« Qui dit hommes dit défaillances »

Michel Groisne est le directeur d’études de l’Institut universitaire de formation et de recherche du Transport Aérien (IFURTA) basé à Aix. Il revient sur les enjeux de la sécurité dans les avions et les aéroports.

Est-ce que vous avez l’impression que les mesures de sûreté sont suffisantes pour faire face à la menace terroriste ?

Je ne sais pas si on peut répondre à la question telle qu’elle est posée parce que, par définition, la menace terroriste est en tous lieux et en tous points “imprévisible”. Meme si le role de l’etat est d’essayer de pénétrer cette prévisibilité. Je dirais que nul endroit sur le fond n’est protégé d’une attaque de ce type que ce soit dans la rue ou dans un aéroport. Dans l’absolu aucune mesure ne peut garantir à 100% la sûreté des personnes, sauf à enfermer quelqu’un chez lui. Le risque de sûreté est un risque un peu nouveau avec la pression terroriste mais c’est un risque parmi d’autres, il est de nature très différente puisqu’il est lié à des actes humains alors que les autres sont plutôt liés à des accidents.

S’il y a toujours un risque, est-ce vraiment efficace de mettre en place toutes ces règles de contrôle comme les portiques ?

Bien évidemment, ces mesures visuelles sont de nature à décourager un certain nombre de terroristes ou d’apprentis terroristes. Elles sont un frein évident à une démultiplication des actions. En ce sens là on peut dire que ça a une certaine efficacité.

Mais si un terroriste n’est pas touché par l’aspect “dissuasion” et qu’il est relativement malin, peut-il tout de même commettre un attentat dans un aéroport ?

Il faut, sur ce point, bien distinguer la zone sous surveillance, la zone réservée, de la zone publique. Les mesures mises en place, même si on ne peut pas être sûr à 100%, sont très efficaces pour éviter les incursions d’armes avec les filtres et autres. C’est la preuve de leur utilité et de leur importance, on ne peut pas le nier. On n’est jamais protégé à 100%, le risque existe, mais il est fortement minimisé.

C’est donc la zone publique de l’aéroport qui pose problème ?

Dans une zone publique, que ce soit un aéroport, un marché ou dans une foule, à partir du moment où on ne peut pas fouiller les gens au sortir de chez eux, dans la rue, partout, le risque est prégnant, bien évidemment.

Les aéroports restent-ils une cible privilégiée pour les terroristes ?

Je pense que les terroristes cherchent le symbole parce qu’ils cherchent à ce qu’on parle d’eux. Donc c’est vrai que l’aérien en ce sens est particulièrement visé. Les mesures de sécurité semble satisfaisantes parce que très peu de choses arrivent en vol et dans les zones réservées. Comme vous le savez, depuis septembre 2001, l’idéal pour un terroriste est de détourner un avion et de le faire s’écraser sur une ville.

On remarque que pour sécuriser ces lieux, de nouvelles technologies de détection sont mises en place. Qu’est-ce que vous en pensez ?

Dans des périodes de très forte crise on est obligés de prendre un certain nombre de mesures pour dissuader tous ces gens. On ne peut pas voir tout ce qui se passe en amont, en prévisionnel. Donc c’est vrai que ça oblige à des moyens de détection accrus avec de la surveillance vidéo et toute une séries de détecteurs sur-mesure. Choses qu’on ne peut pas forcément décrire en détail d’ailleurs.

Est ce que vous remarquez des failles ou des négligences dans les aéroports aujourd’hui ?

Qui dit hommes dit défaillances. Il peut y avoir des erreurs, de l’inattention etc. Il faut savoir que, dans les mesures de sûreté, en général, il y a un ensemble de points de contrôles qui font que, si il y a une défaillance quelque part, elle sera vue ensuite. Ce qui est important c’est le système de sureté tout entier avec un certain nombre de checks. C’est la vision globale des différentes mesures, y compris la formation des hommes bien évidemment.

A l’échelle d’un aéroport, est-ce que vous pensez que les mesures actuelles suffisent ?

Il faut être conscient que le risque zéro n’existe pas et que, en multipliant les moyens par dix, qu’on a pas forcément, on ne diviserait pas forcément le risque par dix. Je crois qu’il faut bien avoir conscience de ça, il y a un nouveau risque qui existe qu’on essaie de limiter au maximum et il reste malheureusement présent.

L’aéroport de Tel-Aviv, qui serait le plus sécurisé au monde, a fait beaucoup parler de lui. Est-ce un modèle vers lequel on tend ?

Les Israéliens ont été et sont sans doute, pour des raisons évidentes, visés par des attaques terroristes et sont ceux qui en ont eu le moins. Il ont mis en place un système de contrôles au niveau des personnes avec un interrogatoire des personnes spécifiques pour essayer de recouper les informations, pour vérifier le bien fondé du déplacement de la personne etc. Ils ont des mesures tout à fait spécifiques mais sur des volumes qui sont sans commune mesure avec ceux que nous devrions traiter sur les grand aéroports.

Car, plus l’aéroport est petit, plus c’est facile de le sécuriser ?

Il est évident qu’ici le cout de ces mesures est important avec le nombre d’agents, leur formation, les interrogatoires. Ça serait difficile à mettre en place ce genre de choses dans de très grands aéroports. Certes ça coûte très cher mais c’est efficace.