Déremboursement de l’homéopathie : quelles conséquences pour les pharmacies ?

A compter du 1er janvier 2021, les médicaments et les préparations homéopathiques ne seront plus remboursés par la sécurité sociale. Cette annonce, officialisée mardi par le ministère de la Santé via deux arrêtés, ne semble pourtant pas préoccuper les pharmaciens.

Les pharmaciens s’inquiètent des inégalités sociales que pourrait engendrer le déremboursement de l’homéopathie.

Arnica, oscillo cocillum, homéoplasmine ou encore camilia. Les étagères de la pharmacie de Villiers, à Levallois-Perret, sont remplies de boîtes colorées qui attirent instantanément le regard. Ici, crèmes et préparations homéopathiques se vendent comme des petits pains. « Quelle maman n’a pas un tube d’arnica chez elle ou dans son sac ? Quel enfant n’a jamais pris de stodal ?» glisse François-Xavier Moreau.
Ce pharmacien regrette le déremboursement progressif de l’homéopathie et s’interroge sur sa nécessité. « Les gens sont habitués à leur traitement, ils y tiennent beaucoup. Quant à ceux qui viennent sans ordonnance, soit la plupart, ils paient déjà. Cela ne va pas changer grand-chose ni pour eux, ni pour nous. Cette mesure va plutôt augmenter les inégalités face à l’offre de soins : 5€ pour certaines personnes, à la fin du mois, ce n’est rien, mais pour d’autres… »

Le déremboursement de l’homéopathie signifie en effet que les soins vont passer du statut de médicament à celui de complément alimentaire. Soit une hausse de la TVA de 2,1% à 5,5%. Si certaines personnes réduisent alors leur consommation de produits homéopathiques, grâce à cette augmentation de facto, l’impact économique sera très réduit sur le chiffre d’affaire des pharmacies.
« C’est une alternative qu’il est dommage de perdre, soupire François-Xavier Moreau. L’efficacité scientifique n’est peut-être pas prouvée, mais un être humain n’est pas un tube à essai. Je préfère me fier à ce qu’on me rapporte au comptoir. Si les gens sont guéris, que ce soit placebo ou non, c’est tout ce qui compte. »

« L’homéopathie, ça se vendra toujours »

En France, l’an dernier, l’homéopathie représentait 126,8 millions sur environ 20 milliards d’euros pour l’ensemble des médicaments remboursés, selon l’assurance maladie. Soit seulement 6% du budget de la Sécurité sociale. Chez les praticiens, l’incompréhension est donc parfois grande. Le syndicat national des médecins homéopathes dénonce ainsi une « décision aberrante » et « un climat insidieux ». Le collectif Mon homéo mon choix a, quant à lui, lancé une pétition, notamment appuyée par les laboratoires Boiron et Weleda, leaders du secteur. Elle atteint déjà plus d’un million de signataires.

« Boiron vient régulièrement faire campagne dans les pharmacies, confie en souriant Charlotte Morin, de la pharmacie de l’Europe (Levallois-Perret). Ils nous ont demandé de signer et de faire tourner cette pétition. Ils ont peur des conséquences du déremboursement. »
Pour la jeune pharmacienne, cette inquiétude n’est cependant pas forcément justifiée. «  Il y a une clientèle très attachée aux traitements dits naturels, qui a peur des traitements chimiques et de leurs effets secondaires. Nous risquons seulement de moins recevoir d’ordonnances de la part des médecins traditionnels, car les patients refusent souvent ce qui est non-remboursable. Il y aura donc peu de conséquences sur les pharmacies et les laboratoires, qui savent s’adapter. L’homéopathie, ça se vendra toujours. »

Audrey Dugast

Manifestation des travailleurs en Ehpad : « On n’en peut plus »

Presque deux ans après le mouvement de grève national dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, la grogne persiste chez le personnel.

 

Les travailleurs dans les Ehpad et aides à domicile manifestaient ce matin devant le ministère de la Santé. Ils réclament une hausse des salaires, et l’ouverture de 40.000 postes sur tout le territoire. (Crédit : Alice Ancelin/CELSA)

 

Ils étaient une centaine à se mobiliser ce mardi matin devant le ministère de la Santé. Syndicats, directeurs d’Ehpad (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), aides-soignant(e)s, et aides à domicile réclament au gouvernement plus de moyens financiers et humains. Une mobilisation qui s’inscrit dans un mouvement de grève nationale de tous les travailleurs du « grand âge » aux quatre coins du pays. « Depuis près de deux ans, on tire la sonnette d’alarme concernant la prise en charge des personnes âgées, à domicile et en établissements, et le gouvernement reste sourd à notre demande, constate Jean-Paul Zerbib, représentant national de la CFE-CGC sur cette problématique. L’urgence, c’est la création de postes. »

Pourtant, la semaine dernière, le ministère d’Agnès Buzyn annonçait dans son Projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2020 (PLFSS) la création de 5.200 postes en Ehpad sur tout le territoire, ainsi qu’une enveloppe de 50 millions d’euros pour les aides à domicile. Des mesures largement jugées « insuffisantes » par l’intersyndicale, qui réclame la création de 40.000 postes, soit l’équivalent « d’une ou deux personnes de plus par établissement en France », selon Jean-Paul Zerbib. 

