Guerre en Ukraine : « La Russie a décidé de passer une étape dans l’escalade », selon Emmanuel Macron

« La Russie a décidé de passer une étape dans l’escalade« , a déclaré ce matin Emmanuel Macron au micro de BFM-TV, dans l’avion présidentiel de retour de New York. Alors qu’elle « avait une économie qui s’était intégrée ces dernières années […] Elle est en train de s’isoler sur le plan diplomatique », a-t-il poursuivi, évoquant les distances prises par la Chine et l’Inde vis-à-vis du Kremlin ces derniers jours.

« Moyen de faire pression »

Cette intervention fait suite à celle de Vladimir Poutine, qui a déclaré hier vouloir « mobiliser la population générale » dans le conflit en Ukraine. Elle intervient dans un contexte d’une percée, depuis début-septembre, des troupes ukrainiennes dans des régions contrôlées jusqu’ici par l’armée russe, à l’est et au Sud du pays. Le chef du Kremlin avait ajouté à cette occasion, au lendemain de l’annonce de l’organisation prochaine de référendums sur le rattachement des territoires ukrainiens occupés à la Russie, qu’il n’hésiterait pas à utiliser l’arme nucléaire contre l’occident, qu’il accuse de vouloir « détruire la Russie ». Pour Emmanuel Macron, ces déclarations sont « un moyen de faire pression dans un moment difficile de cette guerre ».

« Dans ce contexte là je pense que notre devoir c’est de tenir notre ligne, c’est-à-dire d’aider l’Ukraine comme on le fait. » Le président a néanmoins affirmé que la France n’était « pas en guerre avec la Russie » et qu’il tentait actuellement « de convaincre les autres pays […] d’accroître les pressions » sur le pays, en guerre depuis bientôt sept mois avec son voisin ukrainien.

Naryjenkoff Dorian

Elections législatives : Trois bulletins, quatre candidates, six mouvements dans la huitième circonscription

 

La gare de Meudon Val Fleury, dans la 8e circonscription des Hauts-de-Seine

La huitième circonscription des Hauts-de-Seine voient sa campagne marquée par deux alliances. Celle des partis de gauche formant la NUPES d’un côté et celle des partis de centre-droite, LREM et UDI montant une liste commune pour l’élection. Les Républicains font cavaliers seuls.

Meudon est une ville protégée, je suis venu y vivre pour ça et pour ses espaces verts” raconte Damien, père de 40 ans, assis à la terrasse d’un tabac. Originaire de Marne-la-Vallée, il est désormais l’un des 68 000 électeurs de la huitième circonscription des Hauts-de-Seine, regroupant les communes de Meudon, Chaville, Sèvres, Ville d’Avray, Vaucresson et Marnes-la-Coquette. C’est pour cette même raison qu’a emménagé Nicolas, 33 ans, chef de projet à la Banque Publique d’Investissement. Il a quitté Boulogne-Billancourt il y a un an. Lui aussi était en quête de nature et de calme. 

Étendue depuis la forêt domaniale de Meudon au sud à un bout de celle de Malmaison au nord en passant par les espaces boisés de Fausse-Reposes, cette circonscription est d’abord appréciée pour sa verdure et ses commerces. “Les commerçants ici sont très accueillants !” s’enthousiasme Elisabeth, une aide à domicile de 47 ans, attendant son bus, courses en main. A l’arrêt d’en face, Laura, 31 ans et mère de quatre enfants reconnaît que Meudon est une ville paisible et familiale mais déplore l’absence de bars et de restaurants. Les 12 et 19 juin, elle se rendra aux urnes pour voter aux législatives car elle s’y sent bien représentée. Elle comprend cependant des électeurs comme Damien ou Nicolas qui, s’ils vont voter, le feront plutôt par dépit. 

Résultats des élections législatives de 2017

Le choix doit se faire entre dix candidats dont Annie Larroque-Comoy pour la Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale, Cécile Richez pour Les Républicains et Prisca Thévenot pour Ensemble, mouvement issu de la majorité présidentielle. Cette dernière vient prendre la succession de Jacques Maire, actuel député La République En Marche élu par la circonscription. N’étant ni originaire, ni habitante de la circonscription, elle a très vite été attaquée sur ce point par ses adversaires, notamment par la candidate des Républicains Cécile Richez qui se revendique comme une chavilloise de toujours : “Prisca Thévenot ne va même pouvoir voter pour elle !” s’amuse la candidate qui dénonce un parachutage politique. 

