Le McDonald’s des Champs Elysées en grève contre sa vente à un franchisé

Le fast food McDonald’s sur les Champs-Elysées était bloqué ce mercredi pendant la pause déjeuner par une vingtaine de manifestants. Le restaurant devrait être vendu d’ici quelques jours à un franchisé. Les salariés craignent une baisse des salaires et une dégradation des conditions de travail.

Une vingtaine de manifestants bloquent le MacDonald's des Champs Elysées pendant la pause déjeuner. Crédit : Alice Pattyn
Une vingtaine de manifestants bloquent le MacDonald’s des Champs Elysées pendant la pause déjeuner. Crédit : Alice Pattyn

Sur la plus belle avenue de Paris, le géant de la restauration rapide se pare de drapeaux, de banderoles et des slogans fusent. Des manifestants bloquent l’accès à ceux qui auraient aimés déjeuner chez McDonald’s ce midi. Le projet de vente du fast food à un franchisé inquiète les salariés. Les salariés craignent que leurs conditions de travail se dégradent et que les salaires baissent. « Mcdo, Parmentier, on n’est pas à vendre. Respecte tes client.e.s, respecte tes salariés.e.s » peut-on lire sur les banderoles. Ce franchisé s’appelle Michel Parmentier et possède déjà une vingtaine de fast-food dans la capitale.

Avant de sortir drapeaux, banderoles et slogans, les militants se font discrets devant le restaurant. Certains partent jouer au « faux client ». Le principe est simple : un militant fait des commandes sur les bornes, clique sur le paiement en caisse et ne va jamais récupérer sa commande. C’est un moyen pour « mettre le bazar ».

Il suffit d’une vingtaine de personnes pour paralyser le restaurant. Certains bloquent l’entrée avec des grandes banderoles et d’autres invitent les clients à quitter les lieux. Le début de la grève se passe de manière pacifique sans aucune altercation. Seulement quelques adolescents mécontents insultent les manifestants car ils ne peuvent pas satisfaire leur envie de junk food.

Seulement deux grévistes du fast food

Ce sont principalement des syndicats qui militent. Ces syndiqués ne travaillent pas dans ce fast food mais viennent prêter main forte. Certains sont employés dans d’autres McDonald’s en France. Très peu d’employés du fast food des Champs-Elysées sont grévistes. Seulement deux manifestent et ce sont ceux qui font partie des délégués du personnel et qui sont élus au comité d’entreprise. Massamba Dramé, délégué Sud Solidaires, s’époumone dans le mégaphone et essaye de convaincre ses collègues d’arrêter le travail. Mais aucun n’obtempère et les derniers clients qui ont pu rentrer sont servis. « Ils nous soutiennent par la pensée mais ils ne peuvent pas s’arrêter. Ils gagnent trop peu d’argent pour se permettre de perdre une ou deux heures de travail. Certains sont dans des situations financières délicates » explique Youssef, militant CGT. Mouhamadou est le second employé du fast food qui fait grève. Il est en colère contre la direction. « On a un double discours. La direction dit que c’est un projet top secret et ensuite les managers viennent voir un par un les employés pour leur expliquer que tout va bien se passer, pour les manipuler. On veut un dialogue, mais la direction refuse de discuter avec nous » dit-il, exaspéré.

Massamba Dramé, délégué du personnel, use de son mégaphone pour inciter ses collègues à le rejoindre dans la grève. Crédit : Alice Pattyn
Massamba Dramé, délégué du personnel, use de son mégaphone pour inciter ses collègues à le rejoindre dans la grève. Crédit : Alice Pattyn

La direction assure à ses employés qu’ils seront conservés lors de la vente et qu’aucune diminution de salaire ne sera effective. D’après les syndicats, des scénarios semblables ne se sont pas passés ainsi. « Cette situation s’est déjà appliquée à celui d’Opéra il y a trois ans. Les salaires ont baissé de 23% et désormais, ils ne sont plus que quatre. Mr Parmentier place ses équipes et vire ceux qui étaient sur place » nous indique Raphaël Millon, militant du syndicat Sud Solidaires.

Une employée qui n’a pas souhaité nous communiquer son identité indique qu’elle gagne 950 euros par mois pour 30 heures de travail par semaine. Si une baisse de 23% s’applique sur son salaire, elle ne gagnera plus que 731,50 euros. Un manque à gagner de plus de 200 euros.

