Près de la gare Saint-Lazare, un cheminot meurt percuté par un train

Crédits : Charly TRIBALLEAU / AFP
Crédits : Charly TRIBALLEAU / AFP

L’employé de la SNCF, en service au moment du drame, est décédé mercredi soir à l’âge de 55 ans. Une enquête judiciaire a été ouverte. 

Un cheminot en service a perdu la vie mercredi soir. Cet agent de signalisation et responsable de travaux a été « heurté par un train » près de la gare Saint-Lazare peu après 22h30, a annoncé un porte-parole de la SNCF. Il avait 55 ans.

Les pompiers de Paris qui sont intervenus après le drame ont donné plus de précisions. Le corps de la victime a été retrouvé sur le bord des voies ferrées, à Pont-Cardinet, à la suite d’un choc avec un train Transilien de la ligne J. Une zone « extrêmement dense » où la vitesse des trains est « élevée », selon un aiguilleur de la gare Saint-Lazare. Une enquête judiciaire est déjà en cours et une autre, interne cette fois, a été demandée par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

Pas un évènement isolé

Ce drame survient après le décès dans la nuit de mardi à mercredi de deux ouvriers d’une entreprise privée sous-traitante de la SNCF, qui effectuaient des travaux sur une voie ferrée dans les Hautes-Pyrénées. Deux autres personnes avaient été grièvement blessés dans une collision entre des engins de chantier à Péré, entre Montréjeau et Tarbes.

La réaction des syndicats ne s’est pas faite attendre. En conflit avec avec la direction depuis de nombreux mois, la CGT-Cheminots dénonce, par la voix de son porte-parole Laurent Brun, « les conditions de plus en plus précaires du travail, notamment en région parisienne. » Ce dernier a également déploré que le risque ferroviaire ait été « négligé ces dernières années pour cause de productivité. »

L.M

Pour devenir riche grâce à la téléréalité, mieux vaut miser sur Les Marseillais que sur L’Amour est dans le pré

Le salaire versé aux candidats varie grandement en fonction des émissions de téléréalité.

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Onze célibataires enfermés dans un loft et filmés 24h/24 par des caméras infrarouges. Dès son lancement, le concept sulfureux et voyeur du Loft, considéré comme la première émission de téléréalité française, déchaine les critiques. Mais les très bonnes audiences du programme – 4 900 000 téléspectateurs en moyenne pour la première saison, avec un pic à près de 7 300 000 auditeurs pour la finale – se chargent d’assurer sa pérennité.

Tête d’audience

Dix sept ans plus tard, et une pléthore de téléréalités diffusées depuis, le genre a fait son nid dans la grille de programmation télévisuelle française. Des émissions envoyant leurs candidats à l’aventure à l’autre bout du monde (Koh-Lanta et Pékin Express, respectivement lancés en 2001 et 2006), aux concours culinaires (Top Chef (2010), Masterchef (2010)), en passant par les speed-datings revisités (La Belle et ses Princes (2012), Les Princes de l’Amour (2014), La Villa des coeurs brisés (2015)…), la téléréalité se décline de toutes les façons. Avec parfois des succès qui dépassent toutes les attentes, et font de ces programmes des vraies poules aux oeufs d’or pour les chaînes qui les diffusent.

Ainsi, Koh-Lanta (8 127 000 téléspectateurs en moyenne), Star Academy (7 700 000 téléspectateurs en moyenne) et l’Amour est dans le pré (6 326 000 téléspectateurs) trustent les premières positions en terme d’audience moyenne, permettant ainsi à leur chaîne de diffusion (TF1 pour Koh-Lanta et Star Academy et M6 pour L’amour est dans le pré) d’obtenir des parts de marchés importantes sur le créneau première partie de soirée (près de 40% pour Koh-Lanta, 30% pour Star Academy et 27% pour L’amour est dans le pré). Les émissions de cuisine Masterchef (5 227 583 téléspectateurs en moyenne) diffusée sur TF1 et TopChef, (4 051 000), sur M6, remportent également de très bons chiffres d’audience (24,5%  et 18,4% de parts de marché).

