Séisme: L’Association des Marocains en France à Saint-Denis s’organise en urgence

À Saint-Denis, l’Association des Marocains en France (AMF) se mobilise depuis le 9 septembre dernier, pour venir en aide aux victimes du séisme. Les bénévoles collectent chaque jour des vêtements, matériel médical, orthopédique etc. Les dons affluent dans ce département où la diaspora marocaine est très présente. Reportage.

Au sein des locaux de l’Association des Marocains en France situés juste en face du T1 (tram) à Saint-Denis, plusieurs sacs sont disposés les uns à côté des autres dans toute la pièce. Un sac ACTION près de l’entrée avec des vêtements pour enfant. Un autre contenant des chaussures, des sacs, des médicaments (Doliprane), brumisateurs. Sur l’un des murs de l’organisme, une liste est placardée sur laquelle on peut lire les éléments suivants : « LISTE DES PRODUITS AUTORISES : Chaises roulantes, béquilles, matériel médical, matériel orthopédique, couverture, médicaments, lits pliables, tentes »

« On ne prend plus de vêtements, c’est une consigne des autorités pour des raisons sanitaires et on nous a transmis cette liste de produits autorisés », explique David l’un des bénévoles de l’AMF.

Le collectif a été créé dans les années 60 pour venir dans un premier temps en aide aux travailleurs marocains puis l’association s’est occupée progressivement des habitants du quartier en proposant des cours de français, d’informatique, des ateliers de soutien éducatif, d’aide juridique.

« On reçoit jusqu’à 100 appels par jour »

 

Depuis le séisme, l’association s’occupe en priorité de l’organisation pour l’envoi des dons même si les activités annexes ne sont pas abandonnées.

« C’est ma fille de 14 ans qui m’a appelé pour me prévenir de ce qu’il se passait, elle était à Agadir. J’ai eu peur, vous imaginez ? Et puis à partir de cet instant, on s’est appelés entre bénévoles et le lendemain matin, on s’est réuni en cellule de crise pour s’organiser, répondre à la demande, recevoir les gens », détaille posément El Mostafa Ramsi membre historique du bureau de l’AMF.

De 10 h à 19 h, chaque jour, les membres de l’AMF reçoivent des dons sur place et répondent aux appels « on reçoit jusqu’à 100 appels par jour. Ça ne s’arrête pas, c’est impressionnant. Ce sont des personnes qui appellent pour savoir ce que l’on peut donner concrètement, dans quels locaux apporter des dons » La diaspora marocaine, très présente en France et dans le département (93), est en première ligne pour venir en aide aux sinistrés mais l’AMF est également sollicitée par des directeurs de supermarchés, des entreprises, des proviseurs, etc.

Un élan de solidarité de toutes parts

 

Aux environs de midi, une jeune femme entre dans le local et salue les trois membres présents qu’elle connaît. Silvia Capanema, conseillère départementale du canton Saint-Denis-Stains (LFI). Cette dernière souhaite donner de l’argent mais l’un des membres de l’équipe lui explique qu’une cagnotte en ligne a été lancée et qu’elle peut envoyer directement son argent sur cette cagnotte.

« J’ai été très touchée parce que j’ai une relation affective avec le Maroc, il y a beaucoup de Marocains dans le département et j’ai voulu participer à cet élan de solidarité », affirme Silvia Capanema. L’AMF est indépendante et collabore uniquement avec des associations locales au Maroc qui leur font part de leurs besoins. « On envoie directement les dons en argent à ces associations locales pour qu’elles achètent ce dont elles ont besoin. Hier, on a fait un envoi qui va directement à une engagée ! », insiste El Mostafa.

Souad Frikech Chaouih, déléguée générale de la structure, précise « l’AMF a toujours maintenu des relations de solidarité, surtout sur les questions de l’éducation et de l’entrepreneuriat des femmes avec des associations partenaires au Maroc. Dans une telle situation, il est de notre devoir, en tant que citoyen marocain et franco-marocain, de se solidariser avec les populations », déclare-t-elle.

À 13 h, les téléphones sonnent toujours autant dans les locaux. Cette fois, David reçoit un appel de Vinci construction (le groupe français spécialisé dans la construction et le génie civil). Le même cérémonial se poursuit, il note sur son ordinateur les coordonnées de la structure, sur lequel on aperçoit la très longue liste de toutes les personnes qui ont appelé l’AMF. La responsable des salariés de l’entreprise indique qu’ils souhaitent se renseigner pour proposer des dons de matériaux suite au séisme dévastateur.

Un élan de solidarité plus que nécessaire, pour rappel le bilan est de 3000 morts et plus de 5000 blessés. Le Maroc a d’ailleurs annoncé, mercredi 20 septembre, qu’un budget de près de 11 milliards d’euros serait destiné à la reconstruction, au relogement et à la valorisation socio-économique des zones touchées par le séisme.

