Déconfinement : comment va se dérouler le vote à l’Assemblée nationale ?

Le gouvernement présente ce mardi devant l’Assemblée nationale son plan de déconfinement qui doit débuter le 11 mai, alors que le coronavirus a causé la mort de 23 293 personnes depuis le 1er mars. 

L’hémicycle de l’Assemblée Nationale ne sera pas aussi rempli que d’ordinaire. (Paul Salen/Flickr).

Une ambiance étrange pour un moment historique. Alors que le pays vit confiné et au ralenti depuis six semaines, Édouard Philippe présentera ce mardi à 15h, devant un hémicycle quasiment vide, la « stratégie nationale » décidée par le gouvernement. Ce discours devrait permettre aux Français de sortir, au moins partiellement, de chez eux. Le point sur son organisation.

  • Qui sera présent dans l’hémicycle ? 

Pour limiter le risque de contamination, seuls 75 des 577 députés pourront assister au discours d’Edouard Philippe puis voter. Chaque groupe pourra envoyer un nombre maximum de parlementaires proportionnel à son poids sur les bancs de l’Assemblée. La République en marche enverra 40 députés, ses alliés du MoDem et l’UDI-Agir enverront respectivement 5 et 4 membres. Dans les rangs de l’opposition, Les Républicains pourront être 13 tandis que les socialistes et la France Insoumise enverront 4 et 3 parlementaires. Quant aux députés non inscrits, pas assez nombreux pour former un groupe, dans lesquels figurent des élus du Rassemblement national, ils ne pourront envoyer qu’un seul d’entre eux.

  • Quel sera le sujet du vote ?

Ils devront réagir au discours du Premier ministre qui portera sur le plan du gouvernement de déconfinement. Les modalités précises seront établies localement par les élus. Le projet d’application de traçage numérique, StopCovid, sera également évoqué, mais le vote ne portera pas uniquement sur cet outil controversé. Le gouvernement est très attendue sur la question du port obligatoire du masque, la réouverture de certains commerces et des écoles ou encore la politique de dépistage.

  • Comment se déroulera la séance ? 

Après le discours d’Édouard Philippe, les députés pourront intervenir en fonction du poids de leur parti. Les échanges se tiendront pendant 2h30, avec 40 minutes pour LREM, 40 pour LR, 15 pour le MoDem et les socialistes, puis 10 pour l’UDI-Agir, Libertés et Territoires, LFI et les communistes. Un député non inscrit pourra ensuite faire une allocution de 5 minutes.

Le gouvernement aura un temps de réponse, avant le vote en fin d’après-midi. En raison de la situation exceptionnelle les représentants des groupes politiques seront porteurs des voix des membres de leur groupe. Les députés pourront se signaler s’ils ont un avis divergent, s’ils souhaitent s’abstenir ou voter contre alors que la position de leur groupe est différente.

  • Comment suivre les annonces du gouvernement ? 

Le discours d’Édouard Philippe sera retransmis sur les chaînes d’infos en continu (BFMTV, CNews, LCI, franceinfo). M6, France 2 et TF1 proposeront des éditions spéciales dans l’après-midi pour diffuser le discours du premier ministre.

Etienne Bianchi

 

Déconfinement : six Français sur dix ne font pas confiance au gouvernement

Le baromètre politique Odoxa-CGI du mois d’avril sonne l’alarme pour le gouvernement : 62 % des Français n’ont pas confiance en l’exécutif pour réussir le déconfinement prévu le 11 mai prochain.

Selon le baromètre politique Odoxa-CGI, 6 Français sur 10 ne font pas confiance à l’exécutif pour le déconfinement. © Flickr / Philippe Wojazer

C’est probablement l’une des interventions de l’exécutif la plus attendue : le Premier ministre Edouard Philippe s’exprimera ce mardi à 15 heures devant l’Assemblée nationale pour présenter les grandes lignes du plan de déconfinement. Une stratégie censée mettre fin de manière progressive au confinement instauré en France depuis le 17 mars, pour faire face à l’épidémie de Covid-19.

Si le gouvernement devra convaincre les députés qui tiendront un débat, puis un vote, à la suite de sa prise de parole, il faudra aussi se pencher sur l’état d’esprit des Français, pour lesquels la défiance reste de mise.

Selon le baromètre politique Odoxa-CGI, réalisé pour France Inter, l’Express et la Presse Régionale, et publié ce mardi, 62 % des Français n’ont pas confiance en l’exécutif pour réussir le déconfinement prévu le 11 mai prochain. À cela s’ajoutent 65 % d’entre eux qui estiment que le gouvernement n’est pas à la hauteur de la situation depuis le début de la crise.