Les audiences moins élevées des Chtis (962 000 téléspectateurs en moyenne), des Marseillais (855 000), ou encore des Princes de l’amour (660 000) s’expliquent en partie par la plage horaire de diffusion de ces programmes, fixée à l’avant soirée (entre 18 et 20h, et qui précède donc la première partie de soirée, le prime-time, qui rassemble le nombre le plus élevé d’audimat). Les scores ne prennent également pas en compte la consommation en différée, parfois considérable pour ces minis-séries quotidiennes. Replay compris, l’audience moyenne pour la saison 6 des Marseillais  grimpe ainsi à près de 1,4 millions de téléspectateurs.

Candidats et salariés

Depuis 2009 et sur décision de  justice, « candidat » de téléréalité est devenu un métier à part entière. La société de production se voit donc contrainte de rédiger un contrat de travail  pour ces postulants, considérés comme des intermittents du spectacles. Le gain financier que peut espérer un candidat est néanmoins tout à fait relatif à l’émission qu’il rejoint.

En tête de liste du classement,  Les Anges (NRJ12), L’Ile des vérités (NRJ12), et la Villa des coeurs brisés (NT1), qui verse en moyenne 2000 euros par semaine à ses candidats, suivis de près par Les Marseillais (1900 e/semaine). Si ces émissions semblent donc être les plus généreuses avec leurs candidats, il est cependant essentiel de distinguer le salaire perçu par un « ancien », qui a déjà pris part à l’émission ou une autre téléréalité par le passé et donc connu du public, et un « nouveau » candidat.

Ainsi, les stars de la téléréalité recrutés au casting des anges peuvent toucher jusqu’à quatre fois le montant des « inconnus » : Amélie Neten, figure emblématique de l’émission, aurait ainsi perçu 40 000 euros pour le tournage de la septième saison des Anges (4 000e/semaine), contre un peu plus de 10 000 euros pour Somayeh Rashidi, (1 000 e/semaine) « ange anonyme » de la saison. Pour les Chtis et les Marseillais (tous deux produits par la société Banijay), la différence serait de 12 000 euros (2 400e/semaine) pour les « anciens » contre 7 000 euros (1 400e/semaine) pour les « nouveaux ».

Secret Story (TF1), qui rémunère en moyenne ses candidats 500 euros par semaine passée dans l’émission, continue de payer les participants éliminés à hauteur de 350 euros par semaine jusqu’à la fin du tournage. Koh-Lanta (TF1) attribue également une prime d’après tournage aux candidats, pour que ces derniers ne divulguent pas le nom du gagnant avant la diffusion de l’émission.

Les téléréalités de cuisine font figure de mauvais payeurs : avec un salaire de 287 euros par semaine versés aux candidats, Top Chef (M6) fait à peine mieux que Masterchef (TF1) et ses 250 euros alloués par semaine.

Quant à L’amour est dans le pré (M6), l’émission de rencontre pour agriculteurs tournée sur une année ne rémunère tout simplement pas ses participants.

Si la somme versée aux candidats varie donc sensiblement selon les émissions, et n’est pas forcément relative à la popularité de ces dernières :

Grosses audiences ne riment donc pas forcément avec haut salaire : si Koh-Lanta (TF1) enregistre le nombre le plus important de téléspectateurs, l’émission n’arrive qu’en dixième position en terme de salaire attribué à ses candidats (550 e/semaine en moyenne). Un montant qui peut sembler bien bas  quand on sait que la chaîne a amassé plus de 27 millions de revenus publicitaires pour l’émission sur la saison, les spots de publicités pouvant être facturés jusqu’à 87 000 euros les trente secondes.

A l’inverse, la Villa des coeurs brisés (NT1), avant-dernier au classement en terme d’audience, avec 495 000 téléspectateurs en moyenne, verse la rémunération la plus importante, de 2 000 euros par semaine en moyenne.

