présentait aux élections. C’est dans ce contexte politique chaotique que se préparent les Jeux Olympiques, qui auront lieu dans deux mois et demi au Brésil.

Claire-Marie Germain

Violences policières: l’ACAT sort un rapport éclairant

Depuis quelques semaines, la polémique a éclaté sur la question des abus de la force par les policiers. Violences policières, brutalités envers les policiers; les deux camps s’affrontent à coup de communiqués et de vidéos amateurs. Pour essayer de faire la lumière sur des faits mal répertoriés, l’Association des Chrétiens contre la torture (ACAT) a publié en mars 2016 un rapport sur les violences policières. Alors que la plupart des association de lutte contre ces violences sont composées d’anciennes victimes souvent virulentes, l’ACAT essaie d’adopter une attitude plus modérée. Mais les revendications de l’association restent nombreuses. Continuer la lecture de « Violences policières: l’ACAT sort un rapport éclairant »

Colère des scientifiques contre les coupes budgétaires dans la recherche

Une tribune signée par huit scientifiques de renom déplore un projet de coupes budgétaires pour la recherche. La communauté scientifique est en émoi.

Sept prix Nobel et une médaille Fields dénoncent dans une tribune publiée dans le Monde des coupes budgétaires dans la recherche. Présenté en commission des finances de l’Assemblée Nationale mercredi 18 mai, un projet de décret vise à supprimer une enveloppe budgétaire de 265 millions d’euros pour  la recherche et l’enseignement supérieur.

Mais ce matin encore, François Hollande invité sur France Culture, a assuré que l’action en recherche & développement restait une priorité.

Les principaux organismes de recherche sont particulièrement touchés comme le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), le Centre national pour la recherche scientifique (CNRS) l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) ou encore  l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) pour une annulation globale de 134 millions d’euros. Selon Martine Cohen-Salmon, chargée de recherche au CNRS en biologie, c’est un coup dur « une baisse de budget c’est une baisse de niveau de recrutement .»

Le budget du CNRS de plus de 3 milliards d’euros est constitué de 2,1 milliards de masse salariale. Cette annonce nourrit ainsi des inquiétudes sur l’avenir du centre de recherche: « le niveau de recrutement des jeunes chercheurs est déjà catastrophique. Seuls un ou deux postes sont créés chaque année en premier grade, explique-t-elle, or les candidats ont un niveau équivalent au poste de directeur de recherche.»


une baisse de budget c’est une baisse de niveau de recrutement


Un phénomène à l’effet boule de neige « il y a moins d’étudiants aujourd’hui en biologie car il n’y a plus de débouchés, analyse Martine Cohen-Salmon, et c’est compréhensible, pourquoi s’engager dans une voie de garage! » Une menace de décrochage de la recherche en France amplifiée par la mondialisation de la concurrence « la plupart partent en tant que post doctorant à l’étranger où ils sont embauchés.  C’est d’autant plus avantageux pour les centres de recherche étrangers qui recrutent des chercheurs déjà formés. »

L’ANR n’a financé que 8% des projets en 2015

La ministre de l’Education Najat Vallaud-Belkacem et son secrétaire d’Etat Thierry Mandon, ont assuré via un communiqué que ces suppressions de crédits visent à « mobiliser en particulier leurs fonds de roulement disponibles et leurs trésoreries. Mais pour le CNRS cet argument n’est pas valable « un projet en biologie expérimentale et une étude en Histoire n’impliquent pas les mêmes moyens. »

Depuis 2005, l’Agence nationale de la recherche (l’ANR) créé pour remplacer deux dispositifs de financement, le fonds national pour la science (FNS) et le fonds pour la recherche technologique (FRT), est l’unique fonds public qui décide les budgets. Mais en 2015, seuls 8% des projets déposés par des chercheurs français ont été acceptés par l’ANR. Le 14 mars, lors de l’inauguration de l’Institut Pierre-Gilles-de-Gennes à Paris, François Hollande avait annoncé que l’ANR accepterait davantage de projets cette année.  Reste à voir sur quels critères les enveloppes seront réparties.