Le binôme local et national

La candidate LREM Prisca Thevenot et Virginie Lanlo, sa suppléante UDI

En réponse à ces attaques, Prisca Thévenot a choisi comme suppléante Virginie Lanlo, première adjointe (UDI) au maire de Meudon. Toutes deux avaient déjà rédigé leur lettre de candidature lorsqu’elles ont commencé à échanger. “Nous avons mis nos lettres côtes à côtes. Elles se ressemblaient, avec quelques nuances” raconte Virginie Lanlo qui a choisi de rejoindre la campagne de Prisca Thévenot en tant que suppléante. La candidate de la majorité présidentielle affirme qu’elles forment un vrai binôme. “Sur le socle de fond on est aligné. Sur la méthode, il s’agira de construire ensemble. Virginie représente l’ancrage local et moi l’ancrage national. Nous continuerons de travailler ensemble, au lendemain de l’élection, pour les habitants.” Un fonctionnement en duo qu’elles aimeraient bien voir devenir un modèle sur l’ensemble du territoire.

Pourtant cette alliance n’a pas toujours été de soi. Dans un premier temps, Virginie Lanlo espérait le soutien des Républicains. “Je travaille depuis quatorze ans avec ces villes depuis la mairie et ils ont décidé de manière unilatérale d’investir Cécile Richez sans se préoccuper  de l’UDI. On est resté fidèle parce que c’est notre philosophie mais nos échanges pour une union n’ont abouti à rien. J’avais donc décidé de me présenter en mon propre nom” raconte la première adjointe. Une version entièrement contestée par Cécile Richez. “Je n’ai jamais eu le moindre contact avec Virginie Lanlo et ce n’est pas faute d’avoir essayé. Il y avait un accord au niveau des Hauts-de-Seine et l’UDI a fait capoter l’accord en décidant de la majorité présidentielle. C’est le score de l’élection présidentielle qui les a décidés à faire cette alliance avec LREM” explique la candidate des Républicains. 

Virginie Lanlo (UDI) explique comment elle a rejoint la course des législatives et comment son parti s’est rallié à la majorité présidentielle : 

La candidate de “l’éducation et du public

Désormais, ces candidates se retrouvent dans leur volonté de faire barrage à “l’extrême gauche”. “La NUPES est une force d’extrême gauche, on ne peut pas se permettre de prendre le risque qu’elle soit élue” affirme Prisca Thévenot. “Auraient-ils qualifié Mitterrand d’extrême gauche ?” ironise la candidate de La France Insoumise. Pour Annie Larroque Comoy, cette attaque montre leur inquiétude. Les scores de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle ont été surprenamment élevés même à Meudon, une ville votant historiquement à droite et où le candidat a remporté 20 % des suffrages. “C’est la preuve que les gens sont malheureux et commencent à se réveiller” d’après celle qui porte les couleurs de la NUPES.

Depuis la terrasse du tabac où il s’est installé, Damien explique que c’est Meudon, c’est aussi l’opportunité pour son fils d’être dans une bonne école. Un point de vue que partage Elisabeth dont la fille est scolarisée dans le quartier de Meudon-la-Forêt, ce qu’elle déplore. Elle préfère la ville du centre qu’elle juge plus sûre et plus agréable à vivre. Ces disparités entre les quartiers, Annie Larroque-Comoy les déplore. “Pour l’école c’est une catastrophe. Les réformes poussent les familles qui ont des moyens à mettre leurs enfants dans des écoles privées. Je suis à fond pour le public” défend la candidate. Elle veut favoriser l’accompagnement autour de l’éducation mais aussi autour de la petite enfance. Plutôt que d’accorder des subventions aux crèches, elle propose que la mairie construise plus de crèches municipales.

L’école Paul Bert, à Meudon

La candidate de “la santé et de l’inclusion” 

L’autre enjeu est celui de la désertification médicale. Nicolas qui vit sur place depuis un an déplore que les médecins traitants ne prennent pas de nouveaux patients. La dernière fois qu’il a eu un problème de santé, il a dû faire appel à SOS médecin. Damien, qui s’est installé à Meudon il y a deux ans, est confronté au même problème. Cécile Richez en a fait son cheval de bataille pour la campagne législative. “Je pense que parmi les urgences il y a  la santé et l’inclusion scolaire des enfants handicapés », explique-t-elle. Elle propose notamment d’affecter 4 000 médecins juniors aux zones en sous carence, recrutés parmi les soignants étant dans leurs deux dernières années d’internat.