Pas de dialogue entre salariés et direction

Après plus de deux heures de blocage, aucun dialogue n’est en cours entre les grévistes, les salariés et la direction. Un grand tableau de conférence est installé sur le trottoir devant le McDonald’s pour que les passants puissent signer une pétition. Des tracts en anglais, japonais, chinois, arabe et français sont distribués aux touristes interloqués. L’enseigne perd plusieurs milliers d’euros pendant cette manifestation qui se déroule durant la pause déjeuner du mercredi, un moment-clé de la semaine.

Des passants s'arrêtent pour signer la pétition et exprimer leur soutien. Crédit : Alice Pattyn
Des passants s’arrêtent pour signer la pétition et exprimer leur soutien. Crédit : Alice Pattyn

Les directeurs et managers sur place ne font aucun commentaire. Ils attendent que les militants partent. La compagnie ne communique pas sur cet événement. Impossible de connaître les réelles raisons de la vente du McDonald’s qui fait le plus gros chiffre d’affaires en Europe. Les syndicats émettent une hypothèse : depuis l’élection d’une nouvelle organisation syndicale en juin dernier, McDonald’s souhaiterait se débarrasser de ceux qui s’opposeraient à la direction. En vendant le restaurant à un franchisé, la compagnie ne gère plus la masse salariale et donc les syndicats.

Les grévistes souhaitent une chose : que le fast food ne soit pas franchisé. Mais sa vente devrait être actée le 19 octobre pour une reprise annoncée le 1er décembre, selon les syndicats.

Alice Pattyn

Les agriculteurs mobilisés à Paris pour demander une rémunération juste

300 agriculteurs venus de toute la France se sont rassemblés à l’appel de la FNSEA, premier syndicat agricole, ce mercredi place de la République à Paris. Ils souhaitent attirer l’attention des consommateurs sur la rémunération de leur production. Un évènement qui intervient avant les annonces d’Emmanuel Macron pour le monde agricole.

Des vaches sont présentes place de la République à Paris pour interpeller sur la rémunération des éleveurs. Crédit: Chloé Tixier
Des vaches sont présentes place de la République à Paris pour interpeller sur la rémunération des éleveurs. Crédit: Chloé Tixier

« 1,20 euros les six oeufs, 1,20 euros ! «  Marie-Françoise, agricultrice dans la Somme, s‘époumone pour attirer les consommateurs parisiens à son stand. À ce prix-là, ils sont nombreux à acheter des boîtes d’œufs. Félix, un habitant du quartier, est étonné du coût. « Je paye quasiment deux euros les miens, c’est inadmissible. Là ils sont frais, ça se voit. Quand on sort du boulot on ne se prend pas la tête on va au supermarché du coin. Mais en voyant ce que je viens de payer là on se rend compte qu’on se fait bien avoir d’habitude. »

Sensibiliser les consommateurs au juste prix, c’est l’objectif des agriculteurs présents ce mercredi place de la République. Un rassemblement qui précède le discours d’Emmanuel Macron à Rungis mercredi soir. Il doit mettre fin au premier chantier des États généraux de l’alimentation consacrés à la création et à la répartition de la valeur au sein de la filière agroalimentaire. Douze régions ont décidé de se mobiliser pour défendre la diversité et la qualité des produits français.

Marie-Françoise est ici pour mettre en avant sa production. Elle produit du lait, élève des bovins et fait de la polyculture (pommes de terre, betteraves) sur 220 hectares. Aujourd’hui, elle ne s’y retrouve plus. « Sur un litre de lait, je ne gagne que 24 centimes. Il me faudrait 10 centimes de plus pour que je puisse couvrir mes coûts comme l’alimentation des bovins notamment. Les producteurs doivent être rémunérés au juste prix. Les industriels prennent 33 centimes ! Ils nous écrasent », souffle-t-elle. Les agriculteurs souhaitent reprendre la main sur la construction des prix et ne plus laisser les distributeurs et industriels imposer leur loi. Ils veulent fixer les prix à partir de leur coût de revient sur lequel les distributeurs appliquent leurs marges.

 

Les producteurs de lait se sont rassemblés place de la République à Paris pour interpeller sur leur rémunération. Sur une bouteille de lait à 0,77 centimes, 0,24 centimes revient aux éleveurs. Crédit: Chloé Tixier
Les producteurs de lait se sont rassemblés place de la République à Paris pour interpeller sur leur rémunération. Sur une bouteille de lait à 0,77 centimes, 0,24 centimes revient aux éleveurs. Crédit : Chloé Tixier

 

