Union syndicale : exceptionnelle mais fragile

Les fonctionnaires, tous syndicats confondus manifestent ce mardi. Une union rare au lendemain d’une réunion intersyndicale au sujet des ordonnances sur le code du travail. Mais cette unité pourrait vite voler en éclats.

Du jamais vu depuis 10 ans. L’ensemble des syndicats de fonctionnaires ont appelé à faire grève ce mardi. Ils dénoncent les mesures du gouvernement telles que la suppression de 120 000 postes sur cinq ans, le gel des salaires ou encore la fin du jour de carence. Des réformes « inacceptables » aux yeux des confédérations selon qui elles « vont impacter fortement le pouvoir d’achat de plus de 5,4 millions d’agents publics ». L’ensemble des organisations syndicales se réunissaient aussi hier, une première depuis l’élection d’Emmanuel Macron, afin de trouver un accord sur l’opposition aux ordonnances.

Une unité rare

Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force Ouvrière (FO), Philippe Martinez, secrétaire général de la Confédération Générale des Travailleurs (CGT) et Laurent Berger, patron de la Confédération Française Démocrative du Travail (CFDT) ont tenté hier d’élaborer une stratégie commune pour lutter contre les ordonnances. La réunion a été infructueuse, mais tous devraient de nouveau se rencontrer dans les prochaines semaines. Cette tentative pour s’entendre, ainsi que la manifestation des fonctionnaires mardi 9 octobre, sont des événements rares. Pour les employés de la fonction publique cela n’était pas arrivé depuis dix ans et l’annonce de coupes budgétaires dans la fonction publique décidées par le gouvernement Fillon. Et l’opposition de l’ensemble des syndicats au gouvernement, toutes catégories confondues, date de 2010 lors de la mobilisation contre la réforme des retraites de Nicolas Sarkozy.

Concernant les fonctionnaires, l’union a été permise grâce à l’opposition à la Cotisation Sociale Généralisée (CSG), selon Stéphane Sirot, historien spécialiste des conflits sociaux et du syndicalisme. Une « unité très ponctuelle, qui repose uniquement sur un accord autour de la CSG », estime-t-il. Ce serait également l’accumulation de mesures mal perçues par les fonctionnaires qui en serait la cause : « les annonces du gouvernement défavorables aux fonctionnaires [NDLR le gel des salaires et la suppression de postes ] associées à la politique budgétaire qui apparaît être favorable aux plus favorisés. Tout cela a créé une  »obligation d’agir » au sein des syndicats », analyse Stéphane Sirot.

Rassemblement motivé par la base des syndicats

Des événements récents au cœur des confédérations ont également provoqué le revirement de certains syndicats qui étaient jusqu’à présent enclins à négocier. Jean-Claude Mailly (FO) a été mis en minorité au sein du comité confédéral national, fin septembre. Cette instance a voté l’appel à la mobilisation pour s’opposer aux ordonnances, contre l’avis de son secrétaire général. A la CDFT, syndicat pourtant dit « réformiste », le mécontentement s’est exprimé le 3 octobre lors du rassemblement de 10 000 militants de la confédération. A cette occasion « les prises de parole ont été très critiques vis-à-vis des ordonnances », juge Stéphane Sirot. « Même des militants qui assument une pratique réformiste considèrent que les choses vont trop loin. Leur confédération avalise des mesures qui sont de plus difficiles à faire comprendre aux adhérents sur le terrain. Car tout le monde perçoit la flexibilité et pas la sécurité des récentes décisions gouvernementales », conclut-il.

Des syndicats divisés sur la forme

Mais l’historien ne croit pas en la pérennité de cette unité syndicale. « Ce n’est qu’une union de façade, en réalité des points de fracture se dessinent », assure-t-il. Les centrales s’opposent sur les moyens à employer pour lutter contre le gouvernement. Quand la CGT souhaite manifester, d’autres comme la CFDT , la CFTC et l’Unsa voudraient toujours favoriser la négociation.

« La raison des divisions vient de la forme même des syndicats. Il y a d’un côté des syndicats de lobbying comme la CFDT et désormais FO . Et de l’autre, un syndicalisme de mobilisation, tel que la CGT. Il y a un décalage entre ces deux formes de syndicalisme qui rend très difficile le rassemblement. »Aux yeux de Stéphane Sirot la grande alliance syndicale autour des ordonnances n’aura pas lieu car « ni Jean-Claude Mailly, ni Laurent Berger ne se mobiliseront dans la rue ». Le secrétaire général de la CFDT a en effet prévenu ses collègues lundi 9 octobre sur RTL, martelant que la lutte « se joue dans l’écriture des décrets aujourd’hui, ça ne se joue pas principalement dans la rue ».

« Le drame c’est qu’aucune des deux formes de syndicalisme ne fonctionne. Cela fait 22 ans qu’un mouvement national n’a pas remporté de victoire », juge l’historien. Pour ce spécialiste, il est donc urgent pour les organisations syndicales de réfléchir à des modalités d’action capables de peser sur les décisions nationales.

Elisa Centis.

Benoît Hamon va fonder son parti politique début décembre

L’ancien candidat socialiste Benoît Hamon annonce qu’il va diffuser, courant octobre, un questionnaire pour « définir sur le fond et sur la forme l’identité » de son futur parti politique. Il doit être fondé au début du mois de décembre.

Benoît Hamon fondera son propre parti politique en décembre. (Chris93)
Benoît Hamon fondera son propre parti politique en décembre. (Chris93)

Dans une vidéo postée sur son compte Facebook, Benoît Hamon invite tout son entourage politique à « un grand moment citoyen de fondation de ce mouvement du 1er juillet ». De la même manière que La république en Marche, la France Insoumise et plus récemment les Patriotes, le mouvement affirme vouloir dépasser la forme du traditionnel parti.

Rassembleur de la gauche

Après une campagne présidentielle difficile (6,28% au premier tour), Benoît Hamon avait été éliminé dès le premier tour aux dernières élections législatives. Il avait finalement décidé de quitter le Parti Socialiste (PS), pour créer sa propre organisation baptisée « mouvement du 1er juillet ».

Cette décision intervient peu de temps après l’annonce de Benoît Hamon d’une alliance avec les élus socialistes et écologistes au Conseil Régional d’Ile-de-France. Ils forment désormais un nouveau groupe de 23 élus, et visent à « renforcer l’opposition de gauche à Valérie Pécresse, en cohérence avec les combats menés ensemble ces dernières années ».

D’ici là, Benoît Hamon enchaîne les rendez-vous. Jeudi, il dîne avec l’ancien ministre grec des Finances Yanis Varoufakis. Début novembre, il doit rencontrer des universitaires et économistes au Texas, à l’invitation d’un proche de Bernie Sanders.

 

Léa Duperrin

Le Premier ministre maintient le cap malgré les critiques

La semaine s’annonce chargée pour le gouvernement: manifestation des fonctionnaires, union des syndicats contre les ordonnances, débat sur le budget 2018. Face aux différents fronts, le Premier ministre prévient qu’il ne pliera pas.

En avant toute. A l’approche de la manifestation des fonctionnaires et de la réunion des syndicats contre les ordonnances sur le code du travail, rien ne semble perturber l’exécutif. Edouard Philippe continue à défendre le projet de loi de finances 2018 qualifié « d’injuste » par certains observateurs.

  • Il persiste sur la hausse de la CSG pour tous

Le Premier ministre persiste notamment sur l’augmentation de la Cotisation Sociale Généralisée (CSG) pour toutes les catégories de population, y compris les fonctionnaires. Une source d’inquiétude pour ceux qui seront dans la rue mardi 10 octobre. Contrairement aux employés du privé, ils ne devraient pas voir augmenter, en contrepartie, leurs salaires. Mais ce n’est pas l’unique raison du mécontentement. Les enseignants, infirmiers, policiers défilent principalement contre la multiplication de mesures qu’ils jugent « inacceptables ». Ils pointent la suppression de 120 000 postes en cinq ans, les rémunérations gelées mais aussi la suppression du jour de carence.

Concernant la CSG, le Premier ministre a garanti qu’elle serait « neutre » pour les fonctionnaires. Ceux qui paient des cotisations devraient voir leur contribution baisser. Quant aux autres, ils devraient recevoir le « versement d’une prime« , précise-t-il. Il a également souhaité rassurer les fonctionnaires qui dénoncent collectivement les dégradations de leurs conditions de travail. Ils « ne sont pas du tout déconsidérés » et demeurent « essentiels dans le fonctionnement de notre pays », a-t-il ajouté. En dépit de ces remarques, il affirme assumer « pleinement les mesures qui ont été prises ».

  • Le gouvernement maintient sa décision sur la baisse de l’ISF

Le Premier ministre a également soutenu l’une des mesures du budget 2018 : la réforme de l’Impôt Sur la Fortune (ISF). Ce pan du projet de loi de finances 2018 a soulevé de nombreuses critiques, dont celle de l’ancien ministre de l’Economie de François Hollande, Michel Sapin. Il juge ce budget favorable « non pas aux riches » mais « aux très, très riches », sur LCI ce lundi. Une attaque injustifiée pour Edouard Philippe soulignant que « le transfert de pouvoir d’achat qui va être réalisé vers les actifs n’a pas d’équivalent ».

https://twitter.com/Europe1/status/917274056071643137

Le chef du gouvernement défend la stratégie d’Emmanuel Macron. Pour le chef de l’Etat, cette politique devrait permettre de réinjecter de l’argent dans l’économie et de créer à terme de la richesse pour tous. « C’est un pari si vous voulez », a lancé Edouard Philippe au micro d’Europe 1. « Nous avons tout à gagner à faire en sorte que l’argent s’investisse en France dans les petites entreprises en France et dans les entreprises moyennes ».

Un amendement devrait tout de même être déposé pour taxer les yachts. Des produits de luxe qui ont particulièrement enflammé la critique sur les réseaux sociaux. Le patron du groupe La République En Marche à l’Assemblée, Richard Ferrand, présentera lui-même un amendement qui vise à taxer les propriétaires de bateaux de plus de 30 mètres.

  • Les réformes sociales ne sont pas encore au calendrier

Le prochain chantier du gouvernement devrait être la réforme de l’Unédic, organisme responsable de l’assurance-chômage. C’est une mesure phare du candidat à la présidentielle, Emmanuel Macron, qui devait être le gage social de sa politique de l’emploi. Cette réforme devrait assurer tant les indépendants et les démissionnaires que les personnes licenciées. Cette réforme incarne la flexi-sécurité car elle garantit à chacun un gilet de sauvetage pour tous ceux qui se retrouvent soudainement sans emploi.

Mais une telle ambition pourrait être revue à la baisse. Selon Les Echos, cette mesure pourrait coûter très cher à l’Etat : de 8 à 14 milliards d’euros la première année, puis de 3 à 5 milliards d’euros les années suivantes. Pour l’heure, l’objectif du gouvernement est de faire des économies. Il n’est donc pas sûr qu’Emmanuel Macron autorise un tel projet. Pour réduire le coût de la réforme, le gouvernement pourrait décider d’échelonner la baisse des indemnités chômage ou encore de revoir le montant des allocations versées.

 

Elisa Centis

5 questions à Aminata Niakaté, candidate écologiste dans la 9e circonscription des Hauts-de-Seine

Cette jeune avocate est la candidate d’Europe Ecologie Les Verts (EELV) dans la 9e circonscription des Hauts-de-Seine. Si son nom ne vous disait rien avant les législatives, c’est normal, Aminata Niakaté vient de Vitry-sur-Seine. Rencontre pour comprendre ce qui l’a poussée à se présenter.

Aminata Niakaté (à droite) est la candidate EELV sur la 9e circonscription des Hauts-de-Seine avec pour suppléant David Gau (à gauche). Crédit: Chloé Tixier
Aminata Niakaté (à droite) est la candidate EELV sur la 9e circonscription des Hauts-de-Seine avec pour suppléant David Gau (à gauche). Crédit: Chloé Tixier

D’où vient votre engagement écologique ?

Etant originaire du Mali je me sens concernée par cette problématique. Là-bas il y a la pollution des plastiques, j’ai vu des fermiers faire faillite parce que de gros industriels du secteur agroalimentaire sont venus s’y installer, ce qui les a ruinés. Je suis donc très sensible à ce genre de sujet. Et de manière générale, les questions de santé publique, le non-gaspillage et le commerce équitable sont des thèmes qui me touchent particulièrement.

Pourquoi Europe Ecologie Les Verts ?

J’ai toujours voulu m’engager en politique pour pouvoir participer aux décisions qui vont régir ma vie, je ne voulais pas seulement être spectatrice. J’ai décidé de m’engager en 2009, juste après les européennes, car je me suis rendue compte que les écologistes ce n’est pas que l’environnement, c’est aussi les questions d’égalité, auxquelles je suis sensible, et l’idée de faire de la politique autrement. Ce sont ces principes là qui m’ont fait franchir le pas et m’engager politiquement chez EELV.

Pourquoi être candidate à Boulogne-Billancourt alors que vous venez de Vitry-sur-Seine ?

C’est vrai que ce n’est pas du tout mon territoire mais les militants avaient besoin d’une candidate, ils m’ont sollicitée et j’ai accepté d’y être la porte-parole des écologistes. De toute façon, je n’avais pas vocation à l’être sur mon territoire puisque qu’EELV a décidé de soutenir le candidat socialiste. Et comme l’enjeu est national, peu importe que je sois d’ici ou d’ailleurs, le programme porté est le même pour tous les candidats écologistes. On pourrait croire que ça dérangerait les gens mais au final, quand on va leur parler, on a plutôt un bon accueil.

Pensez-vous que vous avez une chance dans cette circonscription ancrée à droite ?

Ah c’est sûr qu’en venant ici je savais que c’était une terre de mission. Mais en même temps, le contexte est aussi compliqué pour la droite, puisqu’il y a deux candidats LR-UDI. En plus il n’y a pas de candidat En Marche. Quant au PS il soutient l’Union des Démocrates et des Ecologistes (UDE) mais de loin, donc on a une chance. Après, moi je suis une optimiste incorrigible. Ce qui ne veut pas dire que j’ai peur de l’échec. Car même si on ne remporte pas les élections, on sait qu’on progresse dans le débat d’idées, que la société devient de plus en plus sensible aux questions écologiques. Et si je suis venue faire campagne ici c’est aussi pour faire avancer ce débat là.

Comment vous imaginez-vous la vie en tant que députée ?

Alors je me suis toujours dit « si t’y vas, il faut que t’aie ton gagne pain à côté». Pourquoi ? Eh bien tout simplement parce que j’ai vu des gens changer au fur est à mesure des années parce que c’était devenu un enjeu financier et alimentaire de garder son mandat. Or, à partir de ce moment là, l’engagement passe au second plan. Donc je tiens à rester avocate malgré tout.

Sarafina SPAUTZ

A lire aussi:

A Boulogne-Billancourt, retour de la guerre Solère-Baguet

Législatives dans la 9e circonscription: Bruno Ricard, chantre de la cause animale