Pour Prisca Thévenot et sa suppléante Virginie Lanlo, la priorité reste le pouvoir d’achat. Elles contestent les propos d’Annie Larroque Comoy selon laquelle il n’y aurait presque plus de mixité sociale dans cette circonscription, affirmant que la plupart des communes ont plus de 25 % de logements sociaux. Une affirmation que nuance cependant Cécile Richez. La candidate des Républicain reconnaît des disparités entre les communes, certaines n’ayant que 12 % de logements sociaux. Elle estime cependant que les espaces de ces villes ne sont pas forcément adaptés, rappelant la grande présence de forêts dans les environs. Le seul point sur lequel candidats et habitants semblent tomber d’accord, c’est qu’ils souhaitent tous préserver ces espaces de verdure, propre à la circonscription.

Emma MERIAUX et Tom MALKI

Les candidats de la huitième circonscription des Hauts-de-Seine : 

Frédéric Schneider : Divers

Philippe Henique : Divers extrême gauche

Annie Larroque Comoy : La France insoumise (NUPES)

Laurence Labbé : Écologiste

Miron Cusa : Écologiste

Prisca Thévenot : Ensemble ! (Majorité présidentielle)

Cécile Richez : Les Républicains

Olivier Mario Michel Pittoni : Droite souverainiste

Sarena Habib : Rassemblement National

Chantal Taranne : Reconquête

 

Législatives 2022 : au marché de Rueil-Malmaison, des électeurs méfiants

A l’approche des élections législatives, les candidats de la 7ème circonscription des Hauts de Seine (Rueil-Malmaison, Saint Cloud et Garches) se sont retrouvés au marché de Rueil-Malmaison ce mardi 31 mai. L’occasion de convaincre des habitants pas toujours réceptifs.

Mardi 31 mai. Le soleil surplombe la place Jean Jaurès, il est 10h30. Les habitants de Rueil-Malmaison se sont donnés rendez-vous comme chaque semaine en ce jour de marché. Cette fois, de nouvelles personnes sont présentes. Tracts sous le bras et gilet vert foncé sur les épaules, Christophe Mandereau aborde les passants avec un large sourire. Déclaré comme candidat libre, l’homme d’une cinquantaine d’année est écologiste mais n’est affilié à aucun parti. Natif de Rueil-Malmaison, il souhaite mettre en avant son ancrage territorial : “Ce n’est pas en parachutant quelqu’un sur place qu’on fait de la politique. Ça fait des mois que je prépare cette candidature. Avec ou sans étiquette j’avais la détermination d’y aller”. Arrivé sur la place en vélo, Christophe Mandereau tracte aux côtés de sa fille lycéenne : En étant libre de parti, c’est clair qu’il y a moins de moyens humains et financiers”. David contre Goliath. 

Car ici, nombreux sont les adversaires de taille. La 7ème circonscription des Hauts-de-Seine peut compter sur des habitants relativement aisés qui votent traditionnellement à droite. En 2017, c’est le candidat LREM, Jacques Marilossian qui l’a emporté avec 57,81% des voix face à Eric Berdoatti des Républicains. Pierre Cazeneuve, candidat LREM, espère le même résultat. Pour ce conseiller municipal de la ville de Saint-Cloud et adjoint au Chef de Cabinet d’Emmanuel Macron, l’enjeu est simple : Il faut donner au président de la République une majorité solide pour qu’il puisse continuer de transformer le pays.” C’est aussi ce que souhaite sa sœur, Marguerite Cazeneuve, une ancienne conseillère de Jean Castex qui a également travaillé pour le cabinet McKinsey. Le père de famille, Jean René Cazeneuve, est aussi engagé pour LREM dans le Gers où il est candidat à sa réélection. La politique chez les Cazeneuve est en effet une affaire de famille.