Corinne, Parisienne, est venue avec sa cousine agricultrice. Devant les cagettes de pommes de terre, elle reste stupéfaite. « Je n’en reviens pas, je paye plus de deux euros d’habitude ». Ici, le kilo de pommes de terre comme la « Charlotte » est vendu 1,20 euros. « Vous savez combien elle coûte à produire? Trente centimes environ », lui rétorque Romain Cintrat, producteur de pommes de terre dans l’Aisne. « Le kilo de pommes de terre me coûte entre 15 et 20 centimes, explique-t-il. En supermarché les consommateurs le payent entre 1,40 et 1,50 euros. Or la vente ne me rapporte que 25 centimes. Le reste revient aux industriels », s’agace-t-il. Cette décomposition du prix étonne Corinne. « Je ne me rendais pas compte à quel point les agriculteurs gagnaient peu. C’est scandaleusement bas pour eux, déclare-t-elle. On se moque de nous mais quand on travaille toute la journée on n’a pas le temps et on va au plus simple, quitte à payer très cher quelque chose qui n’est pas de bonne qualité ».

Deux euros le kilo de poireaux, 1,50 euros un chou-fleur… Au stand de la région Normandie, les consommateurs viennent faire leur marché. « C’est 40 à 50 centimes moins cher que ce que je paye habituellement donc ça vaut le coup, estime Claudine, retraitée. Je vais pouvoir acheter des légumes de qualité à des prix raisonnables, c’est très rare à Paris. Je savais qu’il y avait un écart de prix entre acheter dans un supermarché et directement au producteur mais je ne pensais pas autant. Quand je vois une salade batavia à 50 centimes c’est incroyable tellement le prix est faible ». Aux supermarchés du coin, une batavia coûte 1,39 à 1,60 euros, soit un écart allant jusqu’à plus d’un euro. Le producteur, lui, a besoin de vendre sa salade 50 centimes pour se rémunérer et payer les charges : salaires, taxes, investissements…

 

Au stand de la région Normandie, il est possible d'acheter un kilos de poireaux pour 2 euros. Crédit: Chloé Tixier
Au stand de la région Normandie, il est possible d’acheter un kilos de poireaux pour 2 euros. Crédit: Chloé Tixier

Pour Anne-Marie Denis, agricultrice en Normandie depuis 24 ans, quelques centimes de plus au prix d’achat peuvent faire toute la différence. « Pour un camembert au lait cru vendu 3,4 euros à Paris, il faudrait juste le vendre dix centimes de plus pour qu’on s’y retrouve. Il faut deux à 2,3 litres de lait pour faire un camembert or le lait on le vend soixante centimes. Soit on fait payer un peu plus aux ménages, soit on arrive à mettre la pression sur les industriels ». En attendant, elle a dû diversifier son activité. Elle tient désormais une chambre d’hôtes qui lui permet de vivre avec 900 euros par mois. Selon la Mutualité sociale agricole, 30% des exploitants auraient un revenu inférieur à 350 euros par mois. Le revenu moyen en 2016 d’un agriculteur était entre 1083 et 1250 euros par mois. « J’ai mis plus de trois mois à chercher une nouvelle voiture pour trouver la moins chère possible, glisse-t-elle. J’aime mon métier, j’en suis fière mais il faut pouvoir en vivre ».

Chloé Tixier

Grève des fonctionnaires : les Ultramarins craignent pour leurs congés bonifiés

Les manifestants protestent devant Bercy contre les critères plus en plus difficiles à remplir pour bénéficier des congés payés
Les manifestants protestent devant Bercy contre les critères plus en plus difficiles à remplir pour bénéficier des congés payés. Crédit Photo : S. Spautz

« Respect ! Respect ! Égalité des droits ! » crient les manifestants réunis devant le ministère de l’Economie et des Finances. Sous les drapeaux rouges de la CGT, ces fonctionnaires nés dans les départements d’outre-mer (DOM) protestent contre les restrictions qui touchent les congés bonifiés auxquels ils ont droit.

 

 

Accordés en 1978, les congés bonifiés permettent aux ultramarins de rentrer chez eux une fois tous les 3 ans, afin de voir leur famille. Ils sont dit « bonifiés » car 30 jours sont accordés en plus des 5 semaines de congés payés dont tout fonctionnaire bénéficie. Mais les conditions pour les obtenir se sont durcies au fur et à mesure des années. Dès 1981, un avis du Conseil d’Etat précise les critères à remplir pour pouvoir les obtenir. Il faut par exemple être titulaire de comptes bancaires ou d’épargne sur le territoire d’outre-mer où ils passent leurs vacances, payer certains impôts dans la commune où ils résident, ou encore y être inscrit sur les listes électorales.

