Les chantiers de la justice en cinq grands axes

Lundi le Premier ministre, Edouard Philippe et la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, ont rencontré le personnel du palais de justice de Reims. Ils en ont profité pour dévoiler les grands axes de la réforme de la justice, cinq mois après son lancement. La loi de programmation devrait être présentée en conseil des ministres le 11 avril, selon lemonde.fr. Voici ce qu’il faut retenir.

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  • Simplification de la procédure pénale

Alourdie par des procédures parfois trop complexes, la procédure pénale, sera donc simplifiée pour faciliter l’accès à la justice. Dans un premier temps avec la mise en place d’un dossier numérique uniquepermettant le dépôt de plaintes en ligne, il sera ouvert à tous les acteurs (policiers, avocats, magistrats, justiciables), de la plainte jusqu’au jugement. La constitution de la partie civile sera également facilitée. Le but étant de supprimer les formalités inutiles et redondantes pour rendre les enquêtes plus efficaces et de « permettre une réponse pénale efficace et rapide tout en respectant les droits et garanties fondamentales », explique le ministère de la Justice.

  • Simplification de la procédure civile

Il s’agira avant tout de simplifier la saisie des juridictions, en mettant en place un acte unique, en lieu et place des cinq modes actuels. Le tout pour assurer une meilleure lisibilité de l’avancement des procédures, et améliorer les délais de traitement.

  • Transformation numérique

Ce plan de transformation numérique devra atteindre les trois objectifs. Qui sont, selon le ministère de la Justice : « L’adaptation et la mise à niveau du socle technique, le développement applicatif au service des métiers, le soutien aux utilisateurs et la conduite du changement. Pour y parvenir, des efforts importants ont été engagés : plus de 530 millions d’euros sur cinq ans. »

  • Efficacité des peines

Partant du constat de l’inefficacité du système d’exécution des peines, le ministère de la Justice entreprend de redonner du sens à la peine et de renforcer son efficacité, notamment en évitant les courtes peines ou en en développant les peines autonomes et alternatives. Cette nouvelle politique des peines coïncidera avec la mise en œuvre d’un programme pour lutter contre la surpopulation carcérale, qui peut atteindre les 140 % dans les maisons d’arrêt.

  • Adaptation de l’organisation judiciaire

Conséquence directe des autres chantiers, l’adaptation de l’organisation judiciaire est nécessaire. Du point de vue de la justice de première instance, les tribunaux de grande instance et les tribunaux d’instance seront fusionnés, afin d’améliorer la qualité et l’efficacité de la justice. En appel, aucune réorganisation territoriale n’est à noter.

« Cette réforme se veut extrêmement ambitieuse (tribunal criminel départemental,  parquet national anti-terrorisme, etc…) mais aussi pragmatique. Les propositions émanent directement des acteurs du terrain»,  souligne la garde des Sceaux, Nicole Belloubet.

 

Nina Gambin

Assassinat d’un policier et de sa compagne à Magnanville : six personnes interpellées

Six personnes ont été interpellées lundi matin dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat de deux policiers par un jihadiste dans leur pavillon de Magnanville en juin 2016. 

Crédit : CC
Crédit : CC

 

Trois femmes et trois hommes ont été placés en garde à vue lundi matin dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat des deux policiers à Magnanville en juin 2016. Les six personnes ont été interpellées à Versailles sur commission rogatoire d’un juge d’instruction. Les investigations visent à préciser le rôle que ces personnes ont pu jouer dans la commission des faits selon une source proche du dossier.

Une policière et sa fille arrêtées

Une policière, major de police des Yvelines et ancienne déléguée départementale du syndicat Alliance, fait partie des personnes placées en garde à vue. Mais les enquêteurs s’intéressent surtout à sa fille, également placée en garde à vue et présentée comme radicalisée.« Je la connais, je la vois mal tomber là-dedans, je tomberais des nues », a réagi auprès de l’AFP Frédéric Lagache, secrétaire général adjoint d’Alliance. Selon lui, la policière avait démissionné de ses fonctions pour ne pas entacher l’image du syndicat, après la révélation en interne d’une perquisition diligentée à son domicile car elle avait hébergé une femme fichée S. à une date non précisée.

Un deuxième homme ?

Trois hommes sont déjà mis en examen dans cette enquête. Les deux premiers avaient été vite identifiés. Condamnés en 2013 aux côtés d’Abballa dans une filière afghano-pakistanaise de recrutement au jihad, Charaf Din Aberouz, 31 ans, et Saad Rajraji, 28 ans, sont soupçonnés d’avoir pu apporter un soutien logistique. Mais les enquêteurs ne retenant pas leur complicité directe dans l’attaque, ils ont finalement été relâchés sous contrôle judiciaire.