Que ce soit à Garches, Saint-Cloud ou Rueil-Malmaison, Emmanuel Macron est arrivé en tête du premier et second tour à l’élection présidentielle mais la partie n’est pourtant pas jouée d’avance. L’adversaire principal de Pierre Cazeneuve c’est bien lui : Xabi Elizagoyen. Pour l’encarté LR, la considération locale peut faire la différence : Les gens je les connais et ils me connaissent aussi. J’ai toujours privilégié la proximité et l’écoute. Je suis convaincu que les Rueillois, les Garchois et les clodoaldiens ne voteront pas de la même manière qu’en 2017. En 2017 il y avait l’effet nouveauté”. Le candidat est soutenu par les trois maires de la circonscription : “Ils me soutiennent parce qu’ils me connaissent et qu’ils savent que je vais faire avancer les dossiers”. L’entrain du candidat LR a toutefois du mal a s’exporter.

Des habitants peu enthousiastes

A quelques mètres de l’entrée du marché, les commerçants ne semblent pas partager cet enthousiasme. Un boucher de 31 ans raconte les problématiques du marché : “Ici on a un gros problème pour la remballe. Avant on pouvait descendre sur le boulevard Marechal Foch, ca fluidifiait le flux de véhicules. Aujourd’hui, on ne peut plus. On est obligé de sortir par la rue de la réunion. Quand il fait chaud, on a besoin de mettre les matières premières fraîches dans des camions réfrigérés tout de suite. On a beau leur expliquer ils n’en ont rien à secouer”. La semaine dernière, TF1 a réalisé un reportage sur le plus beau marché de France. Ce boucher était sur place comme beaucoup de politiciens et en garde un goût amer : « C’était beau, il y avait des ballons et tout. Mais une fois qu’ils sont partis il n’y avait plus rien”. Un peu plus loin, un couple de vendeurs de vêtements s’indigne : “Nous sommes très déçus de tout. Ils nous emmerdent plus qu’autre chose car ils récupèrent des gens qui se retrouvent devant les stands”. Voter aux élections législatives parait abstrait pour beaucoup. Certains se rendront toutefois aux urnes sans grandes convictions : “J’irai voter par obligation citoyenne” souffle une gérante d’un stand de fromage. 

Du côté des clients, même son de cloche. Assis, un café à la main, Christian, 39 ans, est catégorique : “Il faut se démerder soi-même. Je crois en moi, pas à la politique”. Certains comptent bien voter aux prochaines élections. Hélène, une Rueilloise quinquagénaire, a donné sa voix à Anne Hidalgo lors de la présidentielle et souhaite voter aux législatives “pour faire opposition à Emmanuel Macron”. 

La parti qui souhaite justement faire face au président nouvellement élu est bien la NUPES. Dans la 7ème circonscription des Hauts-de-Seine, c’est le candidat Sandro Rato qui la représente. Pour cet étudiant à la faculté de Nanterre, atteindre le second tour sera une tâche ardue tant le territoire est ancré à droite, d’autant plus que le candidat n’est pas implanté dans le territoire : “Je ne viens pas de cette circonscription mais étant donné que c’est une élection nationale, elles [les circonscriptions] ont été réparties entre les différents candidats des différents partis. Je ne suis tout de même pas étranger à ce département. Je ne suis pas habitant mais je suis engagé et ça ne doit pas m’attirer de critiques de parachutage”, se défend-il. Cela n’est pas du goût de David qui hésite à voter NUPES aux élections législatives. Il avait été a été déçu par la gauche lors de l’élection présidentielle : “Attendre qu’ils aient perdu pour s’unir aux législatives… Il fallait le faire avant…La politique, c’est toujours pareil de toute façon”.

A quelques jours des élections, l’abstention sur déterminante.

Yoanna Shirel Herrera Santos et Antoine Gallenne

 

 

À Nanterre et Suresnes, la lutte de la Nupes pour convaincre les électeurs

Lors des précédentes élections législatives en 2017, la gauche a perdu pour la première fois depuis 2002. Cette année, Sabrina Sebaihi, candidate de la Nupes, et ses équipes de campagne redoublent d’effort pour convaincre et refaire basculer Nanterre et Suresnes de leur côté.