Saint-Denis : la Pride des banlieues célèbre les fiertés des quartiers populaires

Ce samedi 3 juin aura lieu la troisième édition de la Pride des banlieues à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), une marche militante visant à mettre en avant les revendications des personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires.

Samedi 3 juin, le cortège de la Pride des banlieues défilera dès 14h dans les rues de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Crédit : La Pride des banlieues/Twitter

« Placer les marges au centre des luttes ». Telle est la volonté du collectif de la Pride des banlieues, créé en 2019 par des membres de l’association Saint-Denis au centre. L’objectif : déconstruire le supposé obscurantisme des quartiers populaires face aux questions LGBTQIA+ et rendre visibles les personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires, notamment de Seine-Saint-Denis. Il s’agit de porter les revendications propres à ces territoires afin de « dégager des solutions aux problématiques vécues par les habitants de Seine-Saint Denis de façon autodéterminée », a expliqué Mihena Alsharif, membre du comité d’organisation dans un billet de blog sur Mediapart.

Pour cause, dans les quartiers populaires, l’homophobie et la transphobie sont souvent couplés à d’autres discriminations et les personnes concernées ne se sentent pas toujours représentées dans la traditionnelle Marche des fiertés parisienne. « Lorsqu’on est LGBTQI+ en quartiers populaires, aux LGBTphobies viennent s’ajouter le racisme, la précarité et l’abandon des services publics. Nos revendications prennent donc en compte ces enjeux qui s’intersectionnent », détaille Yanis Khames, l’un des coordinateurs de la Pride des banlieues dans les pages du média Komitid.

Un accès élargi à la PMA, la revendication centrale en 2023

Après une première édition en 2019 et une seconde en 2022, centrée sur la question du logement pour les personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires particulièrement touchées par le mal-logement, cette année la revendication mise en avant est celle de la PMA pour tous et toutes. En effet, malgré l’ouverture de la procréation médicalement assistée aux femmes seules et aux couples de femmes en 2021, les hommes trans, qui peuvent pourtant dans certains cas porter un enfant, en sont toujours exclus. Le collectif pointe aussi du doigt les inégalités face au droit à la PMA, notamment pour les personnes non-blanches, qui font face à des délais d’attente plus longs pour accéder à un don de gamètes en raison de l’obligation d’appariement.

Plusieurs personnalités publiques ont d’ores et déjà apporté leur soutien à l’évènement comme l’humoriste Tahnee, l’acteur et réalisateur Océan, ou encore l’actrice Adèle Haenel.

L’année dernière, 10 000 personnes avaient rejoint le cortège dans les rues de Saint-Denis, soit trois fois plus qu’en 2019. Suite à ce succès, le collectif d’organisation de la marche est devenu un mouvement actif tout au long de l’année. Dans cette optique, Yanis Khames, a écrit un livre, intitulé Les marges au centre de la lutte (Double ponctuation, 2023) qui est sorti en mai dernier. Dans celui-ci, il pose les bases théoriques et pratiques du mouvement, afin d’expliciter leur démarche.

Marie SCAGNI

Saint-Denis : entre les immeubles, des hectares de légumes pour les habitants

A Saint-Denis, une ferme pédagogique ouvrira ses portes au printemps prochain. Jeanne Crombez, responsable du projet, souhaite valoriser le lien entre producteur et consommateur.

Une partie de la récolte des citrouilles a permis à des enfants de les creuser pour Halloween.
Une partie de la récolte des citrouilles a permis à des enfants de les creuser pour Halloween.

A Saint-Denis, juste à côté du géant américain de la restauration rapide, plus de trois hectares de terres sont encerclés par les tours d’immeubles. Cette ferme n’est pourtant pas nouvelle dans le quartier, elle existe depuis 1920. L’ancien propriétaire René Kersanté prend sa retraite et confie ses terres à Jeanne Crombez qui va remettre à flot l’exploitation qui connaissait quelques difficultés financières.

Cette jeune femme de 22 ans souhaite donner un nouvel élan au lieu : d’ici le printemps prochain, l’exploitation va devenir une ferme pédagogique. « Nous allons construire une serre de 450m² et faire venir des animaux : moutons, chèvres, poules, canards… »

Mais le but premier, c’est faire de la vente directe de légumes. Auparavant, René Kersanté vendait ses salades sur le marché de Saint-Denis et ce qui lui restait au supermarché Carrefour.

Jeanne Crombez veut désormais créer un lien direct à la ferme entre consommateur et producteur. Elle espère mettre en place « une boucle alimentaire locale ». Elle souhaite que les habitants mais également les commerçants et les restaurateurs du coin s’approvisionnent à la ferme.