Certains candidats ne cachent pas leur mécontentement face à des salaires qu’ils jugent trop bas. Frédéric Bayard, candidat de la saison 1 de Masterchef, avait ainsi jugé la rémunération versée (allant de 2 600 à 3 000 euros pour l’ensemble du tournage) en inadéquation avec le temps et l’implication demandé aux candidats (tournage répartis sur 100 jours avec des horaires pouvant aller de 6h30 à minuit).

Finalement, pour espérer s’en mettre plein les poches, les candidats de Koh-Lanta, MasterchefTop Chef, Pékin Express, ou encore Star Academy ont finalement plutôt intérêt à remporter le jackpot de leur émission respective.

Marketing d’image et placement de produits

Si certains candidats de téléréalité « ancien » peuvent être grassement payés pour prendre part à une émission – Jessica Thivenin et Julien Tanti des Marseillais auraient ainsi touché 65 000 euros chacun pour six semaines de tournage pour Les Marseillais VS le reste du monde 2, quand Le Parisien rapporte que Nabilla Benattia aurait reçu la somme de 200 000 euros pour le tournage de sa téléréalité éponyme, Allô Nabilla -, le vrai business du milieu s’effectue en dehors de l’émission.

Les placements de produits sur les réseaux sociaux sont ainsi devenus une véritable manne financière pour ces « stars de la téléréalité ». Une photo ou vidéo avec un produit peut ainsi rapporter quelques centaines voire milliers d’euros à un candidat. Un prix versé par la marque proposant le produit et déterminé en fonction de la taille de la « communauté « , c’est-à-dire le nombre de « followers » du candidat. Jessica Thivenin, starlette de la téléréalité française aux 3,4 millions de followers Instagram, toucherait ainsi quelques 24 000 euros par mois simplement grâce aux placements de produits.

Axelle Bouschon

Prêt-à-porter ou sur-mesure : à chacun son enterrement

Urnes en verre ou en métal, cercueils en pin ou en acajou, l’offre disponible pour les obsèques, déjà vaste, ne cesse d’évoluer. Et si une option n’existe pas encore, il est toujours possible de la faire commander.

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Taille, couleur, épaisseur… Des croix aux plaques gravées, les funérailles deviennent de plus en plus personnalisables pour les proches des défunts. Crédits photo : Samuel Kahn

Modèle, prix, taille, couleur, désormais, même les funérailles sont personnalisables à souhait. Toutes les gammes de prix sont disponibles, de 700 € pour un cercueil en bois de base à 25 000 € pour un modèle en acajou serti d’or. Du type de bois utilisé à la présence ou non de capiton dans le cercueil en passant par la finition des poignées, « les proches doivent avoir le maître mot dans la décision finale de ce à quoi devra ressembler le cercueil. Ils nous font part de leurs désirs, et on s’en rapproche au maximum » explique un employé des pompes funèbres OGF.

Pour les bourses plus serrées, les cercueils en carton sont plus abordables, avec des modèles allant généralement de 100 à 800 €. “Le carton est plus facilement personnalisable, affirme Brigitte Sabatier, responsable du site abCrémation. On peut choisir un motif tigré, fleuri, romantique…C’est une façon de montrer l’individualité du défunt.

Les urnes restent cependant le choix le plus économique, avec un prix plancher avoisinant généralement les 50 € – auquel il faut cependant ajouter le prix de la crémation : entre 650 € et 2000 € en fonction des funérariums -. 

Enfin, pour agrémenter la tombe du défunt, les motifs à apposer aux plaques marbrées et les formes de sépulture personnalisables à souhait ne manquent pas.

L’offre est donc pléthorique et en expansion constante. D’autant plus que le monde funéraire n’est pas à l’abris des effets de mode. Les images  de Johnny Hallyday dans son cercueil en bois clair, plus tôt dans l’année, en ont inspiré plus d’un : “On a eu un afflux de demandes de cercueils blancs après son décès” raconte ainsi Jean-Michel Saint-Julien, chef d’agence de pompes funèbres.