Des attentes politiques en contradiction avec la recherche

Pourtant, selon un classement établi par Thomson-Reuters  en mai 2016, le CEA, le CNRS et l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) figurent parmi les dix premiers organismes de recherche en termes d’innovation dans le monde. Une dynamique dont les chercheurs craignent l’essoufflement.

« Il y a vingt ans les laboratoires étaient subventionnés par l’organisme de tutelle auquel ils étaient rattachés. Un financement complété par le privé si besoin. Aujourd’hui c’est l’inverse. » déplore Martine Cohen-Salmon.  Des restrictions budgétaires publiques qui vont de pair avec un autre problème « pour qu’un projet soit validé par l’ANR, il faut le tourner vers le développement. Or c’est totalement contradictoire avec la recherche qui ne peut pas donner de garantie, on ne sait pas ce que l’on va trouver à l’issue d’une recherche. »

Depuis sa création le budget de l’ANR est passé de 710 millions d’euros (M€) en 2005  à 535 M€ en 2014. Bien qu’il l’un des budgets les plus importants en Europe, elle est constante régression. En Allemagne les dépenses de recherche et développement ont augmenté de 75% en dix ans.

Sonia Ye

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Les droits des trans à l’international

Si en France les droits des personnes transgenres et transsexuelles restent encore l’objet de mille précautions, d’autres pays n’ont pas hésité à autoriser les personnes transgenres et transsexuelles à modifier leurs documents d’identité pour y faire figurer le genre auquel elles s’identifient. Tour d’horizon.

 

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L’Espagne est l’un des pays pionniers sur la question des droits des transgenres et transsexuels. Elle a autorisé en 2007 à toutes les personnes majeures de changer leur identité mais aux conditions que celles-ci aient subi d’abord un examen psychologique et aient une preuve médicale de leur changement de sexe. Toutefois, la loi a été assouplie puisque cette année un jeune garçon de 4 ans a réussi à changer son prénom Luken (masculin) en Lucía pour refléter l’identité féminine dans laquelle il se reconnaît depuis sa naissance.

(Lucia, une jeune fille transgenre de quatre ans, n’est plus Luken. C’est la deuxième fois que cela arrive au Pays Basque).

Peu de temps après, en 2012, l’Argentine adopte une loi plus complète encore : il est interdit d’exiger toute expertise médicale, psychiatrique, tout traitement hormonal, ou stérilisation au moment des démarches. Celles-ci sont accessibles même aux enfants.

 

En 2015 Malte suit le même chemin: l’île dispose d’une des législations les plus souples sur le sujet au monde. Les trans ont le droit de changer d’identité après un bref passage chez le notaire, sans âge minimum ni période de réflexion. Celles qui ne souhaitent pas que leur sexe soit mentionné sur leurs papiers d’identité peuvent également choisir d’y mettre un « X ». L’Irlande et la Colombie ont reconnu la même année les droits des trans, dès l’âge de 16 ans dans le premier cas. La Pologne adopte les mêmes résolutions en 2015, avec plusieurs restrictions toutefois : il faut être célibataire et bénéficier d’un certificat médical pour attester que la personne ne s’identifie pas dans le genre de naissance.

 

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Des droits toujours en suspens dans certains pays

Enfin, d’autres pays sont, comme la France, en train de débattre d’un projet de loi pour défendre les droits des trans. Ainsi, en Bolivie les transsexuels pourront bientôt modifier leurs papiers d’identité malgré une forte contestation de l’Église catholique. Cette démarche reste toutefois soumise à certaines conditions : être majeur, avoir subi un examen psychologique et posséder une preuve médicale de changement de sexe, ce qui laisse de côté les transgenres. Le Canada, à travers le premier ministre Justin Trudeau, s’est prononcé en faveur de l’adoption de lois luttant contre les discriminations contre les transgenres le plus rapidement possible.

 

Toutefois, tous ces pays restent des exceptions : au total, 79 pays considèrent l’homosexualité et la transsexualité comme illégales, voire un crime. Aussi la Russie a récemment interdit la conduite aux personnes transgenres. Preuve est faite que les droits des minorités sexuelles restent largement bafoués à l’international.

 

Myriam Mariotte

Carte : Léa Broquerie