La vente directe répond à une réelle demande des consommateurs. Le pari est quasiment gagné car cet été, du maïs doux et des citrouilles ont poussé et la vente à la ferme a été un véritable succès. « Ce sont principalement les habitants du quartiers qui ont acheté. Les gens venaient et revenaient chercher du maïs. Ils remplissaient des caddies entiers ! Ils sont très demandeurs. »

Jeanne Crombez et sa chienne Emeraude ont investi les lieux à la fin de l'été.
Jeanne Crombez et sa chienne Émeraude ont investi les lieux à la fin de l’été.

Un lien social pour les habitants de Saint-Denis

La mairie de Saint-Denis est propriétaire des terres. Elle soutient la création de ce lieu de vente local. Lors de l’achat, la municipalité a donc pris le soin d’inscrire les terres au plan local d’urbanisme pour les sécuriser et qu’elles ne soient pas vendu à un promoteur immobilier. « La mairie a à coeur que les habitants puissent manger des légumes à côté de chez eux. »

Cette vente en direct avec le producteur permet de créer un vrai lien humain avec les clients selon Jeanne. « On s’échange des recettes. J’ai une cliente qui m’a demandé si on avait des courges d’une variété spécifique car elles permettraient de maigrir. J’ai donc commandé des graines car je suis très curieuse de connaître ce légume » s’amuse la jeune femme.

Une production variée

Pour satisfaire au mieux les consommateurs, plusieurs variétés vont être plantées : oignons, choux, maïs doux, melon ou encore des pastèques. « Nous allons produire des variétés du XVIIIe et XIXe siècle. On veut également réintroduire des techniques agricoles de l’époque. La récolte se fera à la main. » Pour respecter l’objectif de produire local, les semences proviennent du nord et de l’ouest de la France. « C’est difficile de trouver des semences en Ile-de-France donc on se fournit au plus près. »

Pour l’entretien de ces légumes, ce sera sans produits phytosanitaires. Jeanne Crombez ne souhaite pas produire des légumes bio car c’est difficile d’avoir le label et les habitants à proximité n’ont pas le portefeuille adapté. « Cela ne sert à rien de consommer bio si cela vient d’Espagne. Sur les carottes bio, il y a quand même des produits phyto. Le but ici c’est de consommer ce qui a été cueilli le matin même. » Du champ à l’assiette du consommateur, le trajet doit être court.

Pour Jeanne Crombez, il est certain que les légumes de cette ferme aux portes de Paris ne risquent pas d’atterrir dans les hamburgers du McDonald’s… situé de l’autre côté de la rue.

Alice Pattyn et Elisa Centis

 

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Cirque : 3 questions à Valérie Fratellini

L’académie Fratellini a été la première école de cirque créée en France par Anne Fratellini. A sa mort, c’est sa fille Valérie qui en a pris la direction.

Comment l’Académie Fratellini a t-elle évolué depuis sa création?

Si je pars de l’école du cirque Fratellini, la première école du cirque en Europe, sans « cursus » et non diplomante,  elle est devenue l’Académie Fratellini, un CFA , centre de formation professionnelle, une école supérieure dont le cursus est en trois ans. A la fin des études les « apprentis » sortiront avec 2 diplômes: un DNSP ( diplôme national supérieur professionnel) et une licence théâtre avec ParisVIII puisque pendant leur trois années ils iront à l’université.

Elève de première année l'Académie Fratellini pratiquant la roue Cyr
Elève de première année l’Académie Fratellini pratiquant la roue Cyr

Est-ce que ce n’est pas un peu paradoxal d’enseigner les arts du cirque de manière institutionnelle alors même que le cirque peut se définir comme une « contre-culture » ?

Le cirque au même titre que la danse et le théâtre doit s’inscrire dans une formation « diplomante ». C’est aux élèves d’apprendre que ce n’est pas le diplôme qui va les faire trouver du travail!

Le nouveau cirque se dirige t-il vers une forme de théâtralité plus poussée avec moins de performances et de prises de risques et plus de dramaturgie ?

Le cirque n’a pas attendu le « nouveau cirque », qui n’est plus nouveau d’ailleurs, pour travailler théâtralement. Les trois clowns, Fratellini dans leurs entrées de clown » jouaient » leur rôle de clown blanc et d’auguste. Ce que le cirque a développé, c’est l’écriture d’un spectacle, une histoire, un début, une fin, des personnages. Le cirque est ce qu’en feront les étudiants des écoles. C’est eux qui feront le cirque de demain!

Découvrez la performance d’une élève d 3ème année de l’Académie Fratellini

Propos recueillis par Blanche Vathonne & Mathilde Poncet

Plus d’informations :

Le cirque à l’ancienne en voie de disparition?

Alexandre Romanes, chef de file du cirque tzigane 

Le cirque sans animaux, c’est possible?