En revanche, ils pensent avoir identifié un possible deuxième homme en la personne de Mohamed Aberouz, 24 ans. Ce frère cadet de Charaf Din a été mis en examen le 11 décembre pour « complicité d’assassinats terroristes » et incarcéré. Entendu une première fois en avril 2017 en garde à vue, Mohamed Aberouz, 24 ans, était ressorti libre, faute de preuves. Mais à la fin de l’été, les policiers avaient fait le rapprochement entre son profil génétique et l’ADN retrouvé « sur le repose-poignet droit de l’ordinateur » du couple.Mohamed Aberouz, qui reconnaît son amitié avec Abballa mais clame son innocence, est devenu peu à peu aux yeux des enquêteurs le « mentor religieux » du jihadiste et le « co-auteur et inspirateur » de son acte, selon une synthèse de la Sous-direction antiterroriste (Sdat) dont l’AFP a eu connaissance. Mohamed Aberouz leur a assuré que le jour de l’attentat, « il n’avait quitté son domicile que pour se rendre à la mosquée aux heures de prière », en plein Ramadan. « La preuve ADN n’est pas infaillible« , estiment ses avocats Mes Vincent Brengarth et Bruno Vinay, qui ont demandé une nouvelle expertise.

Le 13 juin 2016, Jean-Baptiste Salvaing et Jessica Schneider avaient été assassinés chez eux, sous les yeux de leur petit garçon de 3 ans et demi, par Larossi Abballa, un homme se revendiquant de Daech. Le tueur avait été abattu par le Raid.

 

AFP et Caroline Baudry

 

 

Affaire Merah : Pourquoi le procès n’est-il pas filmé ?

Le procès d’Abdelkader Merah (le frère du terroriste auteur de l’attentat de Toulouse en 2012) se tient actuellement à la cour d’Assises spéciale du tribunal de Paris. Extrêmement médiatisé, ce procès relance la question de l’enregistrement vidéo des audiences.

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Le tribunal de Grande instance de Paris, où se tient actuellement le procès d’Abdelkader Merah. (Crédit : CC)

Doit-on filmer et diffuser les procès à la télévision (en direct ou non) ? Cette question n’est plus posée dans certains pays où il est coutume d’enregistrer les audiences dans les tribunaux afin de les retransmettre à la télévision, lorsque celles-ci ne sont pas déjà diffusées en live. Ce fut le cas aux États-Unis durant la surmédiatisée affaire O.J Simpson ou encore en Norvège lorsque le terroriste d’extrême-droite Anders Breivik fut jugé.

En France, la question est épineuse et divise les praticiens du droit. Dans le cadre du procès d’Abdelkader Merah, la famille d’une victime avait déposé une requête afin que les audiences du procès soient filmées, avec comme argument la « portée historique » de l’événement. La réponse est sans appel : la demande est rejeté par le parquet de Paris pour qui l’affaire Merah « ne présente pas un intérêt proprement dit pour les archives historiques de la justice ». Il n’y aura donc pas d’enregistrement vidéo ni audio des audiences du procès.

Les procès peuvent être filmés depuis la loi Badinter de 1985, qui autorise « l’enregistrement audiovisuel ou sonore de l’intégralité des débats ». Peu d’affaires en ont bénéficié mais on peut tout de même citer les procès de Klaus Barbie, Maurice Papon ou encore celui d’un génocidaire rwandais en 2014.

Voir aussi : Procès Merah: les audiences filmées, entre intérêt historique et justice spectacle

Procès filmés: « Le risque est que les terroristes s’en servent comme tribune »

« Une tradition d’opacité »

D’après Me Isabelle Carbuccia, avocate au barreau de Paris et spécialiste du droit international et du droit américain, le refus de filmer les audiences en France est dû à plusieurs facteurs. « Il y a d’abord une contradiction avec la protection des données personnelles ainsi qu’avec le secret de l’instruction », explique-t-elle. « Une fois le procès terminé, le contenu des audiences est publié et même là les noms n’y figurent pas afin de protéger les personnes. Il y a aussi le droit à l’oubli : je me bats très souvent contre des grandes sociétés informatiques, des moteurs de recherches qui continuent d’exploiter des données personnelles ».

Mais l’avocate, qui travaille très souvent aux États-Unis, constate également qu’il y a une « tradition d’opacité » en France : « Aux États-Unis, il y a un objectif de recherche de la vérité basée sur une transparence complète et totale : les gens sont sous serment, et les procès sont régulièrement filmés pour assurer que rien n’est caché. En France, on accepte que les choses restent opaques, il y a une sorte de discrétion « .

Ce « souci d’opacité » conduit notamment à des pratiques dénoncées par certains avocats, comme par exemple la possibilité pour le juge de reformuler des déclarations faites par les personnes présentes dans la salle. Celles-ci seront consignées textuellement par les greffiers selon l’ordre du juge et sont donc susceptibles de ne pas être conformes à la réalité.

Par ailleurs, un avocat ne souhaitant pas être nommé évoque, lors d’un entretien téléphonique, « la nécessité de ne pas apporter trop d’importance à Abdelkader Merah par le biais de l’image ».