Axelle Bouschon & Samuel Kahn

Funéraire 2.0 : quand les start-up veulent réveiller les obsèques

Le marché du funéraire est en pleine diversification, et de nombreuses start-ups veulent leur part du gâteau. Cercueils en carton, cendres transformées en diamants ou QR codes qui permettent d’en savoir plus sur la vie du défunt, les innovations ne manquent pas.

Dimanche 27 mai, la foule se presse au cimetière du Père-Lachaise. Entre deux tombes de célébrités, la sépulture du photographe André Chabot détonne, avec son gigantesque appareil photo en marbre flanqué d’un QR code. Certains passants, intrigués, se prennent au jeu et scannent le code-barres avec leur smartphone. Ils sont aussitôt renvoyés sur un site web qui raconte la vie de l’artiste et présente ses travaux.

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« C’est la première fois que je vois un truc pareil », sourit une touriste devant le QR code apposé à la tombe du photographe André Chabot dans le cimetière du Père-Lachaise. Crédits photo : Samuel Kahn

Depuis quelques années, ce dispositif fleurit dans les cimetières. Développé par une multitude de start-up, il permet aux visiteurs curieux d’obtenir des informations sur le défunt qui occupe une tombe. Texte, vidéo, lettre d’amour et même parfois photographies intimes, toutes les fantaisies sont permises. Mais ce code-barres un peu particulier n’est pas la seule innovation à vouloir changer le paysage du funéraire français : cercueils en carton, urnes miniatures à porter autour du cou, compost ou encore diamant à base de cendres humaines, les start-up rivalisent d’idées pour capter ce marché en pleine explosion.

La ruée vers le funéraire

Le baby-boom de la seconde guerre mondiale va se transformer en papy-boom en 2020, avec 800 000 décès par an, contre 500 000 aujourd’hui ”, professe Manon Stundia, cofondatrice de Facilib, une société qui propose à ses clients de prendre en charge la gestion administrative des obsèques de leurs proches. Aujourd’hui, le marché français du funéraire pèse 2 milliards d’euros. Un chiffre amené à augmenter considérablement, ce qui donne des idées à plus d’un entrepreneur.

Brigitte Sabatier, par exemple, ne supportait plus de voir “ces beaux cercueils en bois laqué qui finissaient juste par être brûlés, et qui en plus ne brûlaient même pas très bien” et a donc cherché une alternative. En 2016, elle lance abCrémation, une start-up “française et 100% écologique” qui propose des cercueils et des urnes en carton. “C’est un produit qui est bon pour la planète. Les colles sont végétales, les encres sont aqueuses, le papier pour le carton est recyclé… L’écologie passe aussi par les funérailles !”. Un projet pour lequel elle a longtemps bataillé, jusqu’à la publication en 2016 d’un décret autorisant l’utilisation de cercueils en carton partout en France. Avant cela, une quarantaine de départements français refusaient net la présence de cercueils en carton pour des raisons d’hygiène et de sécurité.

La société Eco-Cerc propose des cercueils en cellulose recyclée depuis 2012. « Je n’imaginais pas que le secteur des pompes funèbres serait aussi hostile : ils ont tout fait pour me tenir à l’écart des crématoriums », confiait au Monde sa créatrice, Martine Saussol, en janvier 2014. Crédits photos : eco-cerc.fr
La société Eco-Cerc propose des cercueils en cellulose recyclée depuis 2012. « Je n’imaginais pas que le secteur des pompes funèbres serait aussi hostile : ils ont tout fait pour me tenir à l’écart des crématoriums », confiait au Monde sa créatrice, Martine Saussol, en janvier 2014. Crédits photos : eco-cerc.fr

L’alternative proposé par abCrémation et les autres vendeurs de cercueils en carton a le mérite de coûter moins cher aux consommateurs. Les prix débutent généralement autour de 100 € pour les cercueils en carton contre 800 € pour les modèles en bois. Problème : la baisse des prix entraîne souvent une chute de la qualité des produits. Si Brigitte Sabatier affirme que ses produits “remplissent les normes d’hygiène, de sécurité et d’épaisseur fixées par la loi, et sont écologiques”, ce n’est pas le cas pour tous les cercueils en cartons proposés à la vente. François Colliot, directeur des pompes funèbres Santilly Bigard à Levallois-Perret estime ainsi que bien souvent, la colle utilisée pour ces cercueils, devient “très polluante” une fois brûlée. “En plus, les nouvelles normes de résistance des cercueils rendent difficiles l’utilisation du carton” conclut-il, visiblement pas emballé par la tendance.