Un constat nuancé

Emmanuel Macron voit quant à lui sa cote de popularité augmenter avec un bond de neuf points depuis le début de la crise sanitaire, dont quatre uniquement sur le mois d’avril. Un gain que le président doit majoritairement aux partisans PS (+ 9 points ce mois-ci) et LR (+ 17 points).

Le rebond reste toutefois à nuancer puisque 58 % des Français estiment qu’Emmanuel Macron est un « mauvais président ».

Le Premier ministre s’en sort légèrement mieux avec un gain de 11 points depuis le début de la crise. 46 % des Français le considèrent comme populaire, contre 53 % qui le désignent comme « pas bon » dans son rôle.

C’est donc un bilan dressé pour le mois d’avril en demi-teinte sur l’impact de la situation actuelle sur la popularité de l’exécutif, dans l’attente de l’annonce du plan de déconfinement par le Premier ministre.

Dinah Cohen

Mort d’Henri Weber : la gauche rend hommage à une « grande et belle » figure et à un ami

L’ancien sénateur socialiste de Seine-Maritime et député européen Henri Weber est mort du coronavirus à l’âge de 75 ans. Ce lundi 27 avril 2020, au lendemain de sa disparition, sa famille politique lui a rendu hommage. 

Henri Weber est mort du coronavirus à l’âge de 75 ans dimanche 26 avril 2020. Flickr

Figure de Mai 68 puis du trotskisme des années 1960 et 1970, Henri Weber a été membre de la direction du Parti socialiste pendant près de trente ans. Dimanche 26 avril avril 2020, il est mort « des suites du Covid-19, entouré de sa femme, la productrice de cinéma Fabienne Servan-Schreiber, et de leurs filles », a annoncé sa famille dans un communiqué.

De François Hollande à Raphaël Glucksmann en passant par Olivier Faure, Anne Hidalgo ou Martine Aubry, les hommages se sont succédé à gauche.

A l’image de François Hollande, qui a salué dans un communiqué : « Une belle figure de la gauche » qui « ajoutait à son érudition une clarté d’analyse, un goût de l’action et une fraîcheur militante avec un humour joyeux qui enchantait jusqu’à ses contradicteurs. »

Un Fabusien converti

« Henri a été pour moi un ami merveilleux, un compagnon joyeux, courageux et précieux. Attentif, profond, drôle, séduisant, ouvert, érudit, infatigable bretteur et militant, ce rebelle chaleureux et réfléchi aura fréquenté tous les honneurs sans être prisonnier d’aucun », s’est quant à lui ému Laurent Fabius.

Successivement membre du premier cercle de l’actuel président du Conseil constitutionnel lors de son passage à Matignon (1984-1986) puis conseiller technique à la présidence de l’Assemblée nationale lorsqu’il a occupé le perchoir (1988-1992), Henri Weber en était particulièrement proche. Après avoir intégré le PS, en 1986, l’ancien trotskiste a animé le courant fabusien aux côtés de personnalités telles que Claude Bartolone.

« Un métronome »

L’ancien candidat socialiste à l’élection présidentielle Benoît Hamon lui a aussi fait part de sa tristesse sur Twitter évoquant « un métronome ou une plume respectés. »

Un hommage personnel, à l’instar de celui que lui a rendu Manuel Valls sur le même réseau social :

« Quelle tristesse ce matin..Henri Weber le camarade, le militant, l’intellectuel est parti. Sa personnalité, ses écrits, sa voix unique, sa silhouette, sa gentillesse..vont terriblement nous manquer. Je me rappelle de son bonheur l’été en Provence. Adieu Henri. »

Fils de juifs polonais né en 1944 dans un camps de travail soviétique, Henri Weber était docteur et enseignant en philosophie politique. Il a cofondé les Jeunesses communistes révolutionnaires, en 1965, puis la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) en 1969.

 

Clémentine Piriou

 

 

Plan de déconfinement : la polémique autour du vote des députés en quatre questions

Deux votes distincts – l’un sur le projet d’application StopCovid, l’autre sur le plan de déconfinement – devaient initialement avoir lieu. Des députés issus de l’opposition comme de la majorité demandaient un délai de 24h pour prendre connaissance des propositions du gouvernement avant de voter. Ces deux options ont été écartées.

Il n’y aura finalement qu’un seul débat et un seul vote sur le plan de déconfinement du gouvernement dans sa globalité, ce mardi 28 avril 2020. Flickr

Réouverture des écoles, port du masque de protection, application de traçage… Autant de sujets que devrait aborder Edouard Philippe, ce mardi 28 avril 2020. A 15h, le Premier ministre présentera le plan de déconfinement du gouvernement aux députés à mettre en place le 11 mai.