L’impossibilité de l’erreur à l’image

Si elle ne se prononce ni pour, ni contre l’enregistrement des procès, Me Carbuccia admet pourtant que cela pourrait amener certaines améliorations : « Il n’y a pas d’erreur possible lorsque vous êtes filmés. Cela éviterait les remarques déplacées ou désagréables de certains juges, les noms d’oiseaux qui peuvent échapper… ». Dans certains pays, rediffusion des procès est une partie intégrante de la vie d’une juge. « Aux États-Unis, les juges sont élus. La télévision est un moyen de faire campagne, il faut s’y montrer. Difficile, dans ces conditions, de refuser la diffusion d’un procès… ».

Pour Lucile S. jeune avocate dans un cabinet parisien qui désire rester anonyme, la télévision ne ferait qu’amplifier le côté « spectaculaire et voyeuriste » que peut parfois avoir un procès. « Je trouve que ce serait trop. Quitte à filmer un procès, autant qu’il soit utile et pas seulement diffusé en continu sans aucun commentaire. Utiliser les images dans des cours au lycée ou au collège pour expliquer le fonctionnement de la justice, ce serait déjà une bonne idée ».

Le parquet de Paris a définitivement mis fin à la question de la captation des audiences dans l’affaire Merah. La cour d’Assises spéciale fait cependant face à une demande bien plus compliquée : certaines personnes des parties civiles ont demandé que la vidéo de la tuerie perpétrée par Mohammed Merah soit diffusée durant le procès dans le but, selon elles, que les images parlent d’elles-mêmes.

Asmaa Boussaha

La France insoumise peine à montrer l’exemple

La France insoumise semble profiter d’un système qu’elle dénonce. Depuis quelques semaines, certains membres du parti de Jean-Luc Mélenchon font couler de l’encre. Entre une porte-parole épinglée par ses dettes impayées, ou encore un logement social occupé illégalement par ses locataires, la France insoumise ne cesse de faire parler d’elle.

Crédit : Wikimédia
Crédit : Wikimédia

Les Insoumis ne se soumettent pas. L’avocate et porte-parole de la France insoumise, Raquel Garrido, dément les révélations publiées mercredi 11 octobre par Le Canard enchaîné. De nouveau épinglée par l’hebdomadaire satirique, l’Insoumise essuierait une dette de 32 215 euros envers sa caisse de retraite, la Caisse nationale des Barreaux français (CNBF), soit l’équivalent de six ans sans versement de sa part. Les avocats libéraux cotisent au RSI pour la protection maladie et à la CNBF pour leur retraite. Selon Le Canard enchaîné, elle « n’a pas déclaré un sou de revenu à l’Urssaf en 2016 ». L’hebdomadaire précise qu’en mars 2016, Raquel Garrido avait fait l’objet d’un rappel de 6113 euros, réitéré sans suite le 28 septembre dernier. Un « acharnement injustifié » selon la proche de Jean-Luc Mélenchon.

L’insoumise nie les accusations

Raquel Garrido affirme, via des SMS envoyés à Franceinfo qu’elle ne doit rien à l’Urssaf.  Jeudi soir, la porte-parole de la France insoumise s’est contentée de renvoyer les médias vers un obscur communiqué de la Caisse nationale des barreaux français, lequel évoque des « informations inexactes ». En allant encore plus loin dans la contestation, Raquel Garrido tente de répondre aux accusations du Canard enchaîné, entre deux éclats de rire, sur le compte Snapchat de Jeremstar. 

Des insoumis occupent toujours leur HLM

Crédit : wikipédia
Crédit : wikipédia

Le site Buzzfeed l’a révélé hier, le couple Alexis Corbière et Raquel Garrido n’a toujours pas quitté son logement social, du XIIe arrondissement parisien, contrairement à ce qu’avait promis le député insoumis. « C’est compliqué de trouver en deux semaines, mais oui, je vais habiter dans ma circonscription. Est-ce que ça aura lieu dans trois, quatre ou cinq mois, je ne peux pas vous dire », assurait-il à L’Obs, en juin dernier. Le couple paye 1200 euros par mois pour l’appartement de 80 m2 qu’il occupe depuis 2003. Alexis Corbière est rémunéré 7142 euros brut par mois, tandis que sa compagne Raquel Garrido, 7000 euros pour ses chroniques chez Thierry Ardisson. Sans compter ses honoraires d’avocate.

Depuis la campagne présidentielle, la France insoumise milite en un sens: transparence de la vie politique, respect des finances publiques… Mais le candidat de « l’extrême finance » Jean-Luc Mélenchon aurait peut-être oublié de garder un oeil sur ses députés. Raquel Garrido doit toujours de l’argent à l’Urssaf. Pas un-sous-mis pour ces insoumis, donc.

Marie Lecoq