 

Un ratio de 6 soignants pour 10 résidents

S’ils réclament l’ouverture de postes, les manifestants interpellent aussi le gouvernement sur la nécessité de rendre attractif un corps de métier aujourd’hui à bout de souffle. « Et l’attractivité, ça passe par l’augmentation des salaires, c’est la première chose à faire si l’on veut que les choses évoluent, affirme Eric Fregona, directeur adjoint de l’AD-PA (Association des Directeurs au service des Personnes Âgées). En France, on a un ratio de 6 aides-soignants pour 10 résidents. Alors que pour s’occuper d’eux dignement, il en faudrait 8, minimum ».

Un manque de personnel que constate aussi Roger, résident de 81 ans à l’Ehpad de Saint-Maur-les-Fossés (94). « Il ne sont pas assez, c’est terrible, assure-t-il. Moi ça va, je suis encore assez autonome. Mais ce qui me chagrine, ce sont ceux en fauteuil, les plus dépendants, qui ne sont pas très bien assistés ». Mais Roger ne blâme pas pour autant les soignants. « La preuve, je suis venu manifester avec eux aujourd’hui, et je les soutiens totalement », souligne-t-il, bras dessus bras dessous avec une des aides-soignantes de son Ehpad. 

 

Martine,aide-soignante dans un Ehpad du Val-d’Oise : « J’ai l’impression de mal faire mon travail » (Crédit : Alice Ancelin/CELSA)

 

“On perd notre vocation”

 

Martine travaille dans un Ehpad du Val-d’Oise depuis près de 20 ans. « On fait tout vite : les toilettes, les repas, le coucher. C’est l’usine. Et c’est épuisant, on perd notre vocation, avoue-t-elle. J’ai 48 ans, et j’ai déjà été arrêté plusieurs fois pour des problèmes de dos à force de courir partout tout le temps ». Comme elle, nombreux sont les travailleurs en Ehpad qui ont des accidents de travail, et les arrêts à rallonge sont réguliers. « J’ai une collègue qui a fait un burn-out l’année dernière », ajoute Martine. Certains vont même jusqu’à quitter leur emploi, pour se reconvertir. « Les soignants sont en réelle souffrance, appuie Karine Halgrain, membre du syndicat UNSA Santé. Ils sortent des écoles avec une certaine éthique, mais sur le terrain ils n’arrivent pas à appliquer ce qu’on leur prodigue en formation ». Un avis que confirme Martine : « j’adore mon métier, mais j’ai l’impression de mal faire mon travail ».

Le Ministère de la Santé reste pour l’instant inactif face aux revendications des travailleurs en Ehpad et aides à domicile. « Un dialogue est installé, mais on nous répète qu’il n’y a pas d’argent, déplore Karine Halgrain. Jusqu’où devra-t-on aller pour se faire entendre ? ».

 

Alice Ancelin

Les associations de défense des migrants s’inquiètent d’une possible suppression de l’aide médicale d’Etat

Le débat sur la politique migratoire débute aujourd’hui à l’Assemblée nationale. Au cœur des discussions : l’aide médicale d’Etat (AME), qui divise au sein de la majorité. Plusieurs associations de défense des migrants s’inquiètent de sa pérennité. 

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« C’est une protection sociale de merde, un raté de l’universalité, martèle le secrétaire général de l’association Médecins du monde, le Dr Patrick Bouffard, à propos de l’aide médicale d’État (l’AME). Ca n’a aucun rapport avec la sécurité sociale, c’est conçu pour des sous-citoyens. » Patrick Bouffard paraît désemparé, ce lundi, lors d’une conférence de presse organisée par les Etats généraux des migrations à l’occasion du débat parlementaire sur la politique migratoire de la France, qui a débuté à l’Assemblée nationale lundi après-midi.

Créé en 2000, l’AME permet aux personnes en situation irrégulière de se soigner à condition d’avoir résidé en France depuis au moins trois mois et de disposer d’un revenu inférieur à 8 644 euros par an pour une personne. Un peu plus de 300 000 sans-papiers en bénéficient pour un coût d’environ 930 millions d’euros par an, ce qui représente 0,5% des dépenses de santé.

C’est donc un cri d’alarme que lancent les associations de défense des migrants, telles que Médecins du monde et la Ligue des droits de l’homme ou encore Tous migrants,  alors que des rumeurs circulent sur une possible suppression de l’AME ; l’exécutif, divisé sur le sujet, entend revoir certaines modalités du dispositif. Ses détracteurs, dont la plupart sont issus de la droite et de l’extrême-droite, dénoncent son coût toujours croissant et réclament sa suppression totale ou partielle. Patrick Bouffard mentionne de son côté une « instrumentalisation politique de la médecine », dénotant entre autre, les « fraudes » et les « excès » évoqués par certains députés en référence à l’augmentation de l’immigration des Albanais et des Géorgiens. Une partie d’entre eux viendraient se soigner en France pour des pathologies coûteuses comme le cancer ou l’hépatite B.