Si sa déclaration sera finalement suivie non seulement d’un débat mais aussi d’un vote de l’Assemblée nationale, ce programme parlementaire fait débat.

1. Quel était le programme parlementaire initial ?

Lors de son allocution télévisée du 13 avril dernier, le président de la République, Emmanuel Macron, a exprimé son souhait qu’un débat ait lieu au Parlement sur les techniques de traçage des données de téléphone pour lutter contre le Covid-19.

Initialement, un débat spécifique portant sur le projet d’application StopCovid était prévu en accord avec cette déclaration. Dans un premier temps, il ne devait pas être suivi de vote. Face aux critiques des oppositions de tous bords, le gouvernement a finalement accepté d’en organiser un.

Contrairement au Sénat, à l’Assemblée nationale, deux débats suivis de votes devaient donc avoir lieu. Le 28 avril, les députés devaient s’intéresser à la question du traçage numérique, et en particulier à l’application StopCovid. Ils ne devaient se pencher sur le plan de déconfinement du gouvernement que dans un second temps, le 5 mai.

2. Quel est le nouveau programme de ce mardi 28 avril ?

Dans la soirée de samedi 25 avril, à trois jours du premier débat, le gouvernement est revenu sur ce programme : au lieu des deux débats et des deux votes distincts initialement prévus, il a annoncé la tenue d’un seul débat et d’un unique vote portant sur le plan de déconfinement dans sa globalité, traçage compris.

Quant au vote, l’opposition réclamait qu’il soit organisé dans un délai de 24h après la tenue du débat, afin de bénéficier d’un délai de réflexion. Dans la matinée de lundi 27 avril, la conférence des présidents de groupe de l’Assemblée nationale en a décidé autrement : le vote aura lieu mardi 28 avril, dans la foulée du débat.

Objectif affiché : que les Français soient informés le plus rapidement possible des mesures qui vont s’appliquer.

3. Pourquoi ce programme fait-il polémique ?

La polémique est résumée en ces termes par le député du Maine-et-Loire Matthieu Orphelin, anciennement affilié LREM, sur son site internet : « Les députés ne pourront se prononcer que pour ou contre l’ensemble des mesures de la stratégie de déconfinement et ce, seulement quelques minutes après les avoir découvertes. »

Le programme parlementaire fait polémique pour deux raisons. Il est d’abord reproché au gouvernement d’avoir supprimé le débat spécifique relatif au projet d’application StopCovid. Depuis plusieurs semaines, ce dernier a rencontré l’opposition de certains élus LREM (La République en marche), à l’image du député des Deux-Sèvres Guillaume Chiche. Si bien que les détracteurs du gouvernement le soupçonnent de chercher à cacher les divisions qu’un deuxième débat aurait révélé au sein de la majorité.

« L’ordre du jour AN est bouleversé in extremis. Ce sera un vote unique sur le déconfinement, tracking inclus. Silence exigé dans les rangs LREM! », a par exemple raillé le premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure.

Un soupçon partagé par Jean-Luc Mélenchon, qui a dénoncé une « mise en quarantaine politique » destinée à « faire taire les députés LREM frondeurs » sur Twitter.

Lundi 27 avril, quelques élus de la majorité se sont également joints à ceux de l’opposition pour déplorer que le vote ait lieu dans la foulée du débat.

C’est le cas d’Aurélien Taché qui a dit sur Twitter comprendre « que certains parlementaires demandent le report du vote sur la plan de déconfinement pour prendre connaissance de l’ensemble des mesures qui seront annoncées » alors que « des mesures inédites sont en jeu comme le traçage numérique ».

Le député LRM du Val d’Oise s’est notamment joint au président des députés Les Républicains (LR) à l’Assemblée nationale. Damien Abad a dénoncé « déni de démocratie ».

4. Le gouvernement pouvait-il modifier le programme initial ?

Débat et vote sont organisés sur la base de l’article 50-1 de la Constitution. Cette procédure, introduite en 2008, permet au gouvernement d’associer le Parlement à des choix importants de sa propre initiative. Il peut organiser un débat, et choisir de le conclure par un vote.

Concrètement, à 15h, le Premier ministre fera une déclaration devant l’assemblée. Cette déclaration sera suivie par un débat et un vote symboliques des députés – celui des sénateurs interviendra le 5 mai prochain. Si son report à 24h après le débat ne relevait pas de sa compétence mais de celle de la conférence des présidents de groupe, le gouvernement était parfaitement libre de choisir de n’organiser qu’un vote.

Il ne sera même pas obligé de suivre son résultat, pas plus qu’il n’engagera sa responsabilité – il ne sera pas contraint de démissionner si les députés ne soutiennent pas sa position.

 

Clémentine Piriou