À Suresnes ce mercredi 1er juin, quelques affiches de campagne sont déjà présentes sur les panneaux d’affichage électoraux près de la mairie. Celles de “la candidate d’Emmanuel Macron”, Isabelle Florennes, députée sortante ; de Florence Muller, candidate du parti Reconquête d’Éric Zemmour ; mais aussi de Sabrina Sebaihi, choisie pour représenter la Nupes (Nouvelle union populaire, écologique et sociale) aux élections législatives. Dans la ville voisine, Nanterre, la situation est bien différente. Les affiches de la candidate de la Nupes sont les plus nombreuses, et rares sont les autres candidats à apparaître sur les murs ou les panneaux d’affichage aux alentours du centre-ville.

Pendant quinze ans, la 4e circonscription a été un bastion de la gauche : jusqu’en 2017, c’est Jacqueline Fraysse, figure emblématique du Parti communiste français, qui représentait les villes de Nanterre et Suresnes à l’Assemblée nationale. Mais en 2017, c’est Isabelle Florennes, la candidate du MoDem soutenue par La République en Marche d’Emmanuel Macron, qui est élue députée. Un coup dur pour la gauche qui, pour ces nouvelles élections législatives, espère reprendre la circonscription en main. 

C’est dans cette optique que la candidate de la Nupes multiplie les actions. Porte-à-porte, distribution de tracts, réunions publiques : “On est mobilisé tous les jours, explique Béchir Saket, membre de la direction de campagne de Sabrina Sebaihi. D’habitude, ce rythme est atteint trois jours avant le premier tour.”

La Nupes rassemble les principaux partis à gauche de l’échiquier politique français, tels qu’Europe-Écologie-Les-Verts (EELV), la France insoumise ou le Parti socialiste. Pourtant, dans la 4e circonscription, sept candidatures étiquetées à gauche viennent s’ajouter à celle de Sabrina Sebaihi. “Ce sont des candidatures qui participent à la division de la gauche, regrette Béchir Saket. Ça nous inquiète, mais on accepte.” 

On espère qu’elles seront suffisantes pour faire valoir les idées de gauche mais pas assez pour diviser la gauche.” – Béchir Saket

Le matin du 31 mai, Marcel, retraité nanterrien, est venu faire son marché place du Maréchal Foch. Équipé d’un chapeau blanc et de sa canne, il se dirige vers les étalages de fruits et légumes, en plein soleil. Installé à Nanterre depuis les années 1970, il n’est pas étonné de voir autant de candidatures à gauche. “Nanterre est une ville de gauche, le maire a longtemps été communiste,” explique-t-il. Selon lui, la division risque de faire perdre la gauche aux législatives. C’est ce qu’espère d’ailleurs la députée sortante Isabelle Florennes. À la question “la division de la gauche peut-elle vous faire gagner ?”, la réponse est claire et assurée : “Oui. D’autant plus que j’ai la chance de réunir Les Républicains et Renaissance.”

Alexis Martin, directeur de campagne de Sabrina Sebaihi, est cependant plutôt confiant quant au passage de sa candidate au 2nd tour. Il voit en ces multiples candidatures “un réservoir de voix”. Valéry Barny, candidat du “parti underground” Citoyen Responsable, classé à gauche, rejette fermement cette idée : “Les gens ont la liberté de penser et d’agir. Je ne suis personne pour leur dire quoi faire.” Pour lui, pas question de soutenir la Nupes : “Ce n’est pas un bon message pour les Français, estime-t-il. On regroupe des personnes qui hier se sont affrontées !”

Faire baisser le taux d’abstention de Nanterre

Mais si la candidate de la Nupes et ses équipes ne s’inquiètent que peu de la concurrence à gauche, c’est parce que la véritable menace est l’abstention. “Nanterre a tendance à moins voter que Suresnes,” constate Alexis Martin. Il ajoute que ce sont surtout les habitants des quartiers populaires qui se déplacent le moins lors des élections législatives. Un vrai problème pour Sabrina Sebaihi car ce sont ces habitants qui, lors des grandes échéances telles que l’élection présidentielle, votent le plus à gauche. Face à une ville comme Suresnes, très ancrée à droite, les militants tentent de mobiliser les électeurs nanterriens. “Moins les gens voteront, plus ce seront les habitants de Suresnes qui donneront le la, explique Béchir Saket. Le jour des résultats, on saura si on a gagné ou non dès qu’on verra l’estimation du taux d’abstention.”