« Lorsque j’ai voulu partir cette année, on m’a demandé en plus des papiers habituels l’acte de naissance de mes parents » précise Maryse Romain, originaire de Guadeloupe, qui travaille dans la fonction publique territoriale depuis 15 ans. « Je l’ai ressenti comme un rejet, c’est déjà suffisamment énervant de devoir se justifier en donnant autant de documents, alors que pour moi les congés bonifiés sont un dû ». Pour Casimir Largent, représentant syndical CGT du collectif DOM, il y a une raison à ce durcissement : « On demande aujourd’hui trop de critères pour pouvoir justement les refuser. Et donc les gens qui partaient avant en congés bonifiés ne partent plus. »

Si les manifestants ont choisi de se rassembler devant Bercy, c’est dans l’espoir d’avoir un entretien avec le cabinet du ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin. Le but est d’obtenir de lui une garantie du droit aux congés bonifiés. Car même lorsque tous les critères sont remplis pour en bénéficier, les restrictions budgétaires sont souvent une raison invoquée pour les refuser. Quant à ceux qui prétendent que ces congés sont des vacances sous les tropiques tout frais payées, Jean-Claude Raquil, répond « c’est surtout un droit, celui de voir nos familles tous les 3 ans ».

Sarafina Spautz

 

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Les fonctionnaires de santé dénoncent des « conditions de travail intenables »

Baisse des effectifs, blocage des salaires, regroupement des hôpitaux : les soignants se sont rassemblés ce mardi 10 octobre pour protester contre les mesures gouvernementales sur la fonction publique. Pour la première fois depuis une dizaine d’années, l’ensemble des syndicats de la santé ont marché côte à côte.

« On veut des sous et du personnel ! », lance Catherine, puéricultrice à l’hôpital Necker à Paris. « Nos conditions de travail sont devenues intenables, nous travaillons trop souvent sur nos jours de repos », ajoute Johanna, sa collègue. En grève, elles sont venues toutes les deux manifester ce mardi 10 octobre contre les mesures annoncées par le gouvernement. Pour la première fois depuis la loi Bachelot en 2009, une dizaine de syndicats de praticiens hospitaliers s’unissent pour battre le pavé ensemble.

« Mon salaire n’a pas bougé depuis dix ans »

Aux alentours de 14 heures, la place de la République se remplit doucement. Les blouses blanches se rassemblent, sortent les pancartes d’un camion à l’effigie du syndicat Sud Solidaires. Sur l’une d’entre elles est inscrit, en lettres capitales, « L’hôpital n’est pas une entreprise ». Patrick, 55 ans, distribue les tracts aux passants. « C’est pour les générations futures que je suis là aujourd’hui, lâche cet agent logistique. Les salaires sont bloqués, les CDD ne sont pas titularisés… Entrer dans la fonction publique aujourd’hui, c’est devenu tellement plus compliqué ».

Patrick, 55 ans, agent logistique, tracte sur la place de la République avant le début de la manifestation. (L.D)

Patrick pointe du doigt les plans d’austérité successifs, le regroupement des hôpitaux qui « signe la mort de l’hôpital de proximité ». Il engage la conversation dès qu’il le peut avec les passants, aux abords de la place. « Les horaires de travail ne sont plus respectés. Mon salaire n’a pas augmenté depuis dix ans. Nous ne sommes pas responsables de la dette, que le gouvernement aille chercher l’argent ailleurs », poursuit Patrick.

La crainte de la privatisation

Médecins, pharmaciens, dentistes, personnels paramédicaux et employés administratifs sont présents dans le cortège. Tous sont concernés par le gel du point d’indice et le rétablissement du jour de carence qui n’indemnise plus le premier jour de congé maladie. Les soignants s’inquiètent d’une baisse de leur pouvoir d’achat, mais ils sont nombreux à demander, en priorité, des conditions de travail décentes. « Nous voulons dire stop à la baisse des effectifs et à la privatisation de la santé. La question des salaires est importante mais elle reste secondaire », estime Marie-Christine, ancienne cadre de santé à Meaux et déléguée syndicale des fonctionnaires autonomes (FGAF).

L’hôpital dans lequel elle travaillait, à Meaux, est déjà en fusion avec d’autres établissements de santé. « On en voit déjà les effets, assure Marie-Christine. Au mois d’août, 40 postes d’ASH (assistantes de soin, NDLR) ont été supprimés. Le gouvernement compte sur notre bonne volonté. Ce n’est plus tenable. »

Parmi les soignants qui manifestent, le secteur public, davantage représenté, n’est pas seul. « Une convergence des revendications est possible avec le privé, mais n’oublions pas qu’ils n’ont ni les mêmes moyens, ni les mêmes salaires », commente Catherine.

 

Léa DUPERRIN