Le délégué général de La République en marche, Stanislas Guerini, avait invoqué début septembre, des « abus » d’utilisation de l’AME, « par exemple pour financer des prothèses mammaires ». Sans preuve, ce dernier est revenu sur ses propos. Le taux de non-recours à l’AME s’élevant à 88%, le Dr Bouffard pointe du doigt un autre enjeu de ce débat : « le manque de connaissance qui règne au sein du corps législatif ». 

« Je vais me permettre de jouer au docteur, poursuit Patrick Bouffard. Ce qui m’inquiète le plus, c’est le mot “violence“. Il y a de nouvelles entités pathologiques comme la santé mentale. Quand on abandonne les gens à eux-même, ils deviennent fous ». « La maladie est un droit », répète-t-il plusieurs fois en appuyant les propos de sa confrère Dominique Noguères, vice-présidente de la Ligue des droits de l’homme : « un migrant n’est pas un objet, il est un sujet de droit ». Le Dr Bouffard ne cache pas son espoir à l’égard de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn ; ayant été médecin, elle devrait  comprendre certaines problématiques : « L’éthique, tout le monde s’en fiche. Le dernier argument qui nous reste, c’est celui de la santé publique ».  Patrick Bouffard conclut : « Quand vous soignez les plus démunis, vous soignez l’ensemble de la société ».

En effet, Agnès Buzyn avait évoqué, en septembre dernier, la nécessité de « soigner les gens tôt, au bon moment », lorsqu’elle apportait son soutien à une tribune de 805 médecins contre la limitation de l’AME.

Bertille van Elslande

Des pesticides au domicile de 75 % des Français

Trois Français sur quatre ont utilisé au moins un pesticide chez eux, au cours des douze derniers mois, selon une enquête publiée lundi 7 octobre par l’Anses. L’agence de santé alerte sur les potentiels dangers de ces produits, dont les conditions d’utilisation ne sont généralement pas respectées.

Utiliser des pesticides au moins une fois au cours de l’année, c’est le cas pour près de 75 % des Français, d’après les révélations de l’enquête Pesti’home, publiée, ce lundi 7 octobre, par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail). L’agence sanitaire alerte sur les dangers liés à l’utilisation de ces produits potentiellement toxiques. Une habitude qui pourrait avoir des conséquences néfastes sur la santé des Français.

 

C: Pixabay

– Quels pesticides utilisent les français ?

Insecticides, vermifuges, solutions contre les poux … Dans les intérieurs métropolitains, les pesticides s’utilisent donc principalement dans deux secteurs : pour jardiner et pour protéger les habitations des rongeurs, insectes et autres animaux indésirables. Les bombes insecticides sont entrées dans les habitudes de 40 % des Français et 61 % des propriétaires d’animaux domestiques les traitent contre les puces ou les tiques.

– Quels sont les risques sanitaires ?

Le risque principal provient de la mauvaise utilisation de ces produits chimiques. Si les Français sont globalement attentifs au mode d’emploi des pesticides utilisés pour jardiner, ils n’ont pas la même rigueur pour ceux utilisés en intérieur. Les précautions à prendre sont pourtant écrites sur les emballages, « en lettres un petit peu petites » souligne le rapport. Se laver les mains après utilisation, sortir de la pièce et l’aérer après pulvérisation, porter des gants pendant l’utilisation, il est important de respecter les protocoles d’utilisation.

Pourtant, environ un ménage sur trois ne lit jamais les instructions des emballages d’anti-acariens et anti-rongeurs et un quart d’entre eux ne les lit jamais pour les produits contre les insectes volants et rampants.

L’Anses insiste sur le caractère potentiellement cancérigène de ces pesticides et rappelle qu’il s’agit, bien souvent, des mêmes molécules que pour les produits utilisés en extérieur, dont se méfie pourtant plus les français.

– Que recommande l’Anses ?

Globalement, c’est une vigilance accrue que préconise l’Anses, à commencer par une lecture attentive des notices d’utilisation. Les femmes enceintes et les enfants doC: Pixabayivent faire encore plus attention, par exemple, ils doivent éviter de dormir avec leur animal de compagnie après qu’il ait été traité avec une pipette antiparasite

L’enquête soulève également un autre point problématique : un quart des ménages a toujours dans ses placards des pesticides prohibés, acquis avant leur interdiction légale. On peut supposer que cette proportion de produits illicites est désormais plus élevé, avec l’interdiction de l’utilisation de produits phytosanitaires chimiques en jardinage pour les particuliers au 1e janvier dernier, après le déroulé de l’enquête en 2014.

Les Français doivent donc se débarrasser de ces pesticides mais attention, certains d’entre eux n’ont pas leur place dans les poubelles classiques. Selon l’enquête, 60 % des métropolitains y jettent leurs produits chimiques périmés ou les vident dans leur évier, alors que ceux-ci devraient être apportés en déchèterie. Une pratique détrimentale sur le plan sanitaire et environnemental.