Pour tenter de pallier cette faible participation, la candidate de la Nupes mène “une campagne de proximité”. En fin de journée, le 31 mai, elle allait à la rencontre des habitants de Suresnes en faisant du porte-à-porte, pendant qu’une partie de son équipe faisait de même dans le quartier du Chemin de l’Île  à Nanterre. Le rendez-vous est fixé devant l’école Émile Zola. À peine arrivée, Christine, retraitée de 71 ans, commence à distribuer des tracts à quelques passants. Elle sera rejointe par Perrine, Alexis et Nicolas. Un groupe à l’image de la nouvelle coalition de gauche : Nicolas et Christine sont de l’Union populaire tandis que Christine et Alexis sont d’EELV. « Une cohabitation qui se passe à merveille », lâchent Nicolas et Perrine, en plaisantant. Cela fait près de quinze jours qu’ils arpentent les marchés, se postent devant les écoles et les gares de la circonscription pour faire connaître leur candidate, mais surtout convaincre les habitants d’aller voter, en particulier dans les quartiers populaires.

Le porte-à-porte est un moyen efficace, qui a fait ses preuves, notamment pendant l’élection présidentielle, s’accordent à dire le quatuor. Jean-Luc Mélenchon avait récolté 32,97% des voix. Durant 1 h 30, le groupe part à la rencontre des habitants des bâtiments Ouessant et Quiberon. Si certaines portes restent fermées, d’autres s’ouvrent et donnent lieu à des discussions encourageantes. À l’image de cet habitant qui a appris grâce au passage des militants qu’il y avait des élections les 12 et 19 juin, et qui compte aller voter. Une mini victoire pour les militants qui, au cours des porte–à-porte, essayent de convaincre les plus déçus de la politique et de faire de la pédagogie en rappelant sans cesse les dates des scrutins et l’importance des élections législatives. “Plus on aura de députés à gauche, plus on aura de chance de faire élire Jean-Luc Mélenchon Premier ministre”, explique Alexis aux habitants.

Convaincre les habitants des quartiers populaires, et en particulier les plus jeunes. À 18h30 ce mardi 31 mai, Kenzy Gauthiérot-Pancarte attend quatre personnes au quartier général de la campagne de Sabrina Sebaihi, pour la “réunion jeunes” qu’il a organisée. “La semaine dernière on était une dizaine, mais aujourd’hui les étudiants ont fini leurs partiels et sont partis en vacances”, regrette-t-il. Il a malgré tout prévu des jus de fruits, du café et quelques gâteaux pour accompagner les discussions. Dans le petit local, où quelques chaises côtoient une pile de prospectus de campagne, ils seront en effet quatre à venir. Malo, étudiant en deuxième année de licence de droit et militant d’EELV. Pierre, qui travaille depuis un an dans le domaine de l’intelligence artificielle et est venu à cette réunion par curiosité. Et enfin Loïc et Adrien, lycéens d’à peine 18 ans, venus après avoir rencontré Kenzy Gauthiérot-Pancarte quelques semaines plus tôt.

Eux n’y connaissent rien en politique : “ça ne me rapporte pas d’argent et on ne m’en a jamais parlé, donc je ne m’y suis jamais intéressé”, reconnaît Loïc. Pendant près d’une heure pourtant, il a tenté de comprendre ce qu’est la Nupes, mais aussi le fonctionnement général de la vie politique ou la différence entre chaque parti politique. À plusieurs reprises, Kenzy Gauthiérot-Pancarte a tenté de faire comprendre aux deux lycéens qu’eux aussi ont un rôle à jouer dans le monde politique. “On a besoin de vous, martèle-t-il. Ce ne sont pas les plus vieux qui doivent dicter les choses, vous êtes ceux qui subiront le plus les décisions politiques.

À 20h30, alors que le local s’assombrit au fur et à mesure que la nuit tombe, Adrien, bien moins bavard que son camarade, se libère : “C’est agréable de discuter avec vous, on se découvre nous-aussi.” Loïc et lui sont prêts à revenir la semaine suivante. Pour en apprendre plus sur la politique, mais surtout pour profiter des pizzas proposées par Kenzy Gauthiérot-Pancarte et en apprendre plus sur la marche à suivre pour devenir député et profiter du salaire assorti à la fonction. L’organisateur de la soirée est heureux de les avoir vu ce soir, et surtout de savoir qu’ils reviendront. “Même si ce n’est pas pour les bonnes raisons”, reconnaît-il.

Keisha Mougani et Laura Merceron