Il faut dire que pour les crémations, le cercueil en carton ne fait pas l’unanimité. Jean-Michel Saint-Julien, chef d’agence de l’entreprise de pompes funèbres Roc-Eclerc, dans le onzième arrondissement de Paris, l’explique : il y a 10 ans, une famille lui demande que leur proche soit incinéré dans un cercueil en carton, en raison de ses “convictions écologiques”. Il effectue donc des démarches auprès du crématorium de la ville qui refuse, “le cercueil risquant de brûler avant d’entrer dans le four”. Seule solution : présenter à la famille un cercueil en carton pour la cérémonie, puis “mettre le cercueil en carton dans un cercueil en bois” au moment de la crémation. Tant pis pour l’écologie.

Diamants, vinyles… Le devenir des cendres soumis à la législation

D’autres sociétés vont plus loin encore dans l’innovation. Pour 5.500 €, les entreprises Lonité et Algordanza, toutes deux basées en Suisse, proposent ainsi de faire des cendres d’un défunt un diamant de 0.4 carats. Un processus rendu possible par le composé constituant commun aux cendres et aux diamants, le carbone. Il suffit donc de soumettre les premières à de très fortes pressions pour obtenir les seconds. La start-up Andvinyly, basée en Grande-Bretagne, produit quant à elle des disques vinyle à partir de cendres. Le groupe Heavens above Fireworks promet d’en faire un feu d’artifice, le studio de design Estudimoline un engrais idéal pour faire pousser un arbre du souvenir,  et la start-up NadineJarvis les transforme en crayon à papier.

Mais là encore, ces initiatives se heurtent à la législation. Aujourd’hui la loi interdit ces pratiques. On n’a pas le droit de transformer des cendres en diamants ou d’en faire un arbre. Des cendres c’est un corps, dans un état transformé. Elles sont indivisibles”, explique François Colliot, responsable de pompes funèbres. Un principe instauré en 2008 par la loi Sueur. Mais les contrôles sont rares, et rien n’empêche les proches de disposer des cendres comme bon leur semble une fois ces dernières entre leurs mains. “Comment voulez-vous que le crématorium refuse? Il n’est pas inquisiteur. Son rôle s’arrête à remettre les cendres à la famille et d’informer cette dernière sur ce qu’elle a le droit de faire ou pas”, confirme François Colliot. Une collègue agente du leader de pompes funèbres français OGF abonde : “ Il n’y a aucune règle qui contrôle l’habitat des particuliers, donc même s’ils n’ont théoriquement pas le droit d’avoir des urnes chez eux, on sait très bien que beaucoup le font. Et si certains décident d’en faire des diamants ou que sais-je… Eh bien ce n’est pas dans notre intérêt de les contrarier. On préfère faire la sourde oreille”.

Des innovations qui ont du mal à convaincre les Français

Pas si facile, donc, de révolutionner les pratiques funéraires en France. Les start-up, en plus de faire face à une législation contraignante, doivent composer avec des familles respectueuses de la tradition.

