Affaire Thomas Legrand/Patrick Cohen : L’Arcom va auditionner les présidentes de France Télévisions et Radio France après la diffusion d’une vidéo avec des dirigeants du PS

L’instance de régulation de l’audiovisuel souhaite recueillir les « explications et observations » des présidentes de France Télévisions, Delphine Ernotte-Cunci et de Radio France, Sibyle Veil.

L’Arcom décide de mener l’enquête. A la suite de la diffusion de vidéos des journalistes, Thomas Legrand et Patrick Cohen, avec des dirigeants du Parti socialiste, le régulateur de l’audiovisuel a déclaré, jeudi 11 septembre, qu’il recevrait en audition les présidentes de France Télévisions, Delphine Ernotte-Cunci, et de Radio France, Sibyle Veil, « dans les prochains jours », dans le but « de recueillir leurs explications et observations ». Quelques jours auparavant, Thomas Legrand a annoncé renoncer à son émission hebdomadaire sur France Inter. Le journaliste a néanmoins assuré continuer d’intervenir à l’antenne de cette radio du service public.

L’Arcom a été saisie à de multiples reprises par des députés et des auditeurs après la diffusion de vidéos par le média conservateur L’Incorrect, le 5 septembre. La séquence, filmée en juillet dernier, montre Thomas Legrand, chroniquer à Libération et France Inter, et Patrick Cohen, journaliste chez France Inter et dans l’émission « C à vous » sur France 5, en train d’échanger avec Pierre Jouvet, secrétaire général du PS et Luc Broussy, président du conseil national du PS.

Pendant cet échange, la stratégie de la gauche en vue de la présidentielle de 2027 est notamment évoquée. Thomas Legrand a notamment déclaré : « Nous, on fait ce qu’il faut pour Dati, Patrick et moi ». Ce propos, interprété comme un parti pris à l’encontre de la ministre de la Culture démissionnaire, Rachida Dati, a entraîné de nombreuses critiques à l’égard des deux journalistes.

Une « réflexion sur l’exigence d’indépendance » du service public

L’instance de régulation de l’audiovisuel explique avoir depuis quelques mois « décidé d’engager une réflexion plus large sur l’exigence d’indépendance et d’impartialité du secteur public de la communication audiovisuelle ».

Par ailleurs, le comité d’éthique de France Télévisions a annoncé s’emparer de l’affaire. « Compte tenu de l’ampleur de la polémique concernant la diffusion d’une conversation entre deux journalistes de l’audiovisuel public et de deux responsables du PS, le Comité d’éthique de France Télévisions a décidé de se saisir de cette affaire et publiera prochainement son avis », a-t-il communiqué mercredi.

Européennes: nouvelle polémique autour des temps de parole des candidats

Drapeaux européens. Crédits : Hans
La campagne pour les élections européennes a officiellement débuté le 13 mai. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a dû répartir 312 minutes de temps d’antenne entre les 34 listes validées. Les nouvelles mesures, prises le 25 juin 2018, cherchent à être plus éthiques mais pourraient être un véritable casse-tête pour les chaines de radio et de télévision.

Le 14 mai, plusieurs têtes de listes de «petits partis » ont dénoncé leur relégation « scandaleuse » en deuxième partie de soirée lors du double débat organisé sur France 2 le 22 mai, soit quatre jours avant le scrutin. La tête de liste du PCF, Ian Brossat a déjà annoncé saisir le CSA. « L’Emission politique » a prévu d’inviter en première partie de soirée six candidats ou chefs de partis : Marine Le Pen (RN) et Stanislas Guérini (LREM) dont les listes font la course en tête autour de 22%, Laurent Wauquiez (LR, 13-14%) Raphaël Glucksmann (PS/PP, entre 5 et 6%), Yannick Jadot (EELV, entre 7 et 8%), Manon Aubry (LFI, entre 8 et 9,5%).

En seconde période, sont invités à débattre Nicolas Dupont-Aignan (DLF), Ian Brossat (PCF), Jean-Christophe Lagarde (UDI), François Asselineau (UPR), Francis Lalanne (Gilets jaunes), Dominique Bourg (écolo), Florian Philippot (Patriotes), Nathalie Arthaud (LO) et Benoît Hamon (Génération.s), tous en dessous de 5% d’intentions de vote.

  • Les médias accusés de favoriser certaines listes

Plusieurs candidats dont Benoît Hamon, tête de liste Génération.s, ont menacé de ne plus participer aux débats. L’ancien candidat PS à la présidentielle de 2017, a reproché sur Public Sénat, à la présidente de France Télévision, Delphine Ernotte, d’avoir voulu donner « quelques gages à l’Elysée » pour obtenir un second mandat.

De son côté, Ian Brossat a annoncé saisir le CSA  et « suspendre » sa participation au débat de France 2, qui selon lui « veut faire l’élection à la place des électeurs ». Quant à Florian Philippot, il a critiqué « une marque incroyable d’irrespect » envers les électeurs.

Thomas Sotto, présentateur de  » l’Emission politique » , a défendu la volonté de « clarté » pour que les candidats puissent exposer leurs « idées pour l’Europe ». « On ne favorisera personne », a-t-il assuré à l’AFP précisant que l’émission allait donner la parole à une quinzaine de listes sur les 34, un record.

  • De nouvelles règles pour plus de pluralisme

Le CSA a décidé de répartir de manière équitable 102 minutes entre les 34 listes. Cela revient à donner 3 minutes de temps de parole à chaque liste. Ensuite, 120 minutes ont été réparties en fonction du nombre de députés, sénateurs et députés européens ayant donné leur soutien à la liste. A titre d’exemple, LREM obtient 55 minutes de temps de parole. Enfin, 90 minutes restantes doivent être distribuées en prenant en compte les résultats des partis qui soutiennent les listes, les sondages d’opinion publiés et la participation des candidats ou partis dans le débat électoral. L’ancien mode de calcul était accusé de mettre en avant la majorité et l’opposition, ne permettant pas aux petits groupes d’être représentés sur les chaines médiatiques, même s’ils avaient du poids dans le débat politique.

Eva Mbengue