Un QR code ? Mais c’est quoi ça ? Si les gens ont envie de me connaître, qu’ils viennent me voir de mon vivant, pas sur ma tombe !” s’emporte ainsi Annick, 82 ans. Cette retraitée fait partie de ces rares français qui ont déjà pris l’ensemble de leurs dispositions pour leurs obsèques. Quand j’étais plus jeune, se souvient Annick, j’avais imaginé mon mariage parfait, avec le gâteau, les bougies, la grande allée et la robe idéale. Mon enterrement c’est un peu pareil, sauf que je ne serai pas là pour le vivre”. De fait, elle a déjà acheté son cercueil, en “joli bois blanc, de forme tombeau”. Il lui a coûté 1 500 €. Et plutôt que de le laisser aux pompes funèbres, Annick le garde dans sa cave. “Comme ça, je suis sûre qu’il est bien à l’abri ! Les invités sont toujours curieux de le voir quand je leur en parle. Ils trouvent cela bizarre, mais moi, ça me fait rire”. Cette énergique octogénaire a également réservé sa place dans un cimetière de Nice, à côté de son époux, et a même prévu la tenue qu’elle souhaitait porter pour le grand jour. “J’ai aussi suggéré à mes proches des idées de restaurants où ils pourraient aller manger après la cérémonie, mais ça, je leur laisse la décision finale, sourit Annick. Je veux que mon enterrement soit comme une fête en mon honneur. Je ne peux pas empêcher les gens d’être triste. Mais je ne veux pas leur imposer de tout organiser, surtout que je veux que ça se passe comme j’en ai envie.

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Dimanche 27 mai, fête des mères, les visiteurs sont nombreux à se recueillir au cimetière de Meudon-la-Forêt. En 2017, 65% des Français ont choisi de se faire inhumer. Crédits photo : Axelle Bouschon

Pour Jean-Michel Saint-Julien, agent de pompes funèbres, Annick, quoique bien préparée, est avant tout “une originale”. Il faut dire que les Français sont généralement mal à l’aise avec ce sujet. Jean-Louis Duchêne, ancien militaire de 79 ans résidant à Meudon-la-forêt, est de ceux-là. “Des fois, le sujet vient dans la conversation avec des amis, mais on n’en parle jamais trop longtemps. Ce n’est pas bien joyeux, aussi, comme idée. On dit toujours à celui qui a commencé à en parlerArrête-toi ! On verra bien quand ça arrivera, on ne veut pas y penser !””. “La mort en France est escamotée”, confirme Jean-Michel Saint-Julien, on en parle très peu”.

L’incinération de plus en plus plébiscitée

Quant à ceux qui prennent leurs dispositions, ils se contentent souvent de mettre de l’argent de côté et laissent à leurs proches des instructions quant à la manière dont ils veulent que l’on dispose de leurs corps.

Au cours des dernières décennies, l’incinération a gagné en popularité : si en 1979, on ne comptait que 1% d’incinération en France, ce chiffre est passé à plus de 35% en 2017. Et cette progression ne semble pas s’arrêter de sitôt : selon un sondage IPSOS de 2018, 56% des français préfèrent une incinération à une inhumation.

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« C’est mon urne préférée », montre Estelle Godreau, employée des pompes funèbres de Santilly Defer. Dans cette boutique qui fait face au cimetière du Blanc-Mesnil, les vases funéraires sont plus nombreux que les pierres tombales. Crédits photo : Samuel Kahn

 

Après crémation du défunt, les proches peuvent décider de faire enterrer les cendres dans une concession funéraire, de façon  similaire à une inhumation. Il est également possible de conserver l’urne qui les recueille dans un columbarium – un bâtiment funéraire placé dans un cimetière et géré par la commune qui peut accueillir les cendres d’un ou plusieurs défunts -, ou encore de disperser les cendres soit dans un espace aménagé par la commune – appelé « jardin du souvenir » -, soit dans un lieu public. Il faut alors notifier le maire de la commune dans laquelle on effectue la dispersion.

L’incinération, c’est d’ailleurs la solution qu’ont choisi Pierrette et son mari Louis. Ce couple de retraités réserve depuis trois ans une concession trentenaire dans le columbarium du cimetière de Genay, dans la banlieue lyonnaise, où ils résident depuis plusieurs années. Une place qui pourra accueillir les deux urnes du couple : “Ça fait soixante ans que je suis avec mon mari, je n’ai pas envie d’être séparée de lui après la mort !” . L’inhumation, pas vraiment la tasse de Pierrette : “Être enterrée sous la terre avec les vers et tout…” grimace la retraitée, “je me disais qu’être incinérée c’était plus simple”. Et plus facile pour les proches aussi, qui n’auront plus qu’à choisir les urnes du couple au moment venu.

 

En 2017, 35% des défunts ont été incinéré. Dans 15% des cas, et comme le prévoient Pierrette et Louis, les cendres du défunt sont placées dans un columbarium. Un choix généralement moins onéreux qu’un caveau, mais dont le prix varie grandement d’une commune à une autre. Crédits infographie : Axelle Bouschon

La guerre des places dans les cimetières

Si Pierrette, Louis, et Annick ont pu réserver leur concession sans trop de problème, pour certains, trouver une place s’apparente parfois à un parcours du combattant. Les cimetières des grandes villes sont engorgés. Et les places restantes sont chères. Dans les cimetières de Paris intra-muros, une concession perpétuelle coûte 7 764 € le mètre carré. Les candidats au Père-Lachaise ou à Montparnasse n’ont aucune certitude d’y accéder, les deux cimetières étant pleins à craquer. Les places se libèrent au gré des reprises de concessions.

Un processus très long et très incertain”, selon le conservateur adjoint du cimetière de Montmartre, Frédéric Tempier. “Il faut envoyer des lettres recommandées à tous les ayants-droit et la moindre erreur peut faire capoter la procédure de tous les dossiers”, explique-t-il. Au cimetière de Clamart, le gardien regrette d’être “parfois obligé de remplacer le cercueil d’un défunt donc la concession n’a pas été renouvelée par un autre dans les jours qui suivent”. Au cimetière de Montmartre, il est impossible de réserver une concession : les milliers de personnes qui souhaitent y être enterrés n’ont d’autre choix qu’espérer la libération d’une concession le jour de leurs obsèques. En 2017, seulement 386 personnes ont pu y être accueillies.

Décennale, trentenaire, cinquantenaire ou perpétuelle : le prix d’une concession funéraire dépend en partie de la durée de location choisie par le défunt. La commune où ce dernier est inhumé est l’autre facteur qui détermine le prix final : ce prix peut être jusqu’à parfois 15 fois plus important d’une commune à une autre. Crédits infographie : Axelle Bouschon

Pour pallier ce problème, des solutions ont été envisagées dès les années 1980. Une pelouse cinéraire où il est possible de disperser des cendres et de venir se recueillir a ainsi été installée au cimetière du Père-Lachaise en 1985. Mais là encore, le lieu est victime de son succès : “On en est à 1300 dispersions par an, on est à saturation”, déclare la conservatrice du cimetière, Martine Lecuyer. Il y a trois ans, une borne électronique a été installée à l’entrée du cimetière. On peut y consulter les noms des défunts et la date de la dispersion de leurs cendres.

Guilherme Evangelista, restaurateur à la retraite, recherche le nom de son frère, dont les cendres ont été dispersées l'année dernière sur la pelouse funéraire du cimetière du Père-Lachaise
Guilherme Evangelista, restaurateur à la retraite, recherche le nom de son frère, dont les cendres ont été dispersées l’année dernière sur la pelouse cinéraire du cimetière du Père-Lachaise. Crédits photo : Samuel Kahn

Ces dispositifs innovants (électroniques ou non) rencontrent un certain succès. On devrait donc être amenés à voir des QR codes et des écrans se multiplier dans les cimetières français dans les prochaines années, même si Martine Lecuyer admet que “la ville de Paris a quelques années de retard”.

Si aujourd’hui, les innovations funéraires ne manquent pas, nombre de ces propositions ont du mal à convaincre. Clients comme vendeurs pointent du doigt le côté parfois fantaisiste de ces inventions qui, plutôt qu’apporter une réponse aux problèmes rencontrés par les familles et les municipalités – le manque de place, les prix encore trop élevés entre autres -, s’apparentent parfois bien plus à des gadgets.

Axelle Bouschon